Le Général et le complot

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L’hypothèse de M. Rémi Guertin, rapportée sous le titre De Gaulle, Sarkozy et le Québec, et inspirée d’une remarque de Conrad Black, me paraît plutôt savoureuse mais assez tirée par les cheveux. De Gaulle aurait provoqué un tel esclandre, en 1967, simplement pour faire savoir è Ottawa qu’il méprisait le fédéralisme canadien, l’assimilant au colonialisme pratiqué en Afrique par la Grande-Bretagne, de sorte que le Québec, dans tout cela, n’aurait été qu’un instrument commode dans une stratégie étrangère et indifférente à son propre sort. Certes, De Gaulle pouvait se montrer machiavélique au gré des circonstances. Mais aurait-il consacré tout ce temps et mobilisé tous ces moyens simplement pour faire suer les Anglo-Saxons par un geste qui, sur le coup, plongeait la France dans l’embarras diplomatique tout en nuisant à ses intérêts ? Et en quoi ce que l’auteur cite de Claude Morin devrait-il voler au secours de sa thèse ? On se sert de ce qu’on a sous la main, et seul le contexte de l’article peut rendre cette déclaration ambigüe.
Alain Peyrefitte, ministre gaulliste, publia, des années après les faits, un livre où il soutenait que le geste du général était l’aboutissement planifié d’une pensée qu’il ruminait depuis des années et qui n’avait rien à voir avec un objet aussi trivial. Il existe d’autres témoignages, lus au cours des ans, qui vont dans le même sens. Je n’ai malheureusement pas ces références à ma disposition présentement. Reste que le général, jusqu’à la fin, et ses suivants ont respecté sa politique jusqu’à aujourd’hui. Il n’est même pas encore dit que Sarkozy, quelle que soit sa pensée réelle, réussira à détruire ce qui a été construit, en dépit de la distorsion qu’il pourrait faire subir au langage diplomatique.
Je me demande, du moins cela demeure une interrogation pour le moment, si l’article de M. Guertin ne s’inscrit pas, sciemment ou non, dans la foulée de la stratégie de tassement par le fédéral que subit le Québec depuis plusieurs mois. Il me paraît en tout cas un peu étonnant que cette intuition surgisse précisément maintenant.
Bon, je retourne à mes vacances. À votre santé, Général.


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2 commentaires

  • Gaston Boivin Répondre

    5 août 2008

    Monsieur Poulin, pour valoir comme commentaires à votre texte, je me permets de reproduire ici ceux que j'ai fait parvenir à monsieur Guertin sur son site: http://www.rguertin.com/ :
    "Bonjour, monsieur Guertin,
    J'ai lu sur "Cents Papiers", votre article intitulé"De Gaulle, Sarkozy et le Quebec", et je dois vous dire que je ne partage pas votre interprétation des évènements.
    En lisant votre texte, je me suis dit que celui, qui l'avait écrit, n'avait certainement pas vécu personnellement cette visite, ni connu lui-même tous ces evènements et les jours qui s'en suivirent, ni toute cette époque, et que sa connaissance des évènements ne pouvait être que livresque ou que par des archives visuelles.
    Je me permets donc moi-même l'interprétation suivante: Vous avez entre 30 et 40 ans, êtes libéral et fédéraliste.
    Je vous signale que votre article a suscité certains commentaires, notamment sur Vigile.net, où, en tribune libre, deux personnes y ont répondu.
    Osant croire que vous ne prendrez pas comme une insulte mon interprétation et que vous me ferez parvenir vos commentaires sur celle-ci.
    Bonne journée, monsieur Guertin.
    P.S.: À l'époque, cette déclaration de De Gaulle et tout le crescendo ,qui avait suivi le parcours de celui-ci sur le Chemin du Roy, entre Quebec et Montréal, qui avait des allures d'une marche acclamée vers la Libération, avaient, dans la presse et les médias du Roc (et généralement dans leurs pendants anglos-saxons à travers la planète) provoqué des effets équivalents aux conséquences qu'avaient pu produire, durant la deuxième geurre mondiale, l'attaque et la destruction de la flotte américaine en rade à Pearl Harbor,... un véritable "Tsunami", dont les ondes , à travers le monde, ont ébranlé la certitude anglo-saxonne de leur main-mise sur la planète! Quel merveilleux jour!" *(celui que nous a fait vivre cette visite mémorable et qui nous a permis de constater par la suite qu'elle avait bien été comprise par le Roc suite au déferlement de rage qui fut conséquemment le sien. )
    *: ( ) non compris dans mon commentaire à monsieur Guertin.
    Gaston Boivin

  • Archives de Vigile Répondre

    4 août 2008

    À l'âge de 15 ans, boutonneux au domicile familial qui se situait à moins de 300 mètres de la rue Sherbrooke d'ou je vis passer le défilé - et je m'en souviens très bien parce que ce souvenir est inoubliable - dès que, contre toute attente, le cri de Vive le Québec libre retentit du balcon (vu à la télé 20 minutes plus tard) je me roulai littéralement par terre sur la moquette du salon. Aujourd'hui, seuls des vaniteux sans envergure peuvent mettre en doute la sincérité du Général dans son geste. Il n'avait nul besoin de poser ce geste et nul besoin de susciter la controverse qu'il était conscient de provoquer. L'auteur de l'Appel du 18 juin 1940 n'avait rien à cirer de la petite et méprisable politique dans laquelle on veut confiner (comme dans révisonnisme) son geste audacieux. Là ou il en était, il agissait en chef d'État responsable, et il importe de souligner le mot chef. Il nous a donné l'exemple de l'audace et du courage en politique, je n'en douterai jamais. Et je réalise aujourd'hui qu'il s'agit là d'une denrée rare, ce qui me fait l'apprécier d'autant plus avec le recul. Qui, de nos hommes et femmes politiques, est prêt à reprendre le Vive le Québec libre de cet homme qui n'était après tout qu'une figure étrangère? Pauline Marois, Gilles Duceppe, Éric Tremblay, Richard Gervais, Françoise David, Robert Laplante ? Qui marche et qui ne marche pas dans les larges traces ouvertes mais peu fréquentées de ce Résistant ?... la plupart d'entre eux, vous en conviendrez, chaussent de trop petits souliers. Le Vive le Québec libre les étouffe, il leur bloque dans la gorge. La plupart sont des poltrons. Qu'il est difficle de secouer ses chaînes. Faut-il être étranger pour être libre de ses paroles au Canada ? Serait-ce cela le Canada ? Louis Hémon, Charles de Gaulle, Sir Paul ? Telle est, semble-t-il, la nature de la "démocratie" canadienne.
    Vive le Québec libre !
    Vive l'esprit du Vive le Québec libre de 1967 dans le contexte de 2008 ! Actualisons l'audace et le courage d'un Charles de Gaulle venu nous dire que nous aussi nous pouvons oser.
    Gilles Verrier