Le 17 février dernier, Vigile mettait en ligne l’Introduction de mon prochain livre consacré à « Charles Sirois, l’homme derrière François Legault ». Aujourd’hui, Vigile met en ligne la Conclusion.
Entre le début et la fin, les lecteurs trouveront, quand le livre sera officiellement lancé au Salon du livre de Québec le mois prochain, dix chapitres divisés en deux parties intitulées, avec un brin d’ironie, Le merveilleux monde des affaires, et L’enfer de la politique. Ces chapitres contiennent des révélations qui vont vous stupéfier autant que je l’ai été en faisant ma recherche pour les écrire. En attendant, la Conclusion vous en donne un avant-goût.
Richard Le Hir
CONCLUSION
Lorsqu’on examine le tandem Legault/Sirois de plus près, on constate qu’ils sont tous deux issus du même moule. Deux hommes de chiffres et d’affaires. Deux hommes qui croient possible et même essentiel d’appliquer les méthodes qu’ils connaissent à nos problèmes de société. C’est cette conviction profonde qui les a réunis pour se lancer tête baissée dans une aventure qui les dépasse.
Une société, c’est une réalité fluide, dynamique au sens où elle est un lieu où s’opposent des forces, en situation permanente de déséquilibre, à la fois en continuité et en rupture avec son passé, empêtrée dans les contradictions de son présent, à la recherche d’un avenir qu’elle souhaite plein de promesses mais qu’elle peine à définir, et qui évolue à des rythmes à la fois différenciés et irréguliers.
C’est certainement vrai pour le Québec, mais c’est également vrai pour toutes les sociétés. Il suffit de regarder ce qui bout dans la marmite des voisins pour s’en rendre compte. En somme, c’est un système complexe dont le fonctionnement ne se réduit pas à une équation simple.
Pour être en mesure de comprendre une société et contribuer de manière positive à la solution de ses problèmes, il faut avoir des connaissances en géographie, en histoire, en anthropologie, en sociologie, en économie, en droit, en gestion, en philosophie (au moins pour ce qui est de la logique, la morale, et la psychologie) et une sensibilité à un éventail d’autres disciplines qui ont toutes, comme les premières, la caractéristique d’appartenir à la catégorie des sciences humaines.
Ces connaissances s’acquièrent d’abord dans le milieu familial, à l’école, puis au CEGEP et à l’université. Avec l’expérience acquise sur le terrain, elles forment ce qu’on appelle la culture générale d’une personne.
Or on sait le peu d’intérêt, et même le dédain certain, de Charles Sirois pour les sciences humaines, qui remontent au temps de ses études. Quant à François Legault, même s’il a démontré à l’occasion qu’il n’était pas aussi unidimensionnel que Sirois, il n’en reste pas moins fortement imprégné par sa formation en sciences exactes, comme en font foi ses choix professionnels (c’est un comptable agréé), et son discours toujours marqué par sa préoccupation pour la rentabilité.
Si cette notion a sa place en affaires, elle est complètement hors de propos en politique pour une raison bien simple, à la portée du premier venu. En effet, en affaires, la capacité de générer des profits et d’être rentable repose sur la capacité des entreprises à externaliser leur coûts, un euphémisme à l’allure savante et anodine qui veut tout simplement dire les pelleter dans la cour du voisin.
Les entreprises ne font rien d’autre lorsqu’elles font de la sous-traitance ou de l’impartition, pour utiliser un autre euphémisme à la mode dans les milieux d’affaires.
Ce système a été brillamment décrit dans un documentaire vidéo canadien sorti en 2003, « The Corporation » [[« The Corporation », Mark Achbar, Jennifer Abbott, et Joel Bakan, Mongrel Media, 2003. ]], maintenant disponible en version intégrale sous-titrée en français sur YouTube [[http://www.youtube.com/watch?v=0ZmQ-YL63fM]]. Cette oeuvre a une si grande importance dans la compréhension du comportement des entreprises que Wikipédia lui consacre un article même dans sa version française. En voici quelques extraits : « Ce film est basé sur le livre « The corporation, the pathological pursuit of profit and power » (Les Multinationales, la recherche pathologique du profit et du pouvoir) de Joel Bakan. Le film est divisé en trois parties, reprenant les trois parties du titre du livre. [...]
Synopsis
Ce documentaire montre l'évolution des « Sociétés Anonymes » (appelées Corporations en anglais) aux USA, reprenant leur histoire depuis leur apparition avec la Révolution industrielle, où elles étaient conçues pour répondre au bien public mais furent détournées de cet objectif par la recherche du profit.
« De même que le requin est une machine à tuer, la Corporation est une machine à faire de l'externalisation. »
À l'issue de la Guerre de Sécession, la Constitution des États-Unis est amendée pour accorder aux Noirs les mêmes droits qu'aux Blancs. Quelques années plus tard, des avocats d'affaires revendiquent et obtiennent que les Corporations, « personnes morales », bénéficient des mêmes droits que les personnes physiques. L'évidence qu'on ne peut mettre une « personne morale » en prison n'est pas admise pour refuser ces droits.
