GUERRE CULTURELLE

Marion Maréchal à Varsovie : « Le combat culturel et éducatif est un combat de long terme »

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Rebâtir un front conservateur en Occident

Entretien avec Marion Maréchal, figure de la droite conservatrice française, directrice de l’Institut de sciences sociales, économiques et politiques de Lyon : « Le Collegium Intermarium et l’ISSEP ont voulu créer un petit îlot de résistance, un sanctuaire dans lequel on renoue avec le rôle historique de l’université qui est d’abord la recherche de la vérité et la transmission du savoir. »


Marion Maréchal est un ancien député du Front national, le parti dirigé par sa tante Marine Le Pen. Élue à 22 ans en 2012, elle était alors le plus jeune député de l’histoire de la République française. Considérée en France comme une figure importante de la droite conservatrice, elle a créé en 2018 un établissement supérieur à Lyon dans le but de former les élites conservatrices de demain dans un pays où l’enseignement supérieur est très marqué à gauche.


De passage à Varsovie le 1er octobre pour participer à un panel sur l’avenir de l’université dans le cadre d’une conférence organisée sous le titre « La place de la vérité à l’époque de la cancel culture », Marion Maréchal a accepté de répondre en exclusivité aux questions du Visegrád Post. La conférence était organisée par le Collegium Intermarium, une nouvelle université privée fondée avec l’objectif de former les élites conservatrices d’Europe centrale et orientale.


À l’occasion de la venue de la directrice de l’ISSEP en Pologne à l’invitation du Collegium Intermarium, les deux établissements d’enseignement supérieur ont signé un accord de partenariat pour la publication d’opinions d’experts, l’organisation d’événements et des échanges d’étudiants.


L’entretien du Visegrád Post avec Marion Maréchal s’est déroulé le 1er octobre à Varsovie.



De gauche à droite : Jerzy Kwaśniewski, avocat, président d’Ordo Iuris, Christian Machek, philosophe, membre de l’Insitut Renovatio et enseignant au séminaire international Saint-Pierre de Wigratzbad, Gladden Pappin, politologue de l’Université de Dallas, Marion Maréchal, directrice de l’ISSEP, Grégor Puppinck, président du Centre européen pour le droit et la justice (ECLJ), Marion Smith, président de la Common Sense Society – Photo : Olivier Bault


Olivier Bault : Vous dites que l’Institut de sciences sociales, économiques et politiques (ISSEP), que vous avez fondé à Lyon et que vous dirigez, est un pôle de résistance  intellectuelle où se pratique la liberté d’expression. Cela ressemble beaucoup à la revendication du Collegium Intermarium, cette nouvelle université d’Europe centrale créée en Pologne et où vous êtes venue participer à la conférence d’inauguration, pour sa première rentrée universitaire.

Peut-on dire que l’ISSEP et le Collegium Intermarium sont deux îlots de liberté intellectuelle dans des sociétés connaissant une dérive totalitaire ?


Marion Maréchal : Oui, on peut le dire, et l’objectif affiché de nos deux écoles est d’être une réponse et une alternative à un phénomène malheureusement de plus en plus prégnant dans le monde universitaire, que ce soit en Pologne ou en France. Cela se manifeste premièrement par une homogénéité intellectuelle, un conformisme intellectuel plus exactement, et deuxièmement par un sectarisme qui frôle parfois le terrorisme intellectuel. Il est en effet rare qu’une semaine ne passe en France sans qu’il y ait une polémique sur des enseignants menacés, marginalisés, ou mis au ban, ou des conférences perturbées voire annulées, ou encore des syndicats étudiants qui mettent la pression sur des universités pour faire avancer un agenda militant souvent très radical. On voit de nombreux établissements – pas tous, heureusement – se faire les relais zélés d’un certain nombre d’idéologies. Je pense notamment aux idéologies LGBT, néo-féministes, de la cancel culture, du wokisme, et, en France, de l’immigrationnisme. Parfois, comme à Sciences Po et à la Sorbonne, on crée même des programmes dédiés à ces idéologies, notamment sur les gender studies.


