Robert Dutrisac - La ministre responsable de l’application de la Charte de la langue française, Christine St-Pierre, rejette en bloc le projet de loi déposé par Pierre Curzi visant à renforcer la Charte. Elle affirme répondre ainsi à «l’attitude de fermeture» du député indépendant à l’égard de son propre projet de loi sur les écoles passerelles.
La ministre, toujours chargée de l'application de la Charte de la langue française bien que cette fonction ne figure plus dans son titre officiel, a la mémoire longue. Elle en veut au député de Borduas qui a refusé de discuter de son projet de loi 103 sur les écoles passerelles lors de son étude en 2010. «Le député [...] a eu une attitude de fermeture. Il n'a jamais voulu étudier aucune proposition qu'on faisait, alors je lui envoie la même réponse pour son projet de loi», a-t-elle déclaré hier, dans un bref point de presse.
Le projet de loi 593, qui se veut une refonte de la Charte de la langue française, en étend l'application aux cégeps, aux établissements de formation professionnelle et aux services de garde ainsi qu'aux écoles privées non subventionnées qui peuvent servir d'écoles passerelles pour l'obtention du droit de fréquenter l'école publique en anglais. Christine St-Pierre a réitéré la position du gouvernement Charest au sujet du droit des étudiants francophones et allophones de fréquenter le cégep en anglais. «On pense que, rendu à cet âge, un étudiant a la maturité pour choisir ce qu'il veut pour lui», a-t-elle indiqué.
Le projet de loi 593 vise les entreprises de 25 à 49 employés, qui ne sont pas à l'heure actuelle dans l'obligation d'obtenir un certificat de francisation en vertu de la Charte, comme les entreprises de 50 employés et plus. Ces petites entreprises seraient tenues d'instituer un comité de francisation et d'obtenir un certificat de conformité — un nouveau vocable pour désigner le certificat de francisation — si elles veulent conclure des contrats avec le gouvernement ou recevoir des subventions de l'État.
Pour la ministre, cette mesure accroît la bureaucratie. «On a fait des calculs. Ça veut dire 7,5 millions, ça veut dire alourdir la bureaucratie pour ces petits entrepreneurs qui ont plus besoin d'accompagnement que d'alourdissement», a fait valoir Christine St-Pierre. À l'heure actuelle, l'Office québécois de la langue française (OQLF) dispose d'un budget annuel de 23 millions.
Des amendes réduites
Pierre Curzi propose également de déjudiciariser les amendes imposées aux personnes ou aux entreprises pour avoir contrevenu aux règles sur l'affichage, l'étiquetage ou la langue des contrats, par exemple. Plutôt que de déférer les dossiers d'infraction au Directeur des poursuites criminelles ou pénales (DPCP), les inspecteurs de l'Office auraient le pouvoir de distribuer des amendes sur-le-champ, un peu comme les contraventions données par les préposés municipaux pour stationnement illégal.
Ces amendes seraient réduites par rapport à leur valeur actuelle. Depuis 2010, pour une première infraction, les amendes de l'OQLF varient de 750 $ à 2100 $ dans le cas d'un individu et de 1500 $ à 20 000 $ pour une entreprise. En vertu du projet de loi, les amendes seraient ramenées à des montants allant de 50 $ à 100 $ pour un individu et de 250 $ à 1000 $ pour une entreprise. «Pour ce qui est des amendes, écoutez, je tombe à l'envers. Ils diminuent les amendes qu'on a augmentées; cherchez la logique là-dedans», s'est insurgée Christine St-Pierre.
Le projet de loi 593 confère à la Charte de la langue française un statut quasi constitutionnel qui inscrit les droits fondamentaux des anglophones, définis comme des personnes de langue maternelle anglaise, des autochtones et des Inuits.
En matière de raisons sociales, le projet de loi 593 inscrit dans la Charte les dispositions actuelles fixées par règlement et vulnérables sur le plan juridique. Ainsi, le nom d'une entreprise dans l'affichage ou la publicité devra être en français. Il pourra comprendre une marque de commerce en anglais, mais devra absolument être accompagné d'un terme générique en français, par exemple: Les magasins généraux Canadian Tire.
Le projet de loi stipule que les communications écrites de l'administration publique destinées aux immigrants doivent être en français. Les filiales des sociétés d'État comme la Caisse de dépôt et placement du Québec et Hydro-Québec seraient soumises à la politique linguistique de l'administration.
En outre, avant de publier une offre d'emploi qui fait de la connaissance de l'anglais une condition d'embauche, un employeur devrait justifier cette exigence auprès de l'OQLF.
Modification de la Charte de la langue française
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