Il faut renverser Harper!

C'est fini: Stephen Harper et ses conservateurs ont laissé tomber le masque de modération et de pragmatisme qu'ils tentaient de porter depuis plus de trois ans.

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Ottawa - "Énoncé économique" et crise politique




C'est fini: Stephen Harper et ses conservateurs ont laissé tomber le masque de modération et de pragmatisme qu'ils tentaient de porter depuis plus de trois ans. Le gouvernement vient d'annoncer un plan économique incroyablement inadéquat en même temps qu'il lance une attaque frontale contre la démocratie électorale canadienne.
Ce faisant, en situation minoritaire, il a rendu un grand service aux Canadiens et a mis les partis de l'opposition devant leurs responsabilités: le visage qu'il découvre à ce moment critique pour le Canada nous montre sans équivoque que les conservateurs ne sont pas aptes à gouverner. Les partis de l'opposition doivent maintenant renverser le gouvernement et se préparer à gouverner en coalition - peu importe les reculs que les conservateurs pourraient tenter d'ici à lundi après-midi.

La crise financière mondiale et les graves difficultés d'importants secteurs de l'économie canadienne (l'automobile, la foresterie...) appellent des politiques de stimulation économique et de re-réglementation. On savait déjà que tous les instincts de ce gouvernement étaient en porte-à-faux avec ces nécessités, mais on pouvait espérer que M. Harper et son ministre des Finances, Jim Flaherty, sauraient être pragmatiques. Or, l'énoncé économique de jeudi va exactement dans la mauvaise direction: au lieu de stimuler l'économie, il en retire des milliards de dollars en disant que le gouvernement doit «donner l'exemple en se serrant la ceinture». De toute évidence, Harper et Flaherty n'ont rien appris.
Plusieurs commentateurs ont déjà dit que l'énoncé ne fait pas assez pour répondre à la crise. Mais la réalité est bien pire: les politiques qu'il annonce vont empirer la situation. Et la promesse de finalement faire quelque chose dans le budget de février n'arrange en rien les choses. À la lumière de la folie de l'énoncé de jeudi, il ne faudra d'ailleurs pas être surpris, quand viendra février, si le gouvernement trouve encore le moyen de dire que le temps de stimuler l'économie n'est toujours pas venu - ou même qu'il est déjà passé - et qu'il vaudra donc mieux continuer de se «serrer la ceinture».
Invraisemblable programme économique
Dans son ensemble, cet invraisemblable programme économique est d'un conservatisme fiscal que seule justifie une idéologie déjà en faillite. Ses composantes ne sont pas moins extrémistes: on y attaque notamment les syndicats du secteur public et l'indépendance des tribunaux. Pire encore, on y attaque le fonctionnement même de la démocratie électorale canadienne en éliminant les allocations publiques aux partis. Ici, le calcul partisan froid et brutal a peine à se cacher derrière un prétexte à la fois franchement idéologique et remarquablement fallacieux.
En conférence de presse, le ministre Flaherty expliquait que le programme annoncé jeudi fait partie d'un plan à long terme, qu'il n'a pas été improvisé. En d'autres mots, il était en développement avant les élections du mois dernier, et avant l'explosion de la crise financière mondiale. On comprend ainsi plus spécifiquement pourquoi Harper voulait tellement sa majorité, et on est d'autant plus soulagé qu'il ne l'ait pas obtenue.
En laissant tomber le masque si tôt après les élections, et avec les libéraux en course au leadership, le gouvernement s'attendait certainement à faire reculer les partis de l'opposition - encore une fois. Et de fait, c'est la faiblesse des partis de l'opposition qui a permis aux conservateurs de nous amener où nous en sommes. Mais on peut finalement se rendre compte à quel point les provocations de la dernière année étaient mineures. Maintenant, ce n'est plus un jeu: il est temps pour les libéraux, néo-démocrates et bloquistes de tirer les conséquences de leur situation majoritaire et de mettre Harper, Flaherty et cie à la retraite.
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Claude Denis
L'auteur est professeur à l'Université d'Ottawa.

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L'auteur enseigne à l'École d'études politiques et à l'Institut d'études canadiennes à l'Université d'Ottawa.





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