Il y a une véritable prise en otage des étudiants qui, la plupart du temps, n’osent même pas manifester une contradiction parce qu’ils pourraient être l’objet au mieux d’une critique et au pire de menaces. Ainsi, par exemple, à l’Université Lumières Lyon 2, un étudiant en études politiques qui avait dénoncé sur les réseaux sociaux le politiquement correct et l’absence totale de contradiction et de différences de points de vue dans ses cours a été insulté et physiquement menacé sans que jamais la direction ne prenne position et ne prenne son parti.


Face à cela, et face à la baisse du niveau – car les deux vont de pair malheureusement –, je pense en effet que le Collegium Intermarium et l’ISSEP ont voulu créer un petit îlot de résistance, un sanctuaire dans lequel on renoue avec le rôle historique de l’université qui est d’abord la recherche de la vérité et la transmission du savoir.


Olivier Bault : En Pologne, le Collegium Intermarium a obtenu un financement privé pour son lancement, il a derrière lui l’Institut pour la Culture du droit Ordo Iuris, qui est une association d’avocats et juristes à sensibilité conservatrice très connue et très active dans ce pays, il a le soutien au moins moral du gouvernement, à défaut pour le moment d’un soutien financier, et il y aura même aujourd’hui à la conférence d’inauguration plusieurs secrétaires d’État, dont l’un est rattaché au ministère de l’Éducation et de l’Enseignement supérieur. En France, en revanche, l’ISSEP semble plutôt ostracisé par les pouvoirs publics et le monde de l’enseignement supérieur…


Marion Maréchal : La première différence notable entre nos deux pays, c’est que les conservateurs ne sont pas au pouvoir en France. J’imagine que le gouvernement polonais regarde avec bienveillance ce type d’initiatives. Ce serait d’autant plus logique que l’actuel ministre de l’Éducation polonais devait au départ, avant d’être appelé à rejoindre le gouvernement Morawiecki, participer à ce projet. J’imagine donc qu’il y a une certaine synergie, ce que je leur souhaite.


Dans notre cas, pour dire les choses simplement ce sont les libéraux-progressistes qui sont au pouvoir. Notre école n’est évidemment pas regardée d’un bon œil par la gauche et par le pouvoir en place. Nous n’avons pas de subventions publiques, mais après quatre ans d’existence notre corps enseignant comprend une cinquantaine d’intervenants dont un nombre significatif enseigne à l’université publique et n’a pas peur d’assumer et revendiquer le fait d’être aussi à l’ISSEP, ce qui montre que les choses bougent un peu. Nos enseignants enseignent uniquement dans une matière, d’où leur nombre, et comme nous formons à la fois aux sciences politiques et au management, il y a aussi parmi eux des chefs d’entreprises, des journalistes, des hauts fonctionnaires, des officiers, des juristes, des avocats, sans parler des contributeurs du Centre d’analyse et de prospective, qui est notre centre de recherche à l’origine de nos publications.


Nos étudiants progressent et nous arrivons petit à petit à une crédibilité académique. Cela a certes été plus compliqué pour nous au départ mais je constate aujourd’hui que nos étudiants arrivent tous à trouver des stages, parfois même dans des grandes entreprises françaises, et tous se sont insérés professionnellement sans difficulté notable. Il y a autour de l’ISSEP tout un écosystème d’associations, d’entreprises, de collectivités, qui sont aussi un soutien et qui sont les réceptacles prioritaires. Avec cette logique de réseau, nous avons très largement compensé les difficultés qu’on pouvait avoir en n’étant pas soutenus par le pouvoir en place, et nous formons aujourd’hui une centaine d’étudiants chaque année dont une trentaine en master et environ soixante-dix en formation continue.


Olivier Bault : Vous avez créé une école en Espagne. Pouvez-vous nous dire quelques mots sur votre projet espagnol ? Pourquoi ce choix de l’Espagne ?


Marion Maréchal : Nous avons en effet ouvert l’année dernière une filiale espagnole qui fonctionne très bien, avec des programmes adaptés à l’Espagne, en espagnol, avec des enseignants espagnols et une équipe espagnole. Nous avons une volonté d’irradier à l’international avec l’ISSEP. Au départ, mon rêve était de prospérer dans « l’alliance latine » et de commencer par nous installer en Italie, en Espagne, peut-être même au Portugal. Il se trouve qu’une équipe espagnole est venue nous voir, une équipe plutôt jeune, entre 30 et 40 ans, une partie ayant travaillé dans le monde politique mais sans être élue, une autre étant des entrepreneurs – un peu comme nous à l’ISSEP, et il nous ont expliqué qu’ils aimeraient reproduire le modèle de l’ISSEP en Espagne. Aujourd’hui, cet établissement espagnol fonctionne de manière autonome mais nous avons une identité de marque commune et une charte pédagogique commune ainsi que des liens sur le plan administratif.


