Le sac de la CAQ

Des renards dans la bergerie

Tribune libre

     Si le premier ministre François Legault a décidé de se montrer sous son vrai jour en virant à droite dans la dernière ligne droite de son mandat, c’est qu’il a acquis la conviction que lui et son parti, la Coalition avenir Québec (CAQ), ne seront pas reportés au pouvoir l’année prochaine. Tous les petits cadeaux qu’il a offerts aux Québécois au cours des sept dernières années, il les leur reprendra d’une manière ou d’une autre. C’est pourquoi il a placé des durs dans des ministères clés. Legault est un businessman qui aurait voulu être un social-démocrate, sans succès.


     Ainsi, une partie des quelque 10 000 postes à temps complet équivalent créés dans la fonction publique depuis 2018 sera supprimée. Il a d’ailleurs déjà commencé les coupes. Cela entraînera inévitablement une réduction des services à la population. Des Québécois se plaindront, mais le chef caquiste s’en fiche d’avance.


     Cela dit, le pire a peut-être déjà été accompli lors du premier mandat de la CAQ, lorsqu’elle a aboli les concours de recrutement dans la fonction publique [1]. Sans concours, les titulaires d’emplois supérieurs [2] et les cadres peuvent promouvoir des fonctionnaires avec lesquels ils partagent des affinités ou qui sont des béni-oui-oui qui ne nuiront pas à leur petite carrière confortable. La fonction publique perd non seulement en qualité, mais ouvre aussi la porte à la corruption.


     Avec les nouvelles règles de la CAQ, une fois embauchés, les titulaires d’emplois supérieurs et les cadres n’ont plus l’obligation de présenter un diplôme pour changer de poste [3]. Vous avez eu l’impression d’entendre des deux de pique qui n’y connaissaient rien à la commission Gallant ? Ce n’est qu’un début.


     Des entreprises qui brassent des millions avec l’État trouvent utile de placer des pions dans les plus hautes sphères de la fonction publique. Sans concours obligatoires, c’est désormais un jeu d’enfant. Je serais curieux de savoir combien de gestionnaires du secteur privé ont rejoint la fonction publique depuis l’arrivée au pouvoir de la CAQ en 2018. Des renards dans la bergerie, dites-vous ? Bien entendu, ces nouveaux mandarins ne jurent que par le recours à la sous-traitance et à la consultation externe, ignorant la mission d’un organisme public.


     Les concours de recrutement sont venus avec la Révolution tranquille. Le nouvel État moderne souhaitait rompre avec le duplessisme, le clientélisme et le copinage qui sévissaient alors. Il a fallu quelque soixante années pour en venir à l’étrange conclusion caquiste qu’ils ne fonctionnaient pas. Permettez mon scepticisme.


     Une fois de retour au pouvoir en 2026, le Parti québécois devra réactiver les concours de recrutement. Certes, le processus est long et chiant, mais il est en même temps rassurant. Détail non négligeable : il permettra aux Québécois de sauver des millions de dollars en malversations de toutes sortes.


     Pour finir, cher lecteur, avouez que la question vous taraude : Loulou et Mado ont-elles réussi, oui ou non, un concours d’entrée dans la fonction publique ?


Sylvio Le Blanc


[1] https://www.quebec.ca/nouvelles/actualites/details/projet-de-loi-no-60-loi-modifiant-la-loi-sur-la-fonction-publique-et-dautres-dispositions-la-fonction-publique-quebecoise-simplifie-sa-facon-de-recruter-du-personnel-30542


[2] https://www.emplois-superieurs.gouv.qc.ca/


[3] https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1864765/nouveau-processus-dotation-fonction-publique-syndicats-conseil-tresor-progression-carriere-quebec-sfpq-inequite



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