Les 6 milliards pour les garderies...

Une main qui donne, mais l’autre qui retire

La collusion entre Trudeau et Kenney pour réduire la péréquation au Québec !

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Chronique de Jean-Claude Pomerleau

La révision du programme de la péréquation découle d’une entente entre Jason Kenney, premier ministre de l’Alberta, et Justin Trudeau. Cette collusion  pourrait être l’occasion pour ce dernier de faire payer le prix fort à François Legault pour son appui à l’alliance bleue. Vigile propose une stratégie pour défendre les intérêts du Québec.


L’engagement du Justin Trudeau de transférer 6 milliards de dollars pour le programme de garderies fut une promesse clé de sa stratégie électorale pour le Québec. Une promesse qui a fait effet sans que personne ne se demande si celui qui donne d’une main ne reprendra pas de l’autre… la péréquation ! Et pour Justin Trudeau, faire payer à François Legault son appui à l’alliance bleue !


En fait, l’essentiel du programme de Justin Trudeau se situe dans les champs des compétences du Québec à partir du pouvoir de dépenser du fédéral. Ce qui n’a pas été relevé dans cette campagne, c’est que ce pouvoir de dépenser découle du pouvoir de taxation directe, lequel relève… de la juridiction du… Québec !


Bref : on prend l’argent dans la juridiction du Québec pour le dépenser dans les juridictions du Québec.


La centralisation fiscale « temporaire » par Ottawa, l’origine du pouvoir de dépenser du fédéral


Rappelons que dans le contexte de la Grande Crise et de la Deuxième Guerre mondiale, Ottawa avait emprunté temporairement le pouvoir de taxation directe relevant de la juridiction provinciale en 1942. Et que ce pouvoir devait revenir au Québec au retour de la paix. Entendu qu’à l’époque, le gouvernement avait statué clairement qu’il n’abandonnera jamais sa « souveraineté » sur sa juridiction fiscale. Comme l’atteste un document officiel du gouvernement du Québec publié en 2002 : 


Le déséquilibre fiscal au Canada : contexte historique (nos caractères gras) :


https://www.groupes.finances.gouv.qc.ca/desequilibrefiscal/fr/pdf/historique_fr.pdf


« Les provinces adoptent des lois... qui les autorisent à conclure une entente avec le gouvernement fédéral. Le Québec va un peu plus loin en soulignant dans le préambule de la Loi concernant une convention entre le gouvernement fédéral et la Province pour la suspension de certaines taxes en temps de guerre que cette convention ne constitue d’aucune façon une renonciation aux droits de la province sur ses champs fiscaux :


“ Attendu qu’en s’engageant, comme il est ci-après stipulé, à ne pas imposer certains impôts pendant la durée de la présente convention, la province ne sera pas censée avoir cédé, abandonné ou transporté au Dominion aucun des pouvoirs, droits, privilèges, aucune partie de la souveraineté lui appartenant en vertu des dispositions de [l’Acte de l’Amérique du Nord Britannique], ou de toute loi subséquente du Parlement du Royaume-Uni, ni avoir autrement amoindri ladite souveraineté ou l’un de ces pouvoirs, droits et privilèges [...] ” ».



Un bras de fer existentiel pour la suite de l’histoire


La paix revenue, Ottawa n’a pas tenu son engagement de retourner au Québec son pouvoir de taxation directe. S’ensuivit une lutte historique des premiers ministres du Québec pour récupérer notre « butin » :


Maurice Duplessis créa le programme d’impôts et a « arraché » 10 % de points au fédéral. « Presqu’un coup d’État » (Gérard Bergeron). Une brèche dans la centralisation fiscale qui a permis le financement de la Révolution tranquille.


Jean Lesage récupéra d’autres points dans le contexte d’un gouvernement libéral minoritaire à Ottawa, permettant aujourd’hui le financement des programmes sociaux.


Daniel Johnson voulait le retour complet de notre pouvoir de taxation directe, c’est-à-dire « la liberté fiscale, qui est la clé de toutes les autres libertés » (Égalité ou indépendance, p. 53).


En 1957, le PM du Canada, Louis St-Laurent, mis en place le programme de la péréquation, pour contrer la volonté du Québec de récupérer ses capacités fiscales, car il « craignait que l’impôt provincial n’ébranle l’unité nationale »


http://ici.radio-canada.ca/emissions/a_rebours/2016-2017/chronique.asp?idChronique=364468


Depuis, le pouvoir de taxation directe est devenu le premier poste de revenus du fédéral, lui permettant d’avoir comme premier poste de dépenses des programmes qui s’immiscent dans les compétences des provinces. D’où aussi ce 6 milliards dans le programme des garderies…


La main qui donne (garderies), retire de l’autre (la révision à la baisse de la péréquation)...


