« Il ne suffit pas d’avoir des vertus, il faut en avoir l’économie » - La Rochefoucauld
Certes, une foule d’arguments sont disponibles pour défendre notre cause en tant que peuple et nation maintenant dotée des assises de son propre État. Par-dessus tout le reste, il faut savoir en faire la démonstration.
En géopolitique et en stratégie d’État, l’argument statutaire a pour objet de convaincre l’adversaire et nous convaincre nous-même que nous existons bel et bien comme Nation, société territoriale qui a conquis son territoire par osmose, c’est-à-dire par investissement et par un travail continu échelonné sur plusieurs siècles, pour en améliorer la base territoriale.
Peuple reconnu, Nation et État sont des statuts collectifs. Une province n’est pas un statut et ne peut le devenir tant et aussi longtemps que ses habitants n’ont pas fait la preuve d’investissements continus et de grande envergure dans le territoire. Le statut est complètement dans l’investissement mais il arrive également qu’une conquête militaire d’un territoire donné devienne statutaire lorsqu’il n’y a personne pour en réclamer la possession comme son fief.
Inversement, un territoire abandonné se perd et les premiers habitants ne peuvent plus le réclamer lorsque quelqu’un d’autre l’a pris et mis en valeur.
Tel est par exemple le cas de la Scandinavie, d’abord habitée par les Germains, les Goths et les Ostrogoths, qui faisaient affaire avec les Romains, et ont été attirés par les espaces plus confortables de l’Europe centrale et du Sud. Sous domination romaine, ces peuples ont quitté leurs territoires pour venir s’installer en masse dans ce qui est devenu l’Allemagne, aussi dans une partie de la France, notamment en Bourgogne(Burgondes) et dans le Sud-Ouest (Wisigoths).
Entre temps, des peuples Asiatiques blancs sont venus s’installer dans les espaces occupés antérieurement par les Germains et comprenant : Scots, fondateurs de l’Écosse et de l’Irlande; Vikings, fondateurs du Danemark, de la Norvège, de l’Islande, de la Normandie et du Yorkshire en Angleterre; Svers, fondateurs de la Suède et Suomen, fondateurs de la Finlande. Tous ces peuples ont développé et mis ces espaces en valeur jusqu’à en devenir possédants de fait (de facto) et de droit (de jure). Ils se sont solidement identifiés avec les territoires qu’ils ont pris et mis en valeur et personne ne peut leur en constester la possession.
Un statut est complètement dans l’investissement, et il ne faut pas craindre de le faire valoir chaque fois que nécessaire. Le Canada, qui est un continent, vit maintenant aux premiers siècles d’une histoire que d’autres ont vécu longtemps auparavant. Certes, le continent canadien a été visité et occupé pour la pêche, la chasse et la cueillette, mais les hivers trop rudes ont décimé ou chassé ces premiers occupants, qui ont été remplacés par d’autres qui n’occupaient que de petites surfaces jusqu’à ce que les moustiques de l’été et le froid glacial et prolongé de l’hiver ne les chassent à leur tour.
Il est clair maintenant que les premiers colons venus de France, les plus nombreux de Normandie, suivis des Bretons et les autres, ont failli y passer. Mais ils ont tenu bon et un siècle après la fondation de Québec, la colonie offrait de bonnes perspectives non seulement de subsister mais de vivre et progresser, quoique beaucoup plus lentement que les colonies établies au sud du 45e degré de latitude nord. Avec le Traité de Paris du 10 février 1763, la colonie, qui traversait une rude épreuve, a néanmoins survécu et continué de progresser envers et contre la volonté des nouveaux maîtres, aux prises avec les Yankees de Nouvelle Angleterre.
Alors que les Anglais épuisaient leurs forces à guerroyer non seulement les Yankees mais partout dans le monde, nous avons tranquillement poursuivi notre investissement du territoire qui est finalement devenu notre pays et notre fief. Notre action dans la prise de possession pacifique de notre territoire a fait de nous une nation, dotée des assises de son propre État.
Toute cette conquête s’est accomplie envers et contre la volonté britannique. Voilà ce que nous devons expliquer aux étrangers qui nous questionnent.
Nous ne voulons pas « détruire le Canada », qui est un véritable continent mais nous voulons le statut reconnu de nation et d’État.
Si les Québécois restent canadiens, ce sera de la même manière que Suédois, Norvégiens, Danois, Finlandais et Islandais sont restés scandinaves après l’effritement et la dissolution de l’Union Kalmar. Cette Union avait signifié pour les Scandinaves l’inféodation au pouvoir danois, alors dominé à son tour par des princes germaniques. C’était en 1397. La Suède a été la première à s’en libérer au prix d’une guerre en 1523. La Norvège a suivi en 1905 et la Finlande en 1920, dans des conditions particulières. La Scandinavie existe toujours mais pas comme l’ont voulu les princes Danois.
