L’enseignement au Québec « encadré de manière déficiente »

Fb2c1e2f435ec5bf25a40601ae4aa948

Au Québec, les enseignants sont davantage formés au pédagogisme progressiste qu'à l'enseignement de la matière


Les lacunes dans l'encadrement se multiplient pendant le parcours d’un enseignant, révèle une étude de l’Institut du Québec (IQ) rendue publique mercredi. Il faudra selon toute vraisemblance bien plus qu’une augmentation de la rémunération pour valoriser la profession et contrer la pénurie de main-d’œuvre.




Dès le début de la formation des enseignants, l’IQ observe de nombreux problèmes qui minent la qualité de l’enseignement. Pour en arriver à ce constat, le groupe de réflexion en politiques publiques a sondé des acteurs du milieu de l’éducation québécois. Il a comparé le Québec à des États où l’enseignement est considéré comme performant, soit Singapour, la Finlande, les Pays-Bas et l’Ontario.


Quand on se compare, on se désole : critères d’admission peu exigeants, formation trop axée sur la pédagogie et peu disciplinaire, insertion professionnelle difficile, soutien et rétroaction aléatoire, et formation continue quasi inexistante.



On donne aux jeunes enseignants les classes les plus difficiles et on leur dit essentiellement : "Débrouille-toi!"


Mia Homsy, directrice générale de l’Institut du Québec


L’enseignant est encadré de manière déficiente, à toutes les étapes de son parcours, peut-on lire dans le rapport.



Une maîtrise d’un an


En Finlande, bien que les enseignants soient moins rémunérés qu’au Québec, les programmes de formation n’admettent qu’un candidat sur dix d’après l’étude. Ici, les cotes minimales servant de seuil d’entrée sont généralement plus faibles que celles détenues par les derniers étudiants admis dans plusieurs programmes contingentés, écrivent les auteurs.


Les meilleurs étudiants ne seraient donc pas attirés par l’enseignement, et les facultés d’éducation se montreraient peu sélectives, ce qui aurait une incidence sur le prestige de la profession.


La majorité des étudiants empruntent le parcours du baccalauréat suivi de stages. Une minorité, qui a déjà un baccalauréat dans une autre discipline, opte pour une maîtrise qualifiante particulièrement longue.



L’Institut propose ainsi de repenser la formation des enseignants en privilégiant, en vue de l’obtention d’un brevet d’enseignement secondaire, une maîtrise de 12 mois à temps plein pour des diplômés universitaires issus de programmes pertinents.


Il y a un besoin de maîtriser les contenus, selon la directrice générale Mia Homsy, puis d’axer sur la pédagogie.


« Gestion déficiente »


Une fois sur le marché du travail, les enseignants semblent laissés à eux-mêmes. Il n’y a pas de mécanisme formel et rigoureux pour l’insertion professionnelle, ajoute Mme Homsy. Pas de rétroaction, pas d’analyse, pas d’évaluation, pas de soutien.



Il ne semble pas y avoir d’acteur qui joue vraiment le rôle de suivre la qualité de l’enseignement au Québec.


Mia Homsy, directrice générale de l’Institut du Québec


Elle insiste sur l’importance d’un encadrement pendant les deux premières années de pratique, en plus d’une formation continue par la suite. Le développement professionnel aurait ici une place marginale alors qu’il est un élément assez important ailleurs.


Le ministère de l’Éducation et de l’Enseignement supérieur est montré du doigt par l’IQ pour sa gestion déficiente. Avec la présence des commissions scolaires, il y aurait également d'après Mme Homsy une confusion des rôles où chacun lance la balle à l’autre et n’assume pas de responsabilités.


Par exemple, les données demeurent difficiles à obtenir puisqu’elles sont colligées au sein des commissions scolaires. Ainsi, le ministre Jean-François Roberge a dû attendre au 18 septembre pour apprendre qu'il y avait pénurie de 360 enseignants à la rentrée scolaire.


On aurait certainement pu agir en amont si on avait eu un portrait des effectifs, indique-t-elle.


Le gouvernement caquiste devrait prochainement déposer un projet de loi visant à transformer les commissions scolaires en centres de services relevant du ministère.


Un salaire « relativement compétitif »


Des négociations dans le secteur public dans le but de renouveler les conventions collectives doivent débuter cet automne.


En campagne électorale, la Coalition avenir Québec a promis d'éliminer les premiers échelons de la grille salariale des enseignants, ce qui ferait passer la rémunération d’un nouvel enseignant d’environ 44 000 $ à 52 000 $ par année.


De l'avis de l’Institut du Québec, ce sont plutôt les conditions de travail à l’école qui devraient être au cœur des préoccupations du gouvernement pour stimuler les inscriptions en enseignement et contrer la pénurie d’enseignants dont sont responsables les besoins grandissants et les départs à la retraite. La rémunération actuelle serait en fait comparable à la moyenne dans les pays de l’Organisation de coopération et de développement économiques.


Mia Homsy parle d’un salaire relativement compétitif, mais reconnaît que les enseignants en Ontario sont beaucoup mieux payés. Le salaire maximum est de 82 585 $ au Québec contre 100 034 $ chez le voisin ontarien.


Mathieu Dion est correspondant parlementaire à Québec




-->