Stéphane Amar - Guivat Zeev, Cisjordanie - «La nature vous ouvre ses portes à Guivat Zeev». L'immense panneau publicitaire se dresse au bord de la route qui conduit au nouveau quartier de la colonie juive. Un cadre enchanteur que ces douces collines verdoyantes du nord-ouest de Jérusalem. Pour l'instant, on n'aperçoit qu'une suite interminables de chantiers, mais bientôt 750 logements de bon standing s'offriront aux Israéliens.
«S'ils veulent bien m'en garder un, je viens habiter ici tout de suite. Les appartements seront magnifiques avec une vue superbe», rigole Ahmed, un des nombreux ouvriers palestiniens qui travaillent sur le projet.
En revanche, l'extension de Guivat Zeev n'amuse pas du tout la communauté internationale qui a unanimement dénoncé la décision israélienne de poursuivre la colonisation tout en négociant un accord de paix avec l'Autorité palestinienne. «La sécurité d'Israël dépend du gel de la construction dans les territoires», a par exemple dit Nicolas Sarkozy lors de la visite de Shimon Pérès en France.
Mais ici, dans cette cité dortoir tentaculaire, on se moque bien des condamnations internationales. Situé à moins d'un quart d'heure du centre de Jérusalem grâce à une belle autoroute, Guivat Zeev connaît un succès croissant auprès des Israéliens, effrayés par la flambée des prix de l'immobilier dans la Ville sainte. La colonie compte déjà 10 000 habitants et a viabilisé des centaines d'hectares pour permettre la construction de nouveaux lotissements. La population devrait doubler d'ici 2020. «La construction à connu un ralentissement au début des années 2000, car durant l'Intifada des snipers palestiniens tiraient sur les voitures. Mais aujourd'hui, la route est parfaitement sécurisée et la demande reprend de plus belle», indique le promoteur Mordehaï Baroukh.
La réussite de Guivat Zeev ne doit rien au hasard. Comme d'autres implantations juives à proximité de Jérusalem, la ville réussit à faire oublier qu'elle se trouve en pleine Cisjordanie. En venant de Jérusalem, mis à part un discret barrage militaire, rien ne laisse supposer que l'on a franchi la ligne verte. «De loin on aperçoit des villages arabes mais on n'y passe jamais. Regardez, il y a de la place ici, ces collines sont désertes. On ne dérange personne», estime David, une jeune israélien natif de la colonie.
Cette continuité territoriale avec Israël fait de Guivat Zeev une colonie socialement hétérogène. Au contraire des implantations de Cisjordanie profonde, la population n'y est pas uniquement religieuse. Dans les rues proprettes du centre-ville, la plupart des passantes se promènent en pantalon, cheveux libres. Quant aux villas qui ceinturent la ville, elles n'ont rien à envier à celles des beaux quartiers de Tel-Aviv.
Pas de gel
Ici, personne n'envisage sérieusement l'éventualité d'un démantèlement. «Les gens estiment que Guivat Zeev fait partie intégrante de Jérusalem», résume Ilan Bouzaglo, un retraité croisé devant le supermarché. «Quels que soient les termes d'un futur accord de paix, cette implantation restera sous souveraineté israélienne, assure Igal Palmor, porte-parole du ministère des Affaires étrangères. D'ailleurs lors des précédentes négociations à Camp David en 2000, les Palestiniens avaient laissé entendre qu'ils accepteraient le maintien de toutes nos implantations situées autour de Jérusalem.»
Dans cette logique, selon l'organisation anticolonisation «Paix maintenant», le gouvernement israélien projette la construction de nouvelles implantations pour relier entre elles les colonies proches de Jérusalem. «Le gel des implantations est mort avant même d'avoir commencé», déplore Hagit Ofran, la porte-parole de l'organisation.
Cette indignation paraît bien étrange à Mordehaï Baroukh, le promoteur. «Les routes sont déjà là, l'eau et l'électricité aussi. Et il y aura bientôt une nouvelle bretelle d'autoroute qui mettra ce quartier à 12 minutes de Jérusalem. Vous imaginez si on arrête subitement la construction et que dans quelques siècles des archéologues fouillent la région? Ils ne comprendront rien! Dieu merci, il n'y a aucune guerre, aucun cataclysme. Il n'y a aucune raison de ne pas construire ici.»
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