À nous de savoir nous expliquer et nous défendre lorsque on nous demande des comptes.
JRMS
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8 commentaires
Archives de Vigile Répondre
24 mars 2015Ça, ce sont des échanges comme je les aime, enrichissants, instructifs, en fait, la vraie vocation de Vigile. Merci à M. Sauvé et à tous ceux qui enrichissent les questions et le débat. Le plus navrant est ce parti politique, celui qui avait comme mandat de nous amener vers l'indépendance et qui ne trouve rien de mieux à faire que de la petite chicane interne, de la projection de m...boue au visage des autres et, pendant ce temps, des malfaiteurs médicaux élus dilapident le Québec en s'engraissant scandaleusement. Personne au PQ, supposément le parti d'opposition, ne leur offrira la moindre résistance. Au contraire, ils ne cessent de faire des cadeaux au PLQ. Qui, au départ, a sali PKP? Des libéraux?... des fédéralistes? Non, Jean-François Lisée, un bon péquiste. Encore un égo monstrueux. Il a fui la zone de guerre mais le mal est fait. Il a eu des émules dont nous subissons toujours les vomissements contre PKP. Misère! Dire que des patriotes sont morts pour défendre la nation et que des insignifiants(es) dotés de gros égos, sont en voie de tout détruire pour avoir l'impression de devenir chef. Très démotivant!
Mms. Sauvé, Nantel et quelques autres, s'efforcent de nous démontrer la pertinence, la faisabilité d'édifier sérieusement notre nation pendant que certains, sous fausse bannière, font ce qu'ils peuvent pour la détruire davantage. Devant tout ça, devrions-nous avoir honte d'être Québécois? À quand notre accession au statut d'adultes? Nous sommes devenus la risée de nos adversaires!
Claude G. Thompson Répondre
27 février 2015Magnifique plaidoyer en faveur du pays M. Sauvé.
Ces réalités historiques que la géopolitique nous révèle devraient être enseignées dès la petite école. C'est ainsi qu'on inculque le sens du respect et de l'amour de la nation qui nous voit naître, grandir et devenir des citoyens éclairés et fiers.
Ce travail de pédagogie de l'indépendance devra faire partie des engagements d'un prochain chef du parti québécois et de son équipe d'élus. Sans parler des instances du parti et de tous ceux qui comme vous, ont à coeur la naissance de ce magnifique territoire qu'est le nôtre en tant que pays libre et indépendant.
À cet égard, je voudrais souligner le travail remarquable effectué par M.Jean-Jacques Nantel et que nous avons pu lire ici-même sur Vigile. Ce qu'il nous communique dans ses capsules est en parfait accord avec ce que vous professez avec sagesse et convictions dans vos écrits.
Claude G. Thompson
Jean-Claude Pomerleau Répondre
27 février 2015Publié en 1980, The Question of Separatism :
Quebec and the Struggle over Sovereignty de Jane
Jacobs est probablement un des meilleurs plaidoyers
jamais écrit en faveur de la souveraineté du Québec.
Le cas de la Norvège résumé par l'auteur, illustre parfaitement bien l'argumentaire de M Sauvé : la souveraineté (statut) est une sommes et non un souhait.
(Livre traduit en français)
CHAPITRE 3
LA SÉCESSION DE LA NORVÈGE
http://www.vigile.net/La-question-du-separatisme-Le
Ce chapitre du livre est à étudié attentivement pour en finir avec les référendistes datistes
JCPomerleau
Archives de Vigile Répondre
30 décembre 2013Monsieur Bélisle,
Tous les peuples d'Europe ne sont pas de descendance
Indo-européenne.
Les Picts d'Écosse sont antérieurs aux Celtes, ces
derniers connus en Grande Bretagne comme "Britons".
De même les Scots, antérieurs aux Celtes et aux Saxons.
En Hongrie,les Magyars sont aussi des Asiatiques Blancs
qui ne sont pas apparentés aux peuples celtiques.
Les Magyars sont apparentés aux Estoniens, dont la langue
comporte des rapprochements avec le suomen, langue
des Finlandais.
Au cours de leurs mouvements migratoires en provenance
d'Asie centrale, ces populations ont entre autres refoulé
les Russes vers le Sud, qui ont fini par se concentrer
à proximité de la Mer Noire.
Plus tard, les Tatares Mongols venus aussi des immenses
plaines d'Asie centrale ont fini par être battus par les
Russes d'Ivan 1V, le moscovite dit le terrible, qui s'est
imposé comme maître de toutes les Russies. C'était la
bataille de Kazan en 1537, si ma mémoire est bonne.
Ces grandes plaines ont été fréquentées par des peuples
qui n'étaient pas d'orgine indo-européenne.
