Dans trois ou quatre ans, le Québec, pour son niveau de vie, sera en neuvième position au Canada, juste devant l'Île-du-Prince-Édouard. Le Québec ne sera donc pas au dernier rang, mais plutôt à l'avant-dernier. Mince consolation.
Si je reviens avec ces thèmes, ce n'est pas pour le plaisir de ressasser des chiffres, ni pour gratter le bobo. Mais parce qu'il faut voir ce genre de données comme des voyants lumineux et qu'il faut tenir compte du message qu'elles nous envoient, le fait qu'il se passe quelque chose et qu'il faut se ressaisir.
La plupart des comparaisons de niveau de vie se font avec le produit intérieur brut par habitant. Cet indicateur comporte cependant des défauts et certains économistes estiment que, pour mieux évaluer le bien être des Québécois, il est préférable d'utiliser une autre statistique, le revenu personnel disponible, qui tient compte de l'ensemble des revenus touchés par les particuliers après impôts. Cette mesure est plus proche du portefeuille. En outre, elle avantage historiquement le Québec, ce qu'apprécient ceux qui tentent de démontrer que tout va très bien dans la Belle province. Jusqu'en 2005, le Québec se classait en effet au quatrième rang pour son revenu personnel disponible.
Mais ce n'est plus le cas. C'est ce que j'ai découvert à la lecture d'une chronique récente de mon collègue Claude Picher. Les plus récentes comparaisons interprovinciales de l'Institut de la statistique du Québec montrent, qu'avec les données préliminaires de 2008, le Québec se retrouve maintenant au septième rang canadien.
En plus des trois provinces riches qui nous devancent traditionnellement, l'Alberta, l'Ontario et la Colombie-Britannique, on assiste à l'émergence de nouveaux riches, des provinces dont les revenus sont gonflés par le boom pétrolier et l'augmentation du prix des ressources, la Saskatchewan et le Manitoba, maintenant quatrième et cinquième.
Il y a d'autres phénomènes en jeu. On le voit au progrès d'une autre province, la Nouvelle-Écosse, dont le revenu personnel disponible, à 25 311$, devance maintenant légèrement celui du Québec, qui est à 25 009$. Il est vrai que cette province dispose, elle aussi, de revenus provenant des hydrocarbures. Mais ces résultats tiennent aussi aux progrès constants de l'économie de cette province, plus diversifiée que l'on croit. C'est ce succès néo-écossais qui nous place au septième rang.
Ce n'est cependant pas fini. Le Nouveau-Brunswick fait lui aussi des pas de géants. Il n'est pas loin derrière le Québec, avec un revenu de 24 493$. Un écart de 2,1%. Et si cette province maintient sa performance des cinq dernières années, elle aura rejoint et rattrapé le Québec dans trois ou quatre ans. Cela nous ramènera au huitième rang.
Mais il y a aussi Terre-Neuve, notre nouveau géant pétrolier. Déjà, cette province est au deuxième rang canadien, devant l'Ontario, pour son PIB per capita dopé aux stéroïdes pétroliers. Le PIB per capita terre-neuvien atteint maintenant 50 348$, devant celui de l'Ontario, à 47 431$, et loin devant celui du Québec, à 40 437$. Cette richesse ne se rend pas encore jusqu'aux citoyens. Mais ça s'en vient à grand pas. Il ne faudra pas beaucoup de temps pour que Terre-Neuve nous double. Cela nous reléguera au neuvième rang, où nous ne serons pas menacés par l'Île-du-Prince-Édouard.
On peut trouver une consolation dans le fait qu'une autre province a du mal à maintenir le cap, l'Ontario, plus malmenée que le Québec. Elle reste au deuxième rang, mais l'écart qui nous sépare de l'Ontario s'est réduit: de 13,6% en l'an 2000, il n'est plus que de 11,4%. L'Ontario reste cependant une province riche. Même si, comme le prédisait cette semaine la Banque TD, sa capacité fiscale deviendra inférieure à la moyenne canadienne en 2010, ce qui en ferait une récipiendaire de la péréquation.
Mais ce qui est intéressant, c'est de voir la vivacité avec laquelle les Ontariens, en commençant par leur premier ministre, ont réagi à cette nouvelle. Ils acceptent moins bien leur rôle de vache à lait de la confédération et n'acceptent pas de perdre leur suprématie.
C'est le même genre de réflexe que devraient développer les Québécois. Il y a des réalités nouvelles contre lesquelles on ne peut pas grand-chose et qui, de toutes façons, ne changent rien à nos vies, comme l'enrichissement soudain d'une province qui profite des prix pétroliers.
Mais dans notre passage en queue de peloton, il y a aussi les indices d'un dynamisme insuffisant, l'illustration que nous n'exploitons pas notre plein potentiel, la démonstration qu'il y a des gens qui font plus d'efforts ailleurs. Et cela devrait nous faire bouger.
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