Il a pris le champ

JJC - chronique d'une chute annoncée


Quand vous avez les deux mains sur le volant, la moindre des choses, c'est de garder les yeux sur la route. Autrement, au premier virage venu, vous risquez de prendre le champ. Tout le monde sait ça. Sauf Jean Charest, qui donne l'impression d'avoir pris le volant sans avoir les connaissances requises pour le faire et de mettre ainsi pas mal de gens en danger en conduisant n'importe comment. Attachez vos ceintures, car s'il nous reste trois ans de ce «barouettage» insensé, je ne sais pas si nous allons en sortir vivants.
Non seulement rien ne s'arrange, mais tout va de mal en pis. Il est devenu tellement évident que Jean Charest ne sait pas où il s'en va que ses plus sûrs alliés, les journalistes de La Presse eux-mêmes, en sont rendus à souligner ses lacunes et ils l'écrivent dans leur journal. Ce qui signifie que le cher homme est devenu indéfendable et que ses partisans lui tournent le dos.
En Chambre, monsieur Charest boude. Il refuse de se lever pour répondre aux questions de la chef de l'opposition officielle. Non pas que les questions ne soient pas pertinentes, au contraire. Mais il les trouve sûrement déplaisantes et il préfère faire le mort et s'enfermer encore un peu plus dans l'indifférence et le silence. Il croit ainsi s'élever au-dessus des soupçons que l'opposition nourrit à son égard, feignant d'ignorer qu'un homme assis est plus vulnérable qu'un homme debout.
Il paraît évident qu'on ne peut pas être premier ministre du Québec en dilettante. Il faut travailler. Il faut avoir des idées, pouvoir les expliquer clairement et il faut avoir une bonne connaissance de l'état des routes qui vont nous mener à l'objectif qu'on s'est fixé. Il faut avoir bien cerné les obstacles qu'on va rencontrer durant le voyage et se préparer à y faire face. Il est bon de savoir aussi qu'on ne peut pas faire monter tous les petits «zamis» le long de la route pour ne pas risquer de se retrouver surchargé au cours du voyage.
Jean Charest avait l'ambition de devenir premier ministre du Canada. Il était encore tout jeune quand il a choisi son parti, le Parti conservateur du Canada. Les choses n'ont pas fonctionné comme il le souhaitait. La période référendaire de 1995 lui a permis de faire enfin connaissance avec le Québec, qu'il connaissait probablement assez mal. Il a vu là l'occasion de faire une vraie percée et il est venu faire des discours enflammés en affirmant que si le Québec votait oui au référendum, nous allions tous nous retrouver dans un grand trou noir. Ça faisait peur, c'est sûr, et ce fut un grand moment de gloire pour lui.
Il y avait une sorte de prophétie dans ses discours référendaires. Le trou noir ayant été évité par la victoire du non au référendum, nous n'avions jamais imaginé qu'il viendrait le creuser lui-même par la suite comme premier ministre du Québec. Nous y sommes.
Le trou noir est immense. S'il vous arrive d'avoir l'impression que tout est à refaire au Québec, vous n'avez pas tort. On n'en est plus à sauver les meubles, il faut rebâtir tout l'édifice. La liste de ce qui marche ici en ce moment serait bien moins longue à faire que la liste de ce qui ne marche pas. Le problème, ce n'est pas tant que nous manquons de courage, le problème, c'est de savoir par où commencer. Je crois vraiment que l'époque de la tête dans le sable est terminée. L'heure du grand ménage est venue.
Il n'est pas impossible que les abus qui ont commencé à être exposés au cours des derniers mois nous ramènent à la réalité et nous confirment que quand nous ne nous occupons pas de nos affaires, quelqu'un d'autre s'en charge et y trouve son propre profit. Peut-être cesserons-nous de dire que nous ne voulons pas d'élections, que la politique ne nous intéresse pas et qu'ils peuvent bien faire ce qu'ils veulent... si ça ne dérange pas notre petite vie. Notre indifférence est la porte ouverte à tous les abus.
Que va devenir Jean Charest? Si une élection avait lieu aujourd'hui, il ne serait pas réélu. Peut-il faire tourner la situation en sa faveur? Votre réponse est aussi bonne que la mienne. Il est probable que son plan de carrière le ramenait à Ottawa, mais ces derniers temps, il a semblé découvrir que la Terre est ronde et que pour tourner en rond (puisque même les mains sur le volant, c'est ce qu'il fait), la Terre, ça lui ferait un beau grand terrain de jeu. C'est ce que je nous souhaite à nous, les Québécois. On devrait se cotiser pour lui offrir le voyage.


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