Des mensonges de Pratte à la libération d’un peuple!

l'affaire SAGARD

La Presse est en guerre. Ou plutôt, le multimilliardaire Paul Desmarais, propriétaire de celle-ci et ayant déjà affirmé que l’indépendance du Québec signerait sa fin, met tout en œuvre pour empêcher tout renforcement de la Loi 101. Et qui de mieux que son laquais numéro un, l’éditorialiste André Pratte, pour accomplir l’ingrate besogne?
En moins d’une semaine, Pratte a signé trois textes sur la question. Le 19 octobre dernier, il affirmait que l’indifférence des Québécois vis à vis de la question linguistique témoigne de l’approche modérée (sic) du gouvernement Charest. Le 22 octobre, il blâmait les francophones quittant l’île de Montréal pour justifier l’anglicisation de la métropole. Le 26 octobre, il vantait la présence « respectueuse » des anglophones montréalais et expliquait qu’il ne servirait à rien d’étendre l’enseignement obligatoire dans la langue nationale de 12 à 14 ans en appliquant la Loi 101 au cégep.
Trois textes, trois morceaux de propagande. Pratte est en campagne, et la fin du Québec français constitue son seul objectif. La maison est en feu, mais il ne faudrait surtout pas s’inquiéter! Démontons ses mensonges un par un.
Premier mensonge: les Québécois sont indifférents à propos de leur langue.
Non, ce n’est pas parce qu’il n’y a eu « que » 3000 à 5000 manifestants le 18 octobre dernier pour dénoncer la loi 115 que les Québécois sont indifférents. Un sondage publié l’an dernier démontrait d’ailleurs que près de 90% des Québécois croient que le français est menacé à Montréal. Et cinq mille manifestants, c’est déjà 40% plus de participants qu’au rassemblement contre la loi 103 du 18 septembre et près de cinq fois le nombre de spectateurs au premier spectacle du 11 avril dernier! Bien sûr, nous sommes encore loin de la marche en faveur du retour des Nordiques, mais le fait que les gens marchent plus facilement pour un club de hockey que pour la langue ne témoigne peut-être pas de leur indifférence quant à celle-ci, mais peut-être simplement de leur implication supérieure à propos de cet enjeu et du fait que celui-ci requiert un engagement politique beaucoup moins exigeant (tout le monde veut le retour des Nordiques; il est beaucoup plus difficile de défendre une opposition à un projet de loi complexe).
Deuxième mensonge: l’exil des Québécois de Montréal explique l’anglicisation de la métropole.
Pratique comme analyse, ne trouvez-vous pas? Il suffit de démontrer que les Québécois quittent Montréal plus massivement que les anglophones, de parler du déplacement de la limite traditionnelle des quartiers francophones et anglophones et BINGO l’affaire est ketchup. Or, j’ai déjà démontré à plusieurs reprises que cette perception est erronée: si l’exode des Québécois de Montréal était un facteur de l’anglicisation de la métropole, comment pourrait-on expliquer que la banlieue s’anglicise tout aussi rapidement? André Pratte parle du départ des Québécois vers Repentigny, Terrebonne et Varennes; sait-il seulement que la croissance des locuteurs de langue d’usage anglaise pour ces villes, entre 2001 et 2006, était respectivement de 69%, 60% et 7%? S’il y avait un tel exode de francophones vers la banlieue, pourquoi la croissance des locuteurs de langue anglaise pour l’ensemble des banlieues rapprochées était de 7,6% alors qu’elle n’était que de 4,4% pour Montréal elle-même? Mathématiquement, les prétentions d’André Pratte ne fonctionnent pas. Le départ de nombreuses familles québécoises vers la banlieue ne constitue PAS un facteur d’anglicisation de la métropole. La réponse est ailleurs.
Troisième mensonge: il ne sert à rien d’appliquer la Loi 101 au cégep.
André Pratte commet l’erreur de nombreux fédéralistes (et même de certains indépendantistes) qui croient que l’application de la Loi 101 au cégep constituerait une sorte de parachèvement de la Loi 101, la fin du combat des Québécois pour la survie de leur langue. « Douze ans ou quatorze ans d’éducation en français, qu’est-ce que ça change? » pourraient-ils affirmer. L’étude de l’IRFA, publiée le mois dernier, est assez convaincante à ce sujet: le cégep anglais anglicise fortement. Mais il faut voir plus loin. Il faut concevoir l’application de la Loi 101 au cégep non pas comme une finalité, mais comme le début d’un renouveau où les Québécois cesseraient de se contenter de défendre une Loi 101 sacralisée (mais pourtant dépecée plus de deux cent fois depuis son adoption) et prendraient l’initiative pour véritablement franciser le Québec. Et le dés-angliciser, forcément.
Il faut désacraliser la Loi 101
La vérité, c’est que le Québec et Montréal s’anglicisent non pas seulement parce que les Québécois sont indifférents, qu’ils quittent Montréal vers les banlieues ou parce que la Loi 101 n’est pas appliquée au cégep. Tout ça est beaucoup trop facile. Même si ces facteurs peuvent jouer, une des véritables causes de l’anglicisation m’a été expliquée par Pierre Serré il y a quelques mois: il s’agit du solde migratoire interprovincial du Québec. Concrètement: si les anglophones quittaient le Québec massivement au cours des dernières décennies, ils ont plus tendance à s’accrocher aujourd’hui, faisant porter un fardeau supplémentaire sur notre langue nationale.
Regardez le tableau suivant: (Données provenant de Statistique Canada)


