Le choix entre déracinement ou enracinement
5 juillet 2014
Il y a eu un colloque international sur L'Acte de Québec de 1774 à la Grande bibliothèque en octobre 2013.J'ai participé avec un ami aux deux jours de séance. Des historiens et juristes, d'Europe, des États Unis et du Canada et du Québec ont fait leurs lectures.
En commentaires de clôture différents participants sont intervenu, dont un qui a posé une question fondamentale : Où était le rapport de force des Habitants ? (entité politique reconnu par la Couronne britannique et le Congrès continental des États Unis à l'époque).
Je suis intervenu au micro pour leur dire qu'il manquait un géopolitologue sur les panels, que Guy Carleton avait évaluer correctement le rapport de force, pour ensuite passer 4 ans à Londres pour convaincre l'État anglais de sont intérêt de consentir au statut de 1774, qui est la première reconnaissance par une puissance étrangère d'un État nation français en Amérique.
Ce statut résulte du rapport de force en présence (Néanmoins, avec l’Acte de Québec, les Anglais avouaient leur position de faiblesse face aux colons de Nouvelle-France: M Sauvé) :
Voici l'évaluation du rapport de force fait par Guy Carleton en novembre 1767 :
CARLETON A SHELBURNE. 4
Québec, 25 novembre 1767.
MILORD,
Comme Votre Seigneurie m'informe que les fonctionnaires de Sa Majesté sont à étudier avec le plus grand soin et la plus grande prudence le perfectionnement de la constitution civile de Québec et que toute lumière propre à faciliter ce travail sera d'un grand secours, je m'efforcerai d'exposer
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la vraie situation de cette province. Afin de répondre au désir de Votre Seigneurie, j'ajouterai à cela toutes les réflections que j'ai eu l'occasion de faire et je vais vous les communiquer avec la franchise qu'on doit apporter au service de Sa Majesté, car il est à craindre que les fonctionnaires de Sa Majesté chargés d'un travail d'une si grande importance, ne puissent faire profiter le service de Sa Majesté de leurs aptitudes, en dépit de leur profond savoir et de leur grand jugement, si les faits et la situation d'une province si éloignée, situation si différente de celle des autres possessions de Sa Majesté, ne leur sont pas fidèlement exposés.
Je dois croire que les droits naturels des citoyens, les intérêts de la Grande-Bretagne sur ce continent et le maintien de la domination du roi sur cette province, doivent toujours être les principaux objets à considérer lorsqu'il s'agit d'élaborer une constitution civile et un système de lois pour cette province; je dois croire aussi que les lois constituent la base de tout sans quoi tout projet ne vaut guère mieux que châteaux en Espagne: cela étant exposé, il s'ensuit naturellement que je dois premièrement démontrer jusqu'à quel point une telle base a été solidement assise ou non.
La ville de Québec est le seul endroit dans cette province qui ait le moindre droit d'être appelée avec raison une place fortifiée, car les murs chancelants autour de Montréal, s'ils ne tombent pas en ruine ne peuvent résister qu'à la mousqueterie.
(...)
Le nombre de troupes du roi allouées pour cette province lorsque celles-ci seront au complet et en bonne santé, y compris les officiers et les soldats, atteindra le chiffre de seize cent vingt-sept hommes, et les anciens sujets de Sa Majesté dans cette province pourront ajouter à ce chiffre, s'ils le veulent, cinq cents hommes en état de porter les armes. Or, avec neuf mois de rudes travaux, le total formé par les troupes et les anciens sujets
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de Sa Majesté réunis à Québec, permettrait de faire subir aux fortifications les réparations urgentes, mais nous n'aurions que le tiers des forces nécessaires pour défendre cette place.
(...)
Les nouveaux sujets pourraient mettre en campagne environ dix huit mille hommes très propres à prendre les armes, dont la moitié à peu près ont servi avec autant de valeur et avec plus de zèle que les troupes régulières de France qui leur étaient adjointes, sans compter qu'ils étaient plus familiers avec les méthodes militaires de l’Amérique.
il n'en reste pas moins nécessaire d'ériger une citadelle, car l'avenir réserve des événements qui la rendront absolument nécessaire pour la protection des intérêts britanniques sur ce continent et la conservation de ce port comme centre de communications avec la mère patrie. Il serait facile de prouver la justesse de ces prévisions, mais il s'agit pour le moment de considérer la situation présente.
Vous trouverez ci-inclus le plan d'une citadelle qui à mon sens, répondrait aux besoins actuels et futurs de la Grande-Bretagne.
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avec le montant approximatif qu'il faudra dépenser pour l'exécution des travaux.
Je suis avec le plus profond respect et la plus grande estime, de
Votre Seigneurie, le très humble et très obéissant serviteur.
Guy CARLETON.
....
JCPomerleau :
Pour dire l'importance de cette missive. Si Guy Carleton n'avait pas convaincu l'État anglais de son intérêt de consentir à l'Acte de Québec de 1774. Les Habitants auraient ralliés la révolution américaine et le Canada d'existerait pas. Et les États Unis s'étendraient du Rio Grande jusqu'au Père Noël !