Justin Trudeau a créé un comité pour revoir le programme de péréquation présidé l’ex-ministre des Finances de l’Alberta, selon le Globe and Mail du 26 février 2021 (« How Alberta’s shrinking economy could shake up the billions Canada spends on equalization ») :


« The next month, the federal finance department commissioned an expert panel, steered by former Alberta deputy finance minister Al O’Brien, to make recommendations on creating a structure for equalization driven by principles, not political deals [...]. »


https://www.theglobeandmail.com/business/article-how-albertas-shrinking-economy-could-shake-up-the-billions-canada/


Toujours selon le Globe and Mail, la révision de deux critères du programme de péréquation entraînerait une baisse des transferts au Québec de 5,6 milliards :


« [...] and payments to Quebec would decline to $7.5-billion, a drop of $5.6 billion from the amount the province will actually receive in 2021-22. »


https://www.theglobeandmail.com/business/article-it-could-be-politically-perilous-to-tweak-the-equalization-formula-to/


Alors que Justin Trudeau nous a fait miroiter un transfert de 6 milliards étalé sur plusieurs années pour le programme des garderies, le Québec serait privé de l’équivalent de ce montant… chaque année si sa collusion  avec Jason Kenney, premier ministre de l’Alberta, prend effet.


Cette manœuvre de Justin Trudeau découle d’une entente avec Jason Kenney, lequel se définit comme un Canadian patriot. Elle visait à contrer la montée en force des autonomistes de l’Ouest. Et ces derniers risquent de réagir fortement à l’élection des libéraux. 


Trudeau sera alors sous pression, et pour calmer le jeu, il devra consentir aux recommandations du comité sur la révision de la péréquation présidé par l’ex-ministre des Finances de l’Alberta. Le référendum en octobre en Alberta mettant en cause ce programme va donner une impulsion à ce scénario. D’autant plus qu’il aura là l’occasion de faire payer à François Legault le prix de son appui à l’alliance bleue.


Cette collusion entre Justin Trudeau et Jason Kenney menace les intérêts supérieurs de l’État du Québec, pourtant passé sous de radar des médias québécois jusqu’à maintenant.


Vigile a publié un texte il y a quelques mois proposant une prise de position pour empêcher que la collusion entre Justin Trudeau et Jason Kenney prenne effet : « Un gambit : le Québec renonce à la péréquation pour la récupération de points d’impôts ». En invitant au passage les autonomistes de l’Ouest à faire de même, l’occasion d’en faire des alliés objectifs.


https://vigile.quebec/articles/des-pertes-prevues-de-5-6-milliards-pour-le-quebec


La centralisation fiscale par Ottawa a mené au pouvoir de dépenser du fédéral. Comme le Québec a cessé la lutte pour la récupération de son « butin » pour tendre la main du quêteux, avec le temps s’est installé dans l’opinion publique une mentalité de dépendance vis-à-vis l’argent du fédéral. La main qui donne est au-dessus de celle qui reçoit, et pèse lourd sur le destin de notre nation. 


Il serait temps de changer ce jeu de mains, jeu vilain, en bras de fer pour récupérer notre « butin » ! Vigile a vu venir cet enjeu et propose une stratégie pour contrer la collusion entre Justin Trudeau et Jason Kenney.




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3 commentaires

  • Jean-Claude Pomerleau Répondre

    12 octobre 2021




    Ce que dit Vigile depuis longtemps. On se demande pourquoi les souveranistes appuient ce programme plutôt que la lutte pour récupérer notre pouvoir de taxation direct. L'impôt, c'est la liberté, Daniel Johnson. Référendum en Alberta le 18 octobre mettant en cause la péréquation :


    La péréquation au cœur de l’unité nationale



    « Le principe de la péréquation qui fera l'objet d'un référendum en Alberta est au cœur de l’unité de la fédération canadienne, selon plusieurs experts.»

    (...)

    Le professeur à l'École des études politiques de l'Université d'Ottawa André Lecours estime que le principe de la péréquation est crucial pour l’unité nationale canadienne.




  • Jean-Claude Pomerleau Répondre

    1 octobre 2021

    Les autonomistes à l'Ouest redéfinissent le droit à l'autodétermination de l'Alberta :



    “This is about the right and the power to govern yourself,” he says. “The ultimate sovereign power in the province of Alberta is going to be, under this strategy, the legislature — much like the National Assembly in Quebec.



    https://nationalpost.com/opinion/columnists/braid-group-with-mla-backing-wants-alberta-to-flout-federal-laws-claim-sovereignty/wcm/0ecec08d-090b-4871-9985-6e4582908ea4


     


  • Jean-Claude Pomerleau Répondre

    29 septembre 2021

    Le Québec devra se réveiller pour défendre ses intérêts :


    Un autre signe que le ROC en a assez du Québec


    https://www.journaldemontreal.com/2021/09/29/un-autre-signe-que-le-roc-en-a-assez-du-quebec