Hong Kong : deux peuples, un système…

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Cantonais contre Hans du Nord


« Ceux qui jouent avec le feu périront par le feu », réplique Pékin, le 6 août, face à la grève générale et au blocage des transports lancés par les pro-démocratie hongkongais. Ces derniers sont, depuis deux mois, mobilisés contre le projet de loi d’extradition visant tant l’opposant politique que n’importe quel ressortissant. Depuis cinq ans et la « révolution des parapluies », rien ne va plus entre le Cantonais et le grand frère du Nord, en dépit du rattachement intégral à Pékin à venir en 2047, et amorcé en 1997, rattachement acté depuis la signature de la rétrocession, en 1984.


Le Parti populaire ne laisse aucune marge de manœuvre à sa plus importante vitrine financière (cinquième place dans le monde). En attendant, une génération incarnée, notamment, par Joshua Wong, Nathan Law et Yau Wai-ching ne se résigne pas et use de tous les moyens médiatiques possibles pour faire entendre sa voix auprès d’une population cantonaise longtemps anesthésiée par l’enrichissement massif des oligarques post-maoïstes (un million de manifestants, le 9 juin dernier).


Au-delà de l’économicisme, un conflit n’est pas tant politique qu’ethnique car la Chine est un pays-continent constitué de 56 ethnies. La ligne de fracture entre les Hans du Nord et ceux du Sud est profonde. En l’occurrence, le mandarin est différent, au niveau de la prononciation des caractères, des règles syntaxiques et grammaticales puis de la tonalité (4 tons employés au lieu de 9), par rapport au cantonais, langue que Pékin tend à dissoudre via son système éducatif.


In fine, et contrairement au credo de Deng Xiaoping selon lequel il fallait établir, avec Hong Kong, « un État, deux systèmes », la nation chinoise fait face à sa plus grave crise identitaire depuis la révolution de 1911. Mais si le président Xi Jinping cède un pouce aux félons hongkongais, qu’en sera-t-il avec, entre autres, la minorité musulmane, les Ouïghours ? Il est impératif de ne pas replonger dans le cercle vicieux de la division qui fit tant le jeu des colons occidentaux, pour qui le Chinois était « l’homme malade de l’Asie ». De fait, le complexe d’infériorité appelle toujours celui de supériorité dans le sous-continent.


Seulement, l’identité hongkongaise, en elle-même, est fracturée en trois familles : celle qui demande le retour de la couronne britannique (minoritaire), celle qui souhaite servir Pékin (a priori majoritaire) et celle qui veut une pleine et entière indépendance (largement incarnée par la jeunesse).


Nonobstant le soutien d’une partie de la finance internationale, celui du lobbyiste George Soros ne semble pas faire l’ombre d’un doute : Xi Jinping est « l’adversaire le plus dangereux des sociétés ouvertes », a-t-il déclaré, en marge du dernier Forum économique mondial de Davos, selon un article de Jitendra Joshi paru sur le site HKFP, le 25 janvier dernier. De plus, Nathan Law se dit favorable à LGBT (dans le documentaire d’Alain Lewkowicz intitulé Génération rétrocession).


Toujours est-il que 20.000 Hongkongais ont demandé à partir vers les États-Unis et l’Europe, en 2016. Depuis longtemps, le Cantonais s’exporte par désespoir : hier, à La Réunion et en Indochine, aujourd’hui, aux États-Unis et en Australie. Sa philosophie l’écarte de tout impérialisme pékinois, que ce soit, par exemple, dans le cinéma comme dans les arts martiaux, tel Bruce Lee. Il est plus joueur qu’hyperconsommateur, ou plus orgueilleux que vaniteux, face au nouveau « tigre de papier ».