Guillaume Bourgault-Côté - Les politiciens l'évitent soigneusement, mais le dossier constitutionnel n'est pas mort aux yeux des Québécois. Au contraire. Trente ans après le rapatriement de la Constitution, ils sont ainsi une large majorité — plus de 70 % — qui souhaitent que le gouvernement du Québec prenne l'initiative de soumettre à Ottawa un projet permettant à la province de signer la Loi constitutionnelle.
L'appétit est à peine moins aiguisé dans le Rest of Canada (ROC), où 50 % de la population estime elle aussi que le Québec devrait entreprendre des discussions pour régler l'épineux dossier.
C'est là l'étonnante constatation d'un sondage réalisé par Léger Marketing pour l'Association internationale des études québécoises, qui organisera du 12 au 14 avril un colloque sur les 30 ans du rapatriement. Pour les organisateurs, dont l'ancien ministre Benoît Pelletier, le résultat est «surprenant»... et réjouissant.
«C'est clair qu'il y a un intérêt au Québec» pour un débat constitutionnel, indiquait hier en conférence de presse M. Pelletier, professeur de droit à l'Université d'Ottawa et ministre libéral des Affaires intergouvernementales entre 2003 et 2008. «Il y a une attente, au Québec et au Canada, pour une initiative [de discussion] qui serait prise par Québec. C'est donc à l'Assemblée nationale de faire les premiers pas.»
Cela dit, ce n'est pas dans un avenir proche que l'on assistera à un nouveau cycle du type Meech ou Charlottetown, a reconnu par la même occasion M. Pelletier — qui rejoint en ce sens les conclusions d'une récente conférence tenue à Toronto sur la «question du Québec». «Tout leader politique va devoir mesurer — et mesure sans aucun doute — les conséquences désastreuses qu'entraînerait un échec de la reprise des pourparlers constitutionnels, a-t-il dit. C'est ce qui explique la tiédeur de certains politiciens par rapport à cette question.»
Mené auprès de 2039 Canadiens — dont un millier de Québécois —, le sondage révèle qu'un échec de futures négociations favoriserait directement le mouvement souverainiste: 44 % des répondants québécois estiment que le Québec devrait alors se retirer de la fédération (39 % pensent qu'il faudrait rester).
Mais M. Pelletier juge que la prudence des politiciens — et leur apparente réticence à aborder le dossier — ne rend pas le débat théorique pour autant. «Si on n'en parle pas, on alimente le caractère tabou du sujet. Or, il faut le démystifier, le rendre populaire.»
Clivage
Ailleurs, le sondage dévoilé hier démontre un consensus relatif sur le fait que le refus du Québec de reconnaître la Loi constitutionnelle (adoptée à Londres le 29 mars 1982 et entrée en vigueur au Canada le 17 avril suivant) a eu des conséquences importantes (47 % des Québécois le pensent, et 42 % des gens du ROC). Mais là où 54 % des Québécois estiment que le fédéral a erré en agissant sans le consentement du Québec, 51 % des Canadiens du ROC pensent précisément le contraire.
De même, 69 % des Québécois jugent que le Canada devrait «donner plus de pouvoir au gouvernement et à l'Assemblée nationale du Québec», idée rejetée par les Canadiens hors Québec (79 % d'opposition).
Le sondage a été effectué du 5 au 12 mars auprès de 2039 personnes. La marge d'erreur d'un échantillon probabiliste de cette taille serait de 2,2 %.
Dossier constitutionnel
Les Québécois veulent que Québec agisse
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