Olivier Bault : Je crois que l’université souffre du même genre de problèmes en Espagne et en France…


Marion Maréchal : Oui, mais l’ISSEP de Madrid a malgré tout réussi tout de suite à avoir de grandes personnalités avec elle, y compris d’anciens ministres qui se sont associés au projet, et même, ce qui a un côté amusant, le président de la fédération de football qui s’est engagé dans le dispositif. On peut dire qu’ils ont tout de suite eu un grand succès parce qu’ils ont rallié de grands noms. C’est révélateur du fait que même si l’Espagne est à gauche, il y a un grand dynamisme dans les milieux conservateurs, qui se serrent les coudes. C’est moins vrai en France.


Olivier Bault : Pensiez-vous, avant d’avoir entendu parler du Collegium Intermarium, que la Pologne aussi avait besoin d’un îlot de résistance intellectuelle dans l’enseignement supérieur ? Cela vous surprend-il ?


Marion Maréchal : Non, cela ne me surprend pas tellement parce qu’on se rend compte que, même dans les pays où les conservateurs sont au pouvoir, l’éducation en général et l’enseignement supérieur en particulier restent malgré tout la chasse gardée de la gauche. Le combat culturel a été pendant longtemps perdu. Chez nous, auparavant c’étaient les trotskistes qui tenaient tout cela, aujourd’hui c’est partout une forme de néo-marxisme puisqu’on a remplacé la lutte des classes par la lutte des races ou la lutte des sexes. On a changé la nature des dominants et des dominés, mais la dialectique, le raisonnement et, à certains égards, les méthodes, restent les mêmes : on ne débat pas, on guillotine.


Face à cette gauche néo-marxiste, chez la jeune génération de conservateurs – l’équipe du Collegium Intermarium est jeune, elle aussi, ce sont des gens âgés de 30 ou 40 ans, comme à l’ISSEP –  on voit cette volonté de travailler ensemble en dépassant nos éventuelles divergences afin d’être dans une logique de connexions, de réseau, de mutualisation des forces et des expériences. C’est très intéressant parce que c’est nouveau et cela prend de l’ampleur. Quand j’avais été au CPAC, cette grand-messe des conservateurs américains, j’avais été frappée par la logique de réseau de ces milieux outre-Atlantique, dans toute leur diversité. Il y a chez eux cette logique de solidarité et cette volonté de chasser en meute comme le fait très souvent la gauche. En France, nous n’avons pas du tout cette culture-là, mais il me semble que c’est moins vrai ailleurs en Europe.


Olivier Bault : Après cette première visite, prévoyez-vous de développer des échanges avec le Collegium Intermarium ?


Marion Maréchal : Bien sûr, c’est le but et j’espère que cela va se faire, comme je l’espère avec le Mathias Corvinus Collegium (MCC), cette grosse école qui propose des formations en Hongrie avec beaucoup d’échanges internationaux. Je les ai vus la semaine dernière lors de mon passage à Budapest pour le 4e Sommet démographique. Le Collegium Intermarium les connaît bien aussi. L’idée est de faire des colloques et des études en commun, avec des publications dans plusieurs langues, et c’est aussi d’échanger des enseignants et, à terme, de réussir aussi à échanger des étudiants sur certaines périodes.


Olivier Bault : Vous avez encore une collaboration avec un établissement supérieur de Saint-Pétersbourg, en Russie, je crois.


Marion Maréchal : Nous avons effectivement signé un partenariat avec l’Université de Saint-Pétersbourg et en particulier avec son département des sciences politiques, même si la pandémie de Covid a tout arrêté pour un temps. Nous avons encore un partenariat avec une grande université privée au Liban, à Kaslik. Il s’agit de l’USEK, l’université Saint-Esprit de Kaslik. Ce type de partenariats est toujours très enrichissant pour les étudiants et aussi pour nous-mêmes. Dans un environnement qui est, de fait, mondialisé, il faut aussi savoir s’ouvrir sur l’extérieur, ce qui est notre objectif.


