Duceppe ne craint pas l'arrivée d'Ignatieff

Le Canada anglais s'accroche au mythe du «sauveur qui va venir chercher le Québec», dit-il

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Ignatieff - le PLC et le Québec

Le chef du Bloc québécois affirme que l'arrivée de Michael Ignatieff à la tête du Parti libéral «change la donne» à Ottawa, mais il ne se dit pas inquiet pour autant d'avoir ce nouvel adversaire dans les pattes au Québec lors des prochaines élections.
C'est ce qu'a soutenu Gilles Duceppe hier, lors d'une entrevue de fin d'année avec Le Devoir. Assis dans son bureau de député, à quelques pas de la Tour Radio-Canada, à Montréal, il a discuté des récents changements à Ottawa, de l'avenir de la coalition PLC-NPD et de la perception des Canadiens anglais envers le Bloc québécois. Il a notamment affirmé que le Canada devrait avoir plus peur des politiques de Stephen Harper que de son parti souverainiste.
Gilles Duceppe est bien conscient que Michael Ignatieff pourrait s'avérer un adversaire plus dangereux au Québec que ne l'était Stéphane Dion, qui traînait une image négative dans la province. Mais le chef du Bloc ne se dit pas inquiet pour autant. «C'est sûr que c'est une nouvelle donne. Mais il faut attendre de voir. Je me souviens, quand Stéphane Dion est arrivé, en décembre 2006. Au premier sondage qui a suivi au Québec, il était à égalité avec le Bloc. Paul Martin, avant lui, faisait du trois pour un contre nous dans les intentions de vote. Alors non, je ne suis pas inquiet. Je respecte mes adversaires, par contre.»
Même si Michael Ignatieff a été le premier à lancer le débat sur la nation québécoise, en 2007 -- il était alors en pleine course à la chefferie --, Gilles Duceppe affirme que rien ne prouve que le nouveau chef libéral aura une marge de manoeuvre plus grande à l'égard du Québec. «On verra. Dans la coalition, le NPD était prêt à accepter que le français soit la seule langue de travail au Québec, mais les libéraux n'ont pas voulu.»
Selon lui, le Canada s'accroche encore au «mythe» du «sauveur» plutôt que de tenter de comprendre le Québec. «C'est toujours ce mythe du sauveur, au Canada anglais. Le gars qui va venir chercher le Québec. Souvenez-vous, Paul Martin devait faire disparaître le Bloc. Et il était pas mal plus équipé au Québec qu'Ignatieff, on ne se contera pas d'histoires. Il était le ministre des Finances qui avait relancé le Canada, il avait une organisation extraordinaire, il avait vécu au Québec, les gens revenaient en politique pour lui et ainsi de suite. On a vu ce qui est arrivé. Après, les gens ont entendu le discours de Harper et ont prédit la mort du Bloc. Il y a toujours quelque chose qui arrive.»
L'avenir de la coalition
Selon Gilles Duceppe, la présence d'Ignatieff ne devrait pas changer la détermination de la coalition à renverser le gouvernement Harper en janvier. «Ignatieff a dit qu'il se voit toujours à la tête d'un gouvernement de coalition. Alors on verra.» Mais sent-il que la coalition est plus fragile maintenant? «Ça demeure des impressions. On verra quand le budget sera déposé.»
Il reconnaît toutefois qu'il est présentement «difficile de prédire ce qui va arriver» à Ottawa. Gilles Duceppe estime que dans le reste du Canada, le concept de coalition voit le jour dans la douleur et que cela doit chatouiller le PLC et le NPD. «Chacun a sa réalité politique, dit-il. Au Québec, la coalition est fortement appuyée, mais dans le reste du pays, elle est dénoncée. Ça peut pas ne pas rentrer dans leurs calculs. Mais en même temps, est-ce qu'ils veulent aller en élections si le budget est inacceptable? Il faut regarder les choses objectivement.»
Par contre, il dit comprendre le nouveau chef libéral de vouloir attendre le budget avant de se décider. Il affirme qu'il ferait la même chose. «Ça serait ridicule de dire que je suis contre quelque chose que je n'ai pas vu!» Si le premier ministre veut l'appui du Bloc, il sait très bien à quelle enseigne loge son parti sur les questions de l'environnement, de la culture, de l'aide aux travailleurs et aux entreprises, dit-il. «Mais je ne pense pas que Harper va faire un changement de cap majeur.»
Le chef du Bloc a dit trouver «ridicule» la démonisation de son parti, à la fin de la dernière session parlementaire. Il affirme que les Canadiens anglais ne devraient pas avoir peur de sa formation et qu'une coalition qui reçoit l'appui du Bloc ne met pas le pays en danger. «Le discours de Harper ne tient pas. On ne peut pas être les méchants séparatistes qui ont un droit de veto sur le pays au Canada anglais, et au Québec, être accusés d'avoir vendu notre âme aux fédéralistes. C'est ridicule! L'entente avec la coalition a été faite de manière rigoureuse. Les partis se sont engagés à respecter une entente pour deux budgets et un discours du Trône. Pas plus. Pour le reste, on vote comme on veut.»
Selon Gilles Duceppe, les Canadiens ne doivent pas être aveuglés par l'étiquette souverainiste de son parti. «Les Canadiens n'ont pas à être inquiets. Le danger pour le Canada, ce n'est pas le Bloc ou la coalition, ce sont les politiques de Harper. C'est lui qui a fait une campagne en disant qu'il n'y aurait pas de déficit et pas de récession. C'est un gouvernement qui va à contre-courant de la planète. Il s'isole en environnement, dans les affaires étrangères, notamment avec son appui à Guantánamo. C'est un gouvernement nettement dépassé.»


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