On y constate que si les anglophones ont été nombreux à quitter le Québec après l’élection du Parti Québécois en 1976, ils ne sont plus qu’une minorité à le quitter aujourd’hui. Ces anglophones « québécois », loin d’être les anglophones respectueux du français qu’idéalise André Pratte, forment plutôt une nouvelle catégorie de citoyens ne se réclamant plus du Canada, mais s’affichant fièrement comme Québécois ou Montréalais, même s’ils ne parlent pas toujours la langue nationale du Québec. Plutôt que de faire face à des anglophones dans un processus soit de francisation ou d’exil – des anglophones acceptant le statut francophone du Québec – , nous avons désormais des anglophones travaillant activement à l’anglicisation du Québec et s’enracinant durablement au sein de la société québécoise.
Cette situation n’existe que parce que nous avons sacralisé la Loi 101 et refusé de la remettre en question. Tellement fiers de nous être enfin libéré du joug colonialiste avec la charte de la langue française, nous en avons fait un idéal tel que nous n’osons plus la renforcer à un moment où elle en a cruellement besoin. Nous avons peur de l’adapter aux nouvelles situations, peur de s’en servir pour véritablement faire du Québec la nation française qu’il prétend être. Peur d’exister non pas par défaut, mais parce que nous voulons enrichir l’humanité de notre présence. Peur d’OSER modifier la Loi 101 non pas parce qu’une cour politique d’une nation étrangère nous le demande, mais parce que nous avons le désir de le faire par nous-mêmes.
Voici ce qu’un peuple courageux ferait:
1. L’abolition du réseau scolaire public anglophone. Un peuple fier ferait exactement comme font toutes les nations du monde. Il ne financerait qu’un seul réseau d’éducation dans la langue nationale. Actuellement, pour 5,6% d’anglophones de langue maternelle nés au Québec, nous finançons leurs écoles primaires et secondaires à 11%, leurs cégeps à 16% et leurs universités à 27%.
2. L’application de la Loi 101 à toutes les écoles privées du Québec, de la maternelle à l’université. Un peuple audacieux refuserait de décerner un diplôme national à une école refusant le statut francophone de la nation québécoise.
3. La fin de toute subvention à un établissement (santé, éducation ou autre) qui ne soit pas francophone. À l’image de dizaines d’États refusant de financer avec des derniers publics des organismes œuvrant dans une autre langue que la langue nationale, un Québec brave cesserait d’encourager la dislocation sociale et l’anglicisation en ne finançant que des organisations francophones.
4. L’obligation que tous les services gouvernementaux soient dispensés dans la langue nationale. Vous voulez votre permis de conduire? Un Québec véritablement libéré ferait à l’image de dizaines d’État américains et vous obligerait à parler la langue nationale. Idem pour la santé, pour le droit de vote ou pour n’importe quel service gouvernemental. Fini le « press nine ».
5. Francisation de toutes les marques de commerce. Plusieurs États forcent non seulement l’affichage dans la langue nationale, mais également que le nom des compagnies soit affiché dans cette langue. Un Québec qui se tient debout devrait faire la même chose.
6. Interdiction d’exiger la connaissance d’une langue étrangère pour tout emploi œuvrant spécifiquement au Québec. Il n’est pas normal que de nombreux commerces exigent la connaissance d’une langue étrangère quand ceux-ci ne font pas affaire avec un pays anglophone. Aucun emploi s’adressant exclusivement à des Québécois ne devrait nécessiter la connaissance d’une langue étrangère.
7. Obligation pour tous les médias s’adressant aux Québécois d’avoir un certain pourcentage de leur contenu en français. The Gazette, CHOM, et même des sites internet existent entièrement en anglais. Il faudrait qu’une certaine partie du contenu soit en français. On peut penser, par exemple, à 25% des pages en français dans The Gazette et à 25% des interventions en français pour CHOM ou d’autres stations de radio anglaises. En ce qui concerne le contenu musical, il faudrait augmenter les quotas de musique québécoise. Notons que plusieurs pays ont légiféré en ce sens.
8. Obligation pour toutes les entreprises d’écrire dans un bon français. Fini les « École de conduite du camion et d’auto » et autres traductions approximatives. Dans un Québec fier, aucun permis d’exploiter une entreprise ne pourrait être donné sans une utilisation d’un français grammaticalement correct.