Olivier Bault : La semaine dernière vous interveniez justement au Sommet démographique de Budapest et vous avez rencontré Viktor Orbán. Qu’avez-vous tiré de votre échange ? Que lui avez-vous dit et que vous a-t-il dit ?


Marion Maréchal : C’était une rencontre très intéressante qui avait été prévue pour durer 30 minutes et qui a duré une heure et demie. Nous avons dans un premier temps parlé de la situation électorale française et de la situation électorale hongroise, puis nous avons discuté de géopolitique. De mon côté je lui ai notamment parlé de la Turquie, de la Russie, de l’Allemagne… J’ai été frappée par l’expérience du personnage – on sent qu’il maîtrise ses sujets – et j’ai été frappée aussi par le pragmatisme hongrois. On n’est pas du tout face à des idéologues qui auraient des postures de principe. Ils sont très pragmatiques dans le cadre des relations internationales, sans être aucunement dupes. Je me suis beaucoup retrouvée dans les propos qui étaient tenus. Viktor Orbán a aussi voulu savoir ce que les Français pensaient de l’Allemagne, et je crois que nous partagions le même avis sur le fait que les Allemands étaient pour nous des alliés mais que nous ne voulions pas de l’Europe allemande, et que la France, en s’enfermant dans le mirage du couple franco-allemand, contribuait à cette Europe allemande, qu’elle ne défendait pas ses intérêts efficacement et que, surtout, elles se privait d’autres alliances pertinentes au sein de l’Union européenne. Des alliances pour défendre une alternative européenne qui serait aussi une Europe de la civilisation. À ce titre, les pays d’Europe centrale devraient être des alliés privilégiés.


Olivier Bault : Dans l’Europe libérale progressiste d’aujourd’hui, « le soleil se lève à l’Est » ?


Marion Maréchal : Je pense qu’il y a malgré tout un peu de résistance partout. Il y a différentes fractures au sein de l’Union européenne. Il y a des fractures économiques, mais il y a aussi des fractures géopolitiques puisque tous n’ont pas la même vision de l’Europe. Certains, comme cela a toujours été le cas de la France, veulent une Europe souveraine et indépendante. D’autres voient l’Europe comme un sous-ensemble transatlantique. Et il y a encore une fracture civilisationnelle. Certains voient l’Europe comme une espèce de hall de gare multiculturel sans frontières et d’autres la voient comme un ensemble civilisationnel à protéger et à développer. Il y a des alliés sur ces trois plans un peu partout en Europe. Sur le plan économique, nous avons, nous Français, les alliés du sud qui sont, comme la France, les premières victimes de l’ouverture totale des frontières économiques, notamment avec les pays en voie de développement et les pays émergents ou des puissances comme la Chine. Nous avons, nous conservateurs, des alliés sur le plan civilisationnel avec des pays d’Europe centrale et orientale, bien évidemment. Nous avons certes moins d’alliés sur la question d’Europe-puissance, mais de ce point de vue-là l’Allemagne fait aussi son bout de chemin après avoir été refroidie sur un certain nombre de sujets, notamment celui du gazoduc Nord Stream 2. Je pense qu’il faut que la France soit capable d’avoir sa propre voix en sachant à la fois défendre ses intérêts et travailler en commun avec tous ceux qui partagent sa vision sur ces différents sujets.


Olivier Bault : Pensez-vous que la Pologne soit appelée à jouer un rôle important face à la montée en Europe occidentale de cette idéologie woke qui nous vient des États-Unis ?


Marion Maréchal : Oui, indéniablement, et je crois que c’est le souhait des Polonais. Je suis très heureuse qu’il y ait des pays qui arrivent à tenir tête à Bruxelles de ce point de vue-là. Bruxelles outrepasse largement les traités. Il n’a jamais été question au départ dans les traités européens que l’UE s’empare des sujets « sociétaux ». Or on voit bien qu’il y a un véritable rouleau compresseur idéologique qui se met en place. C’est une chance qu’un certain nombre de pays tiennent tête à cela et ne se laissent pas intimider et nous devons leur en être reconnaissants, parce que pour l’instant, malheureusement, ce ne sont pas les pays de l’ouest qui mènent ce combat.


