Alors que le débat fait rage aux États-Unis au sujet des monuments sudistes, la Fédération des enseignants de l'élémentaire de l'Ontario (FEEO) presse les conseils scolaires de rebaptiser les écoles portant le nom de l'un des Pères de la Confédération canadienne : John A. Macdonald.
Une résolution en ce sens a été adoptée récemment par une majorité de délégués à une réunion de la FEEO.
Felipe Pareja, un enseignant de français de la région de Peel, dans la banlieue de Toronto, est à l’origine de cette motion. Pour lui, même si Macdonald a uni l’est et l’ouest du pays grâce au chemin de fer, il ne faut pas oublier que le premier premier ministre canadien a contribué au « génocide des peuples autochtones ».
On ne parle pas de ça dans les cours d’histoire lorsqu’il est question de la fondation du Canada et des Pères de la Confédération.
David Mastin, président de la FEEO dans la région de Durham, est d'accord. « Quand on nomme une école à la mémoire de quelqu'un, c'est un honneur qu'on leur fait, dit-il. Or, il n'y a pas d'astérisque à côté du nom Sir John A. Macdonald qui dit : "Ah oui, il a aussi fait ça et ça" », dit-il.
Macdonald était premier ministre au moment où les pensionnats pour Autochtones ont été créés. La Commission de vérité et réconciliation du Canada a utilisé l'expression « génocide culturel » pour décrire ce programme destiné avant tout à assimiler les enfants autochtones, dans son rapport déposé en 2015.
Uniquement dans la région de Toronto, une demi-douzaine d'écoles portent le nom de ce Père de la Confédération.
De son côté, la militante autochtone Tori Cress, du mouvement Idle No More, se réjouit de voir des enseignants prôner « l'inclusion ».
On peut être fiers d'être Canadiens sans honorer des gens qui ont détruit d'autres races.
« Il y a une place pour ces gens, peut-être pas immortalisés dans des monuments ou des statues et des noms d'écoles, mais dans les livres d'histoire, les musées », ajoute Mme Cress.
Des critiques
La première ministre de l'Ontario, Kathleen Wynne, ne croit pas qu'il faille rebaptiser les écoles qui portent le nom de John A. Macdonald. « Bien que je ne doute pas que la Fédération des enseignants de l'élémentaire de l'Ontario ait de bonnes raisons, je pense qu'elle se trompe », écrit-elle dans une déclaration.
Il est une partie importante de notre histoire et, bien que les décisions concernant le nom des écoles appartiennent aux conseils scolaires, je ne crois pas que son nom devrait être retiré des écoles de l'Ontario.
La première ministre ajoute qu'il faut comprendre toute l'histoire du pays, le bon comme le mauvais, et l'enseigner aux enfants « afin que nous puissions aller de l'avant dans un monde de respect mutuel et de compréhension avec les peuples autochtones ».
L'ancien ministre des Affaires étrangères et ex-député conservateur John Baird dénonce l'idée de renommer les écoles John A. Macdonald. « C'est l'une des choses les plus folles et ridicules que j'ai entendues [dans ma vie] », dit-il.
C'est de la rectitude politique sur stéroïdes.
M. Baird avait appuyé l'idée de renommer la promenade de l'Outaouais à la mémoire de John A. Macdonald. L'ex-député s'est aussi opposé à la décision du premier ministre Justin Trudeau de rebaptiser l'édifice gouvernemental Langevin, à Ottawa. M. Trudeau avait défendu sa décision en affirmant qu'Hector-Louis Langevin était un ardent partisan des pensionnats autochtones.
Le professeur d'histoire Pierre Anctil de l'Université d'Ottawa affirme, lui, au sujet des écoles portant le nom de John A. Macdonald, qu'il ne faut pas sombrer dans le « révisionnisme ».
On ne peut pas réparer ce qui s'est passé historiquement en éliminant l'histoire.
Que feront les écoles?
Dans un courriel, le conseil scolaire public anglais de Toronto (TDSB) explique que la question ne lui a pas été présentée. « Lorsque nous nommons ou renommons des écoles, ça demande une importante consultation avec la communauté scolaire », dit le TDSB.
De son côté, le conseil public anglais Limestone (LDSB), qui a une école nommée John A. Macdonald à Kingston, admet que le politicien a été « un personnage historique controversé ».
Mais, avant tout changement de nom, le conseil dit lui aussi devoir d'abord « consulter l'organisation provinciale des conseillers scolaires et les chefs autochtones », précise la présidente du LDSB Paula Murray.
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