Un gouvernement par défaut

Québec 2007 - Analyse




Jean Charest part avec un léger avantage, mais tous les scénarios demeurent encore possibles, y compris celui, quoique assez peu probable, d'un gouvernement minoritaire.
Les deux premières semaines de la campagne électorale seront déterminantes. Jean Charest et André Boisclair sont tous les deux très peu populaires. La stratégie de campagne électorale consistera donc à mettre en évidence les candidats locaux et quelques têtes d'affiche «nationales». Jean Charest est toujours entouré de nombreux candidats dans les plans de caméra et il fera campagne sur le thème «Unis pour réussir», de façon à se faire oublier quelque peu.
Mais André Boisclair est encore plus vulnérable que lui; il compte sur moins de «vedettes» à pousser à l'avant-scène et surtout, l'organisation du Parti québécois n'est pas l'ombre de ce qu'elle a déjà été. En 2003, le Parti libéral avait pu compter sur sa base électorale traditionnelle, mais 350 000 partisans avaient déserté et avaient joint le Parti québécois. Le taux de participation à l'élection n'avait d'ailleurs été que de 70 % et le PQ a alors récolté son plus faible taux d'appui depuis 1976. Le PQ est en plus miné cette année par deux minipartis, Québec solidaire et le Parti vert, qui ont détourné chacun de petites fractions de sa clientèle.
Le Parti québécois demeure certes très solide dans ses forteresses de l'Est de l'île de Montréal, mais il est menacé d'effondrement ailleurs dans le Québec francophone. Si un tel scénario devait se développer, Jean Charest formerait à nouveau un gouvernement majoritaire sans difficultés, et l'Action démocratique pourrait même supplanter le PQ et former l'opposition officielle.
C'est en ce sens que les deux premières semaines de campagne seront cruciales. André Boisclair ne peut se permettre de rater son départ. Si tel devait être le cas, il sera entraîné dans une spirale infernale qui pourrait ultimement mettre en jeu la survie du Parti québécois.
Mario Dumont, pour sa part, ne rêve pas en couleurs à propos des gains qu'il peut réaliser sur l'île de Montréal. Par contre, l'Action démocratique est maintenant bien implantée dans la ceinture qui entoure la métropole (indicatif téléphonique 450). Elle mène largement dans les sondages à Québec, où des luttes épiques sont à entrevoir avec le Parti libéral (dans Vanier et Chauveau notamment, et Lévis où la bataille se fera à trois). Elle avait fait élire ses candidats dans Chutes-de-la-Chaudière, Beauce-Nord et Lotbinière en 2003 et elle s'est aussi classée deuxième dans Montmorency, Portneuf, Beauce-Nord, Bellechasse et Montmagny-L'Islet. Le profil socio-économique des électeurs du centre du Québec et de quelques comtés en régions éloignées correspond enfin assez bien à sa clientèle naturelle.
Mario Dumont ne se lance pas en campagne accroché à un ballon à l'hélium, comme en 2003, et qui s'était dégonflé en quelques jours. Entre 20 et 25 % d'appuis en moyenne dans les sondages représente une cote d'appuis plus réaliste et beaucoup plus solide puisqu'il avait terminé la course avec 18 % en avril 2003. Il ne peut que monter au cours des prochaines semaines.
Les deux «gros» chefs sont impopulaires; le bilan du gouvernement est très mitigé; le Parti libéral ne peut plus faire de belles promesses puisqu'il n'a pas tenu celles de 2003 et qu'il ne serait pas cru. La population ne voulait par contre plus du socialisme débridé du Parti québécois et elle n'a surtout pas le goût d'un troisième référendum sur la souveraineté avec un leader péquiste qui inspire si peu confiance.
En somme, en dehors de l'Île de Montréal où on vote toujours aveuglément, selon que l'on est fédéraliste ou souverainiste, la campagne se jouera pour beaucoup au niveau des comtés, sur la base de la personnalité des candidats et de l'efficacité des organisations.
Et la population élira un gouvernement par défaut, une sorte de «gouvernement faute de mieux» ou ce «gouvernement faute de pire». Ce ne sera pas très glorieux pour le vainqueur ni trop emballant pour les citoyens.


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