Olivier Bault : La foi catholique d’un grand nombre de Polonais joue-t-elle aussi un rôle selon vous ? Les pays d’Europe occidentale, dont la France, ne souffrent-ils pas avant tout d’avoir perdu la foi en Dieu et de se retrouver fragilisés, sans repères fixes et avec des valeurs fluctuantes, face à la montée des revendications individuelles et communautaires ? Je pense par exemple à la très mal nommée loi bioéthique récemment votée en France…


Marion Maréchal : Je pense que la résistance des Polonais est liée à un tas de choses et le catholicisme est effectivement un ciment spirituel important qui fait partie intégrante de leur identité et de leur spécificité, car ils ont été un pays catholique voisin de pays orthodoxes. Comme la France, la Pologne est un pays millénaire. Chez nous, Hugues Capet, c’était au Xe siècle, et c’est à peu près à ce moment-là qu’est née la Pologne. C’est donc un pays qui a une vraie profondeur et qui a connu, comme la France, des chutes et des résurrections. C’est un pays qui a connu son démantèlement, qui a connu beaucoup d’invasions, et qui a donc, d’une certaine manière, la conscience aiguë de sa fragilité. C’est un pays qui sait qu’il peut mourir et qu’il doit toujours se battre pour défendre sa survie et son intégrité, ce dont la France a peut-être moins conscience. La France a plus envahi qu’elle n’a été menacée, même s’il lui est arrivé aussi d’être envahie sur son territoire. La France n’a pas été démantelée comme a pu l’être la Pologne. Je crois que c’est tout cela qui fait qu’il y a une volonté plus féroce de défendre le point de vue polonais au sein de l’Union européenne.


Olivier Bault : Vous avez fondé l’ISSEP dans une perspective de long terme. Cependant, à Budapest, vous avez fait part de vos craintes liées à l’immigration de masse et à l’islamisation de la France. Ne craignez-vous pas que, avant que votre école puisse avoir un impact positif sur la composition et l’état des élites françaises, il ne soit déjà trop tard pour la France ?


Marion Maréchal : Il est évident que le combat culturel et éducatif est un combat de long terme. Nous ne sommes pas dans l’instantanéité médiatique. C’est d’ailleurs pour cela que beaucoup s’en détournent : on veut des résultats tout de suite. Je pense que c’est une erreur. L’histoire est écrite par les minorités agissantes. Par conséquent, il faut la former, cette minorité. Il n’est jamais trop tard pour essayer. La philosophe Simone Weil affirmait que le déracinement détruit tout sauf le besoin de racines. Des écoles comme les nôtres répondent à ce besoin de racines. Et puisque nous répondons à un besoin, je pense que nous allons nous développer très vite. Je suis plutôt optimiste de ce point de vue-là même si nous en sommes encore à un stade où nous semons les graines. Nous verrons les fruits d’ici quelques années.


Olivier Bault : Vous avez dit en 2019, avant la Convention de la droite, « Je me place désormais dans un combat éducatif, culturel. Mon univers est celui des idées et non plus celui des urnes. » Pourtant, dans les milieux conservateurs français, certains vous voient comme une possible Jeanne d’Arc. Excluez-vous de revenir un jour à une carrière politique ?


Marion Maréchal : Me voir comme une possible Jeanne d’Arc, c’est me faire beaucoup d’honneur. Ceci dit, je n’ai jamais exclu un retour à la politique et j’ai toujours dit que je me laissais le choix d’en faire. Pour être honnête, je pense que je referai de la politique parce que cela me plaît et que cela m’anime. Je ne veux toutefois pas me précipiter. Je veux me laisser le temps et le choix du bon moment. La politique, c’est un choix radical. Cela impliquera que je me mette en disponibilité par rapport à l’ISSEP. Or ce projet me tient beaucoup à cœur et je le crois très important. Je ne veux donc pas faire ce choix avant d’avoir l’assurance que tout est mis en place pour que cette école vive et se développe sans que j’en fasse partie, même si je ne suis qu’un élément au milieu d’une grande équipe. Je n’ai donc pas de plan précis mais je ne m’interdis rien, bien évidemment.