Les péquistes doivent leur retour au pouvoir pour beaucoup à leur chef. La Pauline Marois dont plusieurs militants, doutant de sa capacité de gagner cette élection, réclamaient la démission a sauvé son parti du pénible retour en arrière que laissait présager la division au sein des rangs souverainistes. Sa persévérance a porté ses fruits.
Le premier ministre Jean Charest a perdu son pari de se voir confier un quatrième mandat, subissant la défaite aux mains du Parti québécois qui formera un gouvernement minoritaire. Une défaite aux allures de victoire morale dans la mesure où le résultat de cette élection s’approche du match nul tant les suffrages exprimés sont partagés presque également.
Cette élection n’était gagnée d’avance pour personne, même si la plupart des observateurs s’attendaient à ce qu’elle soit perdue par le Parti libéral tant son gouvernement avait été impopulaire au cours des dernières années, alors que deux Québécois sur trois étaient insatisfaits de son action. En toute logique, il aurait dû être désavoué, ce qui n’a pas été le cas.
Le Parti libéral a toujours été un grand parti et, le résultat de cette élection le confirme, il le demeure. Il peut compter sur un vote fédéraliste solide. Il est implanté dans tout le Québec et, surtout, il possède une machine électorale toujours aussi bien rodée qui lui a permis d’éviter le pire des scénarios, soit le « remake » de l’élection de 1976 où il avait été chassé ignominieusement du pouvoir.
Relégué au rôle d’opposition officielle, qui lui revient tant par le nombre de sièges que par le nombre de suffrages obtenus, le Parti libéral est en bonne position pour prétendre à nouveau au pouvoir à la prochaine occasion. Il fait toujours partie de l’équation politique québécoise, qui, toutefois, comporte désormais trois partis de force presque égale. Le résultat obtenu par la Coalition avenir Québec (CAQ) quant au nombre de sièges n’est certes pas à la hauteur des attentes de ses militants, mais il ne faudra pas oublier l’appui reçu de 28 % des Québécois. Ce n’est pas la fin de l’histoire pour ce parti qui a été privé d’une représentation équitable à l’Assemblée nationale par notre mode de scrutin.
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Cette élection n’était pas gagnée d’avance. Les électeurs avaient un choix à faire entre trois partis qui ont eu, plus qu’à d’autres élections, la capacité de se faire entendre et de présenter leur programme. Obtenue à l’arraché, la victoire du Parti québécois n’est pas le fruit de la traditionnelle alternance entre deux grands partis. Le bipartisme n’est plus.
Les péquistes doivent leur retour au pouvoir pour beaucoup à leur chef. La Pauline Marois dont plusieurs militants, doutant de sa capacité de gagner cette élection, réclamaient la démission a sauvé son parti du pénible retour en arrière que laissait présager la division au sein des rangs souverainistes. Sa persévérance a porté ses fruits. Cette campagne, elle l’a menée à sa manière, sur les thèmes qu’elle avait choisis. Elle peut prétendre que le résultat de l’élection lui appartient. Cette première place lui donnera l’ascendant qui lui faisait défaut sur son parti.
Cette victoire n’est bien évidemment pas le bout de la route pour Pauline Marois. Les difficultés commencent aujourd’hui. Il lui faudra d’abord obtenir la confiance de la Chambre. Techniquement, libéraux et caquistes pourraient lui ravir le pouvoir à tout moment en formant un gouvernement de coalition, ce qui est aujourd’hui hautement improbable. Elle pourrait devoir recourir rapidement à de nouvelles élections.
La chef péquiste devra apprendre à gouverner dans ce contexte minoritaire. D’instinct et par conviction, elle voudra adopter des politiques progressistes et avancer sur la voie de la souveraineté, comme elle s’y est engagée en campagne électorale. Elle ne le pourra, à moins de vouloir imiter le style de gouvernement minoritaire pratiqué par les conservateurs à Ottawa de 2006 à 2011 et de gouverner à coups de décrets et de coups de force parlementaires en comptant sur la division de l’opposition. Cela, les Québécois ne l’apprécieraient pas plus qu’ils ne l’ont apprécié lorsque le premier ministre Harper l’a fait. Elle devra se replier au centre et mettre de côté plusieurs de ses engagements électoraux. En fait, elle a les mains liées. Même pour rescinder la loi 78, comme elle s’y est engagée en campagne, elle devra convaincre libéraux et caquistes. N’y comptons pas.
Dans un tel contexte, la nouvelle première ministre devra faire preuve de sens politique, apprendre la cohabitation avec ses adversaires. Son meilleur allié sera l’électorat qui ne voudra pas d’une élection précipitée. Cela lui donnera le temps de rallier les Québécois autour de son gouvernement et de ses politiques. Elle devra mettre de côté ses habits de chef de l’opposition pour adopter ceux de première ministre, qui impose d’être « première ministre de tous les Québécois », comme le veut le cliché. En cela, elle peut prendre modèle sur Jean Charest lorsqu’il eut en 2007 à gouverner en situation minoritaire. Après quelques mois de cohabitation paisible, il obtenait ce mandat majoritaire qui lui a échappé hier.
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