Québécois et Écossais
7 novembre 2009
C’est, en partie, le sujet du film documentaire Questions nationales, présenté encore la semaine dernière à Gatineau. Pendant que les Catalans s’opposent depuis des siècles à l’Espagne impériale, l’Écosse se coletaille depuis 300 avec le même conquérant que nous, l’Empire britannique. Ces deux minorités ont déjà perdu leur langue, ce qui ne devrait pas tarder pour nous. Le Scottish National Party ne se maintient aux commandes que par un siège, comme il est dit, à cause de division des indépendantistes, comme nous. L’Empire britannique a toujours su diviser pour régner : privilèges aux uns et aux autres, menaces de perte de ressources. Si bien que le référendum promis, déjà reporté, ne semble pas présager les conditions gagnantes et pourrait n’avoir jamais lieu, comme pour nous. Une majorité se dessine pour penser que Bigger is better, que les Britanniques leur ont apporté l’industrialisation (les bienfaits de la conquête…).
On retrouve aujourd’hui 7 nov, dans Le Devoir, le billet de Louis Cornellier qui présente un essai québécois : La Conquête sous toutes ses coutures, par l’historien Charles-Philippe Courtois. Une citation : « Magnanimes, les conquérants? Peut-être, mais seulement dans la mesure où les vaincus se tiennent tranquilles. » Puis : « Les Québécois sont-ils encore conquis?…Le Québec dispose d’un pouvoir provincial relativement étendu. Les attributs de la souveraineté continuent toutefois à lui échapper et la nation québécoise a de moins en moins de poids, notamment démographique, dans l’ensemble canadien. » On y trouve les propos de l’historien Arthur Lowes : « …tant que les Français seront français et que les Britanniques seront britanniques, le souvenir de la conquête et ses conséquences persisteront. Il faudrait que tous deviennent canadiens pour surmonter ces divisions. » Et l’auteur de commenter : « On peut se demander lequel des deux peuples se fondrait dans l’autre. » Enfin, un thème que développe M. Jean Dorion dans ses conférences rotatives sur Les conséquences de la Conquête : « La décapitation sociale. La Conquête, rappelle Michel Brunet, exclut les Canadiens de l’époque des postes de pouvoir ». L’exemple frappant, à Montréal, fut la famille McGill, qui fit fortune du monopole des fourrures que leur apportaient les coureurs de bois français et amérindiens. En 1962, rapporte l’auteur Courtois, Pierre-Elliott Trudeau écrivait : « Le sentiment de supériorité ne s’est jamais dédit et n’a jamais cessé de caractériser l’attitude des Canadiens de langue anglaise vis-à-vis des Canadiens français. »
En 1982, 20 ans plus tard, Trudeau rapatriait unilatéralement la Constitution canadienne en y adjoignant une Charte des droits destinée à rendre caduque la Charte québécoise de la langue française. Le professeur Marc Chevrier, sc. po. UQÀM, nous apprend ces temps-ci la ruse de Trudeau : Constitution pensée à travers les concepts monarchiques britanniques. Tous les symboles monarchiques qui encombrent les rouages de la fédération canadienne servent à nous habituer à sa présence tout en camouflant la toute-puissance des juges de la Cour Suprême qui, après des années de loyaux services auprès de la Couronne, reçoivent le titre honorifique de Conseiller de la Reine, c.r., donc ne peuvent penser autrement que Canadian Nation Building. Cet omnipotent instrument parfaitement monarchique bloquera toujours toute tentative d’accès à l’indépendance par les Québécois. Seul un soulèvement populaire pourrait nous soustraire au conquérant!
Combien de soulèvements populaires sont sortis victorieux de l’Empire britannique?
Suffit de penser au capitaine Drake, le pirate des grandes mers qui devint célèbre pour ses missions britanniques dans l’expansion coloniale. L’Angleterre n’a pas tant sévi autour d’elle qu’aux antipodes. L’Inde s’est-elle remise de la colonisation britannique? Langue perdue, partition du territoire, guerres ethniques et religieuses… L’Afrique du Sud, tout comme l’Inde, devenue britannique par le traité de Paris, se souvient-elle de ses bienfaits?… Guerre des Boers, Apartheid…Misères de Mandela… Et les Antilles britanniques? Guerres du sucre, esclavage, la bénédiction anglaise! Sans oublier les É. U. A. One country, One language, pays des misères individuelles au profit des guerres éternelles de par le monde…
Non, les Québécois ne se soulèveront pas contre la Couronne britannique. Mais ils peuvent au moins aller, mardi prochain, dire haut et fort au représentant de la Couronne britannique qu’après 250 ans, ils sont encore prêts à contester l’assimilation