Bernard nous a quittés
28 septembre 2012
Je suis vraiment désolé par la disparition de Bernard Frappier. Sans jamais l'avoir vu, je le tenais pour un ami et, en une certaine mesure, un maître. J'ai compris il y a quelques années le potentiel d'internet grâce au site Vigile et au savant usage que Bernad faisait déjà de son potentiel et de ses ressources.
C'était il y a 12 ou 13 ans. Une société de gestion de droits de publication menaçait Vigile avec une requête de paiement exorbitante. J'avais écrit à Bernad un message de courriel pour le manifester ma solidarité et mon appui. Celui-ci fut notre premier contact. Le dernier, il y a moins de deux mois.
J'ai suivi au long des années le cheminement de Vigile, ses difficultés économiques, la lutte acharnée de Bernard pour le faire vivre. Il triomphait toujours parce que son combat était mobilisateur, parce qu'il avait la lucidité de nos interpeler, de nous impliquer. Amis ou simples lecteurs, québécois ou étrangers, si on ne l'avait pas aidé on se serait sentis comme des misérables.
Je crois avoir été un des premiers à l'avoir suggéré le financement populaire par rapport aux exigences économiques croissantes. Je ressentais la nécessité de faire quelque chose, de rémunérer tant de travail, de sacrifice et d'information accomplis par un seul homme, 365 jours à l'année, sans rien demander. Je me souviens que je l'avais envoyé, en guise de cadeau de Noël, un disque d'un grand chanteur basque.
Après, quand le financement populaire s'est mis en route, j'ai participé, modestement, dans la mesure de mes forces.
Nous avons eu le dernier contact les premiers jours d'aout. J'avais envoyé à Vigile un courriel pour signaler un lien mort et la vraie adresse du vidéo concerné. C'est Bernard qui m'a répondu, en s'intéressant pour ma famille et pour la crise économique en Espagne. Je l'ai remercié. Je l'ai annoncé aussi que je projetais d'aller l'année prochaine à Montréal avec mon épouse, et que pour nous serait un vrai plaisir de l'inviter à diner. Finalement, je le demandais pour ses problèmes de santé.
Il ne m'a pas répondu. Je comprends très bien qu'il n'a pas voulu m'ennuyer avec ses soucis de santé. Bien entendu, le souper à Montréal ne sera plus possible. Je le regrette. Je ferai un don à Vigile en guise de substitution.
Bien entendu, je ne peux pas aller aux obsèques de Bernard à Montréal. Je lis qu'on va les faire dans une église catholique. Le hasard a voulu qu’exactement à la même heure, je me trouve à une petite église, dans un hameau basque, pour le mariage d'une jeune fille bien aimé. De ma montagne basque, j'aurai une longue pensée pour Bernad, pour sa vie de combat en quête d'un Québec libre, pour son ouvre, vaste et généreuse. Son combat a toujours été légitime, je le sens. Sans haine et sans rancoeur, il a tenté de libérer son pays, et, en même temps, de libérer le Canada de sa pulsion obsessionnelle d’anéantissement du Québec.
Je suis désolé. On comprend le vrai sens des mots quand elles prennent vie et expriment votre pensée profonde. Oui, vraiment, je suis désolé. Et ce n'est pas une formule de politesse. Aujoud'hui je comprends bien ce que cela signifie.
Gloria a toi, Bernard !