L'Église bolivienne courtise l'armée et la police
24 octobre 2009
Cela vous étonne? Il m’a semblé que l’Église sud-américaine suivait exactement le même chemin que l’Église européenne mais de manière encore plus visible : le copinage du sabre et du goupillon, du Trône et de l’Autel. Les prêtres qui ont accompagné leurs fidèles et le peuple en général dans son exigence de justice et d’humanité l’ont fait à leurs risques et périls, en rupture ouverte ou discrète avec le haut-clergé, à l’exception de trois ou quatre évêques, dont Mgr Romero et Mgr Camarra. L’Église nors-américaine, y compris québécoise, n’a pas échappé à ce sort non plus jusqu’à très récemment, et encore aujourd’hui quant à la plupart des évêques. Comme tous les corps constitués, l’Église, depuis qu’elle en est devenue un sous l’Empire romain, n’a pas dérogé à la nature de toutes les autorités lorsqu’elles se transforment en pouvoirs officiels : se tenir le plus possible du côté du manche. Nous avons le tort de confondre la spiritualité et les Églises, quelles qu’elles soient : elles ont très peu à voir avec le Dieu dont elles se réclament. Les prostituées de Babylone, ce n’est pas une expression vaine.
Pour le moment, l’Église du Honduras ressemble au portrait qu’on trouve dans ce poème de Marceline Desbordes-Valmore (1786-1859), écrit après une fusillade de canuts faisant grève, vers 1835.
DANS LA RUE (Pauvres Fleurs)
Par un jour funèbre de Lyon
Nous n'avons plus d'argent pour enterrer nos morts./
Le prêtre est là, marquant le prix des funérailles;/
Et les corps étendus, troués par les mitrailles,/
Attendent un linceul, une croix, un remords./
Le meurtre se fait roi. Le vainqueur siffle et passe./
Où va-t-il? Au Trésor, toucher le prix du sang./
Il en a bien versé… mais sa main n'est pas lasse;/
Elle a, sans le combattre, égorgé le passant./
Dieu l'a vu. Dieu cueillait comme des fleurs froissées/
Les femmes, les enfants qui s'envolaient aux cieux./
Les hommes… les voilà dans le sang jusqu'aux yeux./
L'air n'a pu balayer tant d'âmes courroucées./
Elles ne veulent pas quitter leurs membres morts./
Le prêtre est là, marquant le prix des funérailles;/
Et les corps étendus, troués par les mitrailles,/
Attendent un linceul, une croix, un remords./
Les vivants n'osent plus se hasarder à vivre./
Sentinelle soldée, au milieu du chemin,/
La mort est un soldat qui vise et qui délivre/
Le témoin révolté qui parlerait demain…/
Prenons nos rubans noirs, pleurons toutes nos larmes;/
On nous a défendu d'emporter nos meurtris./
Ils n'ont fait qu'un monceau de leurs pâles débris:/
Dieu! Bénissez-les tous; ils étaient tous sans armes!