9. Augmentation des heures d’école consacrées à l’Histoire et au français. Il n’est pas normal que notre jeunesse ne sache rien ni de notre histoire ni de l’écriture correcte de notre langue nationale. Plutôt que de miser sur une langue étrangère (une seule, de surcroît) il faudrait d’abord leur apprendre à savoir d’où ils viennent et de quelle façon écrire leur langue.

10. Diminution de l’immigration pour atteindre un seuil mieux gérable. À près de 50 000 immigrants par année, nous recevons davantage d’immigrants que la plupart des pays développés. Or, nous ne jouissons pas de leur cohésion culturelle et linguistique et avons donc encore plus de difficulté à les intégrer.
11. Refus de reconnaître toute décision émanant de la Cour suprême du Canada. Un Québec libéré ne reconnaîtrait pas le droit de la cour politique d’une nation étrangère à décider de ce qui est le mieux pour lui.
Voilà ce que ferait un peuple qui se tient debout. Ce peuple se battrait pour exister. Il donnerait des coups de griffes partout. Il reconnaîtrait que le départ d’anglophones constitue une excellente nouvelle et que le modèle MONDIAL d’États homogènes d’un point de vue linguistique constitue le meilleur gage de survie pour la langue française en Amérique. Il lutterait de toute son âme pour la diversité culturelle et la pluralité mondiale en s’assurant que cesse le génocide culturel des francophones du Canada.
Ce peuple, il se tiendrait face au vent, il cesserait de lire tous les mensonges des Pratte de ce monde et il oserait enfin crier, du poids de son nombre et avec la force que lui confère son État: J’EXISTE!
La quasi-totalité des nations du monde se sont dotées de lois linguistiques assurant la survie de leur langue nationale. Qu’attendons-nous, dites-moi? Attendons-nous, après avoir été minoritaires en Amérique du Nord, puis minoritaires au Canada, de devenir minoritaires au Québec?
Reprenons l’initiative linguistique et réchauffons l’hiver de notre peuple avec la grosse Presse à Pratte!


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