Accommodements raisonnables: le gouvernement ne bougera pas

Laïcité — débat québécois

Jean Charest et Yolande James soutiennent que le travail gouvernemental a été accompli. Photothèque Le Soleil

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Jean-Marc Salvet - (Québec) Le gouvernement Charest ne donnera pas suite à la demande adéquiste de rédiger un «livre blanc sur la laïcité», comme le recommandait la commission Bouchard-Taylor. Pas plus qu'à celle du PQ, qui réclame un nouvel amendement à la Charte québécoise des droits et libertés. Pour les libéraux, le dossier des accommodements raisonnables est clos.
La politique de la Société de l'assurance automobile du Québec d'accommoder des juifs hassidiques ou des musulmans désireux de passer un examen avec un évaluateur du même sexe a animé l'Assemblée nationale pour une deuxième journée d'affilée, mercredi. La SAAQ s'appuie sur un avis de la Commission des droits de la personne du Québec.
«Il faut quand même placer ça dans son contexte, a déclaré le premier ministre Jean Charest. On parle de six cas sur 26 000.»
Faux argument! rétorque l'opposition. Selon elle, le problème n'a rien à voir avec le nombre de cas. «Est-ce que quelqu'un va dire demain matin qu'il veut une juge femme ou un juge homme? Est-ce qu'on va accepter ça?» a demandé Pauline Marois.
Jean Charest et la ministre de l'Immigration et des Communautés culturelles, Yolande James, soutiennent que le travail gouvernemental a été accompli.
Le chef du gouvernement a cité l'inclusion du principe de l'égalité entre les hommes et les femmes dans la Charte québécoise des droits et libertés. Le préambule du texte a été modifié en 2008 pour y insérer les mots suivants : «Les droits et libertés énoncés dans la présente Charte sont garantis également aux femmes et aux hommes.»
Pour sa part, la ministre James a évoqué la déclaration sur les valeurs québécoises que tous les nouveaux immigrants doivent désormais signer.
Pour le PQ et l'ADQ, ces mesures sont tout à fait insuffisantes.
Pauline Marois exige que la Charte soit remodifiée afin de donner plus de poids à l'égalité entre les hommes et les femmes. La chef péquiste propose un amendement qui se lirait comme suit : «Dans l'interprétation et l'application de la présente charte, il doit être tenu compte de l'importance de garantir [cette] égalité.» Il faudrait aussi que le principe de la séparation entre l'État et la religion soit clairement affirmé, dit-elle.
À l'ADQ, où l'on avait marqué beaucoup de points dans l'opinion publique avec ce dossier en 2007 (avant que le PQ ne saute sur la même glace), Sylvie Roy s'est référée à la commission Bouchard-Taylor, qui proposait un livre blanc sur la laïcité.
Dans leur rapport, les deux commissaires écrivaient qu'il «importe, à ce stade de l'histoire du Québec, que l'État formalise et énonce la conception de la laïcité qui prévaut déjà en pratique et que, ce faisant, les balises qui la circonscrivent soient affirmées et précisées». Ce document n'a jamais été produit.
Les arguments des partis d'opposition n'ont pas ébranlé le gouvernement. Il est résolu à ne pas bouger sur cette question. On plaide que, de toute façon, chaque cas devra toujours être étudié au mérite.
«Pendant que le premier ministre ne définit pas ce qu'est la laïcité, ce sont des chauffeurs d'autobus qui doivent prendre les décisions», a raillé Mme Roy. Elle faisait référence à un épisode récent survenu dans un autobus du Réseau de transport de la Capitale où un conducteur a demandé à une femme arborant le niqab de se découvrir afin de dévoiler son identité.
Pour le plus grand bonheur ou le plus grand malheur des uns et des autres, ce retour du débat sur les accommodements raisonnables s'entremêle avec le projet de loi 16 qu'étudient actuellement les parlementaires. Ce projet vise à encadrer la gestion de la diversité culturelle par l'administration publique.


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