L'origine des peuples de l'Europe du Nord est davantage
reliée à l'Asie centrale qu'aux mers du Sud. Je suis
récemment allé en Finlande faire quelques vérifications
sur place et j'ai vu à 60 degrés nord et au delà une
forêt qu'one ne trouve pas chez nous à 50 nord. La
vie est donc possible à de telles latitudes en Europe,
par des populations dont les mouvements migratoires ont
suivi les troupeaux de rennes
et de petits chevaux très résistants.
JRMS
Archives de Vigile Répondre
29 décembre 2013Je retiens deux points de votre texte:
les Québécois de souche doivent, sans gêne aucune, ressentir la pleine valeur de l’héritage de colonisation qu’ils ont le devoir de continuer en ce début du 3e millénaire de notre ère.
Votre texte nous le rappelle, je cite: « Il est clair maintenant que les premiers colons venus de France, les plus nombreux de Normandie, suivis des Bretons et les autres, ont failli y passer. Mais ils ont tenu bon et un siècle après la fondation de Québec, la colonie offrait de bonnes perspectives non seulement de subsister mais de vivre et progresser,... »
Alexandre Delorimier, dans son texte lumineux de septembre 2013 intitulé «Le Québec à la croisée des chemins » ayant comme sous-titre, Essai sur la Charte des valeurs québécoises, écrit, je cite:
« Pour la majorité des Québécois (les « de souche »), nos ancêtres sont arrivés en Nouvelle-France il y a près de quatre siècles. Et à cette époque, le Québec n'existait pas : ils l'ont construit. C'est à la sueur de leur front, sur une contrée extrêmement rude, que ceux-ci ont forgé, bâti, harnaché, labouré, défriché et façonné ce Québec dont aujourd'hui plusieurs tirent avantages, entre autres, et non le moindre : la Paix. Et ce Québec qu'ils ont fait émerger des forêts autrefois impénétrables d'Amérique du Nord : nous en sommes légataires et protecteurs. »
Ma fierté est un héritage de tous les premiers colons et de leurs descendants. Tous les immigrés qui ont fui leur pays de naissance sont venus se greffés aux premiers troncs de colons qui eux-mêmes se sont greffés aux autochtones alors présents sur les rives du Saint-Laurent.
annexe à l’expression «québécois de souche»: cette expression inclut tous les immigrants qui ont de bon gré accepté de se greffer aux plants mères présents au moment de leur immigration.
b) le 2e point que je retiens concerne le ressac sur le Canada-anglais du projet de Charte de la laïcité du Québec (mon choix de titre). Vous écrivez, je cite: « Nous ne voulons pas « détruire le Canada », qui est un véritable continent mais nous voulons le statut reconnu de nation et d’État. »
À chaque fois que le Québec parle de sécession du Canada, on entend le refrain de « détruire le Canada ». Ce refrain est bizarre pour ne pas dire faux. Ceux qui veulent faire sécession ne le font pas pour détruire mais pour construire une société en gestation depuis plus de 400 ans, soit le pays du Québec.
Les canadiens-anglais, ceux qui sont spectateurs du débat entre Québécois, sont comme jaloux de quelque chose qui leur échappe.
concluons: la démarche identitaire faite par les Québécois devrait inciter, inspirer les intellectuels éclairés du Canada-anglais de saisir leurs concitoyens et de les avertir que «quelque chose est pourri au royaume du Canada» et non au royaume du Danemark... ou du Québec.
J'ajoute: "Sweep your front door and the world will be cleaner ! "
Archives de Vigile Répondre
27 décembre 2013Comment dire M. Sauvé, vous qui étudiez les constantes, à travers tous les peuples, toutes les époques, quelques choses demeurent; seul le peuple est souverain, seul le peuple créer la richesse, seul le peuple est patriote, toutes les élites, à défaut de faire quelque chose d'utile, ne savoir, sans réels contre-pouvoirs, que trahir et corrompre.
Cordialement vôtre
Archives de Vigile Répondre
26 décembre 2013M. Sauvé,
C'est la première fois que j'entends l'expression "Asiatiques blancs".
Les peuples que vous associez à cela (vikings, scots) me semblent être des peuples indo-européens.
Il est vrai que les Celtes ont déjà peuplé une bonne partie de l'Europe jusqu'en Asie mineure. Mais ces peuples étaient bien des Indo-Européens.
Les Gaulois, ancêtres des Français et des Québécois, étaient justement des Celtes, d'origine indo-européenne.
Serge Jean Répondre
25 décembre 2013Alors on devra expliquer aux onze nations indiennes du Québec que c'est avec eux que nous désirons poursuivre;quant aux autres nous n'avons aucune explications à leur fournir.
Serge Jean