Autoportrait de l’immigrant en Québécois

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Tout espoir n'est pas perdu

Akos Verboczy est un phénomène. Québécois d’origine hongroise arrivé à Montréal en 1986, à l’âge de 11 ans, il est aujourd’hui souverainiste, partisan de la loi 101 et opposé au multiculturalisme. Il raconte son parcours atypique dans Rhapsodie québécoise, un délicieux autoportrait, plein d’humour, de finesse et de tranchant.

Une anecdote illustre à merveille le coeur de son propos. Au début des années 1990, Verboczy fréquente une école secondaire publique très multiethnique de Montréal, où les représentants de la majorité francophone sont absents. Soudain, en 4e secondaire, coup de théâtre : un Québécois de souche — Verboczy n’a pas de réticences à employer cette expression — arrive. « Au milieu de cette mer où on célébrait à toute occasion la diversité, écrit l’auteur, il était le plus différent de nous tous. »

Un peu hippie, ouvertement souverainiste, pas fan du Canadien et indifférent à ses notes en anglais, « le Québécois » détonne. « Dans ce milieu culturellement façonné par le conformisme de la culture populaire américaine, marqué par le matérialisme primaire et les modes qu’elle imposait, explique Verboczy, sa présence nous rappelait ostentatoirement l’existence d’un autre modèle culturel qui faisait tout d’un coup obstacle à notre quête du rêve américain. » N’est-ce pas Jean Larose qui disait, je ne sais plus trop où, que l’Autre, en Amérique, c’est nous, avec notre rêve français, et social-démocrate, ajouterais-je ?

Attitude méprisante

Verboczy se réclame aujourd’hui « de l’héritage de ce Québec qui [l]’a adopté » et dit « nous autres » en parlant des Québécois, mais on comprend à la lecture de son livre que cela tient presque du miracle. Quand il quitte la Hongrie, avec sa mère et sa soeur, sa grand-mère francophile se réjouit du fait qu’il vivra en français, une langue si prestigieuse pour elle.

Dès son arrivée à Montréal, on lui apprend pourtant « que le français parlé ici n’était pas le vrai français, mais un patois malpropre, dont les locuteurs étaient principalement des assistés sociaux, des incultes et des racistes ». Accueillis par les communautés hongroise et juive de Montréal, Verboczy et sa famille ont vite compris « que le Canada était le seul endroit sur la planète où parler français n’avait rien de prestigieux ».

Le premier obstacle à l’intégration des immigrants à la société québécoise se trouve justement, explique Verboczy, dans l’attitude méprisante envers la majorité francophone que cultivent les milieux anglophones et immigrants. Dans ces communautés de la prétendue diversité, le consensus veut que, « quand on n’est ni Québécois de souche ni idiot, on est contre la loi 101 et on vote Non ». Et libéral.

Verboczy raconte que, dans son école secondaire, lors d’une insipide journée interculturelle consacrée à la danse, chaque communauté accueillait par des applaudissements le numéro illustrant sa culture. Toutefois, au moment de la conclusion réservée à la danse typiquement québécoise, un concert de huées se fit entendre. Cela fait penser à ce qu’on appelle, en France, « les territoires perdus de la République ».

Verboczy raconte aussi que sa mère esthéticienne s’inquiétait de ses fréquentations quand il étudiait au cégep de Rosemont plutôt que dans un cégep anglophone. « Au moins, il ne prend pas de drogue », lui disaient ses clientes westmountaises pour la consoler. « Peut-être pas, mais il lit Le Devoir », répliquait sa mère pour bien faire comprendre la gravité de la situation.

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