Dans quelle galère les fédéralistes veulent-ils embarquer le mouvement souverainiste en identifiant Gilles Duceppe comme un sauveur?
Depuis le sondage Léger, on dirait que plus personne ne réfléchit. Tous voient maintenant Gilles Duceppe dans leur soupe. Évidemment, c’est la répétition de l’histoire. Et « l’histoire nous apprend que nous ne retenons rien de l’histoire ». Fin de la citation! On va donc expliquer.
Deux grands médias de masse s’affrontent au Québec. Le premier est la grosse Radio-Canada secondée par la Presse de Gesca et Power tandis que le deuxième c’est l’empire Québecor autour duquel tournent la télépoche de TVA et une autre feuille de chou qui me sert de papier hygiénique, j’ai nommé l’auguste Journal de Montréal et Québec.
Le premier groupe est libéral tandis que le deuxième est farouchement conservateur. Chez l’un comme chez l’autre, toute la dynamique éditoriale et celle dirigeant les aspects d’information télévisuels sont orientées vers les idéologies politiques qu’elles défendent. Il suffit de comparer un bulletin de nouvelles de chez nous avec ceux que l’on trouve sur les grandes chaînes en Europe pour se convaincre que la médiocrité du produit n’a d’égale que sa raison d’exister, c'est-à-dire amener les Québécois à adhérer à l’affairiste idéologie dominante du chacun-pour-soi.
Qu’est-ce que cela a à voir avec le Pq et Duceppe? J’y viens! Mais d’abord, il importe de mettre en relief l’alarmisme des médias qui annonce pour la millième fois la mort du mouvement souverainiste, et ce à grands coups de sondages patentés. Il fallait voir Jean-Marc Léger analyser celui de sa propre maison, mettant Duceppe en avance et ainsi annoncer que sans un changement de chef en faveur de ce dernier, le mouvement pour l’indépendance était cuit.
Or, je ne souscris ni à cette analyse et encore moins à ses visions apocalyptiques. Au contraire! Gilles Duceppe et son groupe ont végété pendant 20 ans à Ottawa sans faire avancer la cause d’un pouce. Ils se sont fait montrer la porte le printemps dernier par les Québécois qui en avaient assez. On a tous compris que c’est à Québec que les choses doivent se passer et non chez le voisin.
Gilles Duceppe est donc bien loin d’incarner le renouveau. Pour les fédéralistes, il incarne plutôt la continuité de cette tiédeur qui a engourdi et tué le Parti québécois depuis le référendum de 1995. Il est aussi celui qui va barrer le chemin à des candidats beaucoup plus charismatiques et désireux d’en découdre pour l’indépendance comme Bernard Drainville ou Jean-Martin Aussant.
Voilà ce que redoutent les fédéralistes. Ne perdons jamais de vue les build-up médiatiques qui ont permis l’élection de la gang à Dumont à Québec et de la bande à Jack à Ottawa. Aujourd’hui, les fédéralistes ont la chance de susciter un affrontement Legault-Duceppe qui en tournant à l’avantage du premier aura l’immense effet démobilisateur voulu. Car, si Duceppe perd à la manière dont il a présidé à la défaite du Bloc, qui donc en effet voudra prendre la chefferie d’un Pq anéanti? Imaginez cinq minutes l’effet qu’une telle défaite aurait sur les militants…
Il faut donc s’interroger. Pourquoi cet engouement soudain et inexpliqué pour Gilles Duceppe? Depuis des années, les actions du mouvement souverainiste sont orientées par les sondages et les médias qui se prétendent à tort être les porteurs de l’opinion publique. Mais nous le savons plus que quiconque, les médias sont au Québec des charognards et des fossoyeurs. Avant de prendre leurs calembredaines pour du cash, il faudrait peut-être réfléchir un peu. Il est en effet possible que l’on veuille parachuter Duceppe au-devant de la scène dans le but express de faire en sorte de s’assurer que quoi qu’il arrive, le Pq se retrouve exactement là où est présentement le Bloc, à savoir, six pieds sous terre.