L'autonomiste

Québec 2007 - ADQ

Où donc loge Mario Dumont sur la question nationale? Si demain devait avoir lieu un nouveau référendum sur la souveraineté, serait-il à nouveau dans le camp du oui comme en 1995? Est-il, comme le prétend Jean Charest, un crypto-séparatiste qui se cache derrière des positions autonomistes?
Ces questions étaient posées il y a quelques jours par le premier ministre qui fait maintenant de l'Action démocratique sa cible principale. La voyant gruger de plus en plus le vote libéral, il craint l'attrait qu'exerce auprès de ses électeurs nationalistes la plate-forme autonomiste adéquiste. À la clef, plusieurs circonscriptions pourraient lui échapper, ce qui explique sa tentative de diaboliser son adversaire.
Le comportement passé de Mario Dumont ne permet cependant pas de présumer qu'il appuierait à nouveau la souveraineté lors d'un prochain référendum. Loin de là. Au référendum de 1995, il n'était entré sous le parapluie du oui qu'à certaines conditions, notamment la négociation de bonne foi avec le Canada d'une entente de partenariat. Il ne donnait pas un appui à la souveraineté «pure et dure». Le cas échéant, on peut croire qu'il aurait plutôt de très fortes hésitations à rejoindre une autre fois le camp du oui, compte tenu du programme actuel du Parti québécois.
Le Mario Dumont de 2007, il faut le souligner, n'est pas le Mario Dumont de 1995. L'Action démocratique, lorsqu'elle participa pour la première fois en 1994 à une élection, défendait le rapatriement de toute une série de pouvoirs donnant un véritable statut particulier au Québec. Sa position s'inspirait des recommandations d'un comité institué par le premier ministre Robert Bourassa pour définir une nouvelle politique constitutionnelle libérale à la suite de l'échec de l'Accord du lac Meech. Devant le rejet du rapport de ce comité, plusieurs libéraux, dont Mario Dumont alors président de l'aile jeunesse, avaient quitté le Parti libéral pour créer l'Action démocratique.
Depuis, Mario Dumont a changé. Il a connu plusieurs défaites. S'il revendique toujours plus d'autonomie pour le Québec, il a toutefois baissé d'un cran le niveau de ses exigences. Le chapitre du programme portant sur l'autonomie se résume à seulement cinq grands points: réouverture du dialogue constitutionnel, adoption d'une constitution québécoise qui désignerait le Québec comme «État autonome», défense des champs de compétence provinciale, rétablissement de l'équilibre fiscal entre les ordres de gouvernement, instauration d'une seule déclaration de revenus.
Ce n'est «ni la rupture ni la soumission au Canada de 1982», a déjà dit Mario Dumont pour qualifier sa position qui le place à mi-chemin entre fédéralistes et souverainistes. Dans la mesure où il croit au maintien du lien fédéral -- «s'affirmer sans se séparer» est le titre du chapitre du programme sur l'autonomie --, on peut le classer parmi les fédéralistes, ce qui n'en fait pas pour autant un allié de Jean Charest. Tout au contraire, il n'y a pas d'adversaires plus acharnés.
L'opposition de ces deux hommes s'explique. Tous deux font campagne en prétendant pouvoir défendre mieux que l'autre la place du Québec au sein de la fédération canadienne. Or, à côté de la plate-forme autonomiste vigoureuse de Mario Dumont, celle du Parti libéral ne peut que paraître faible, tant les engagements qu'elle contient sont minimalistes. Outre le redressement de l'équilibre fiscal, on réclame seulement d'être associé à la nomination des juges à la Cour suprême et à négocier une entente relative à la culture et aux communications pour préciser les rôles respectifs d'Ottawa et de Québec. Lorsqu'on lui demande si le Québec réintégrera la Constitution canadienne au cours du prochain mandat, Jean Charest répond invariablement que le fruit n'est pas mûr. Mario Dumont offre au contraire de cet attentisme un volontarisme qui plaît à bien des Québécois. Le premier ministre a raison de s'inquiéter.
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bdescoteaux@ledevoir.ca


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