Mais puisque le droit américain reconnaît ces institutions comme étant des « personnes », pourquoi ne pourrait-on pas appliquer une grille d'analyse des syndromes psychiatriques (DSM-IV) sur ces « personnes morales » ?
C'est ce qu'ont fait les auteurs, pour aboutir à diagnostiquer que les Corporations ont le comportement de psychopathes dangereux !
Dans le documentaire, on traite de beaucoup de sujets différents en rapport avec les relations entre grands commerces: l’établissement des parallèles entre les méfaits juridiques d'entreprises, le dur mépris pour les sentiments des autres, l'incapacité de maintenir des relations humaines, l'imprudence face à la sécurité des autres, les mensonges dans le but de faire plus de profits, les défauts de conformité aux normes sociales et le respect de la loi.
La pathologie du commerce, une étude psychiâtrique du monde de l'entreprise
Parallèlement, les réalisateurs cochent les réponses à l'aune d'un manuel de référence de la psychopathologie : le DSM-IV, et il s'établit peu à peu sous les yeux du spectateur que, si l'entreprise a bien les caractéristiques d'un individu, ce n'est pas n'importe quel individu non plus, mais un psychopathe : égoïste, menteur, indifférent au bien-être et au respect d'autrui comme à ses malheurs.
Utilisant les critères diagnostiques de l'Organisation mondiale de la santé et du DSM-IV, outil de diagnostic standard des psychiatres et des psychologues, le documentaire dresse une liste de comportements anti-sociaux des entreprises dans le monde contemporain, au travers de quatre exemples : comportement dangereux envers (1) les travailleurs, (2) la santé des êtres humains, (3) les animaux et (4) la biosphère. Le diagnostic final fait des entreprises des psychopathes. [[« The Corporation », Wikipédia, http://fr.wikipedia.org/wiki/The_Corporation»]]
Depuis la sortie de ce documentaire, de nombreux événements sont venus confirmer la justesse de cette thèse, et notamment la crise économique et financière commencée en 2007 dans laquelle l’économie mondiale se débat toujours.
Les quatre exemples de comportement dangereux des entreprises utilisés dans ce documentaire, (1) les travailleurs, (2) la santé des êtres humains, (3) les animaux et (4) la biosphère, nous permettent de comprendre que l’externalisation des coûts (lire pelletage), va aboutir dans la cour des gouvernements, autrement dit de votre poche et la mienne, et qu’à moins de nous serrer la ceinture jusqu’à en crever de faim, nous n’aurons pas d’autre choix que de pelleter ces coûts dans la cour des générations futures.
Avouez que c’est fort ! Vous n'êtes actionnaire d’aucune de ces entreprises, vous n’avez droit à aucun dividende ou plus-value, aucun mot à dire dans leur gestion, et c’est pourtant vous et vos enfants qui allez essuyer les plâtres à coups de taxes et d’impôts !
Lorsque les entreprises ont un comportement responsable, c’est un risque qu’on peut vouloir prendre s’il offre en contrepartie des avantages tangibles. Mais dès lors qu’elles ne le sont pas, et elles le sont de moins en moins parce que la concurrence est de plus en plus forte et la recherche du profit de plus en plus difficile, c’est un marché de dupes.
Alors les solutions faciles mises de l’avant par les Lucides et le tandem Legault/Sirois, sont aussi dérisoires qu’illusoires. On ne peut apporter de solutions simples à des problèmes complexes, et ceux qui prétendent le faire ne sont que des charlatans [[Wikipédia définit ainsi un charlatan : un charlatan est une personne qui pratique l'imposture, ou un jeu de dupes envers autrui, grâce à des trucages, des déformations de la réalité (par exemple via l'exploitation de biais cognitif), ou des falsifications, en vue de gagner sa confiance, généralement pour obtenir de l'argent ou tout autre avantage, http://fr.wikipedia.org/wiki/Charlatan]].
Au début de ma carrière j’ai eu la chance de tomber sur un patron extraordinaire, un anglophone, psychologue industriel de formation, qui occupait un poste de très haut niveau dans une grande multinationale. Lors d’une discussion au cours de laquelle je lui faisais part de mes frustrations devant un problème particulièrement délicat qu’il m’avait demandé de résoudre, il m’avait servi cette remarquable leçon de gestion : « The HOW must fit the WHY like a glove ».
Ma traduction : « Il doit y avoir une adéquation aussi parfaite entre un problème et sa solution qu’il y en a entre une main et son gant. »
On ne répond donc pas aux problèmes complexes de société devant lesquels nous nous trouvons avec les recettes-miracles du néo-libéralisme dont sont farcis les manifestes des Lucides et de la CAQ.
Ces solutions sont du trompe l’oeil, de la poudre aux yeux, qui ne visent qu’à obtenir une réduction de la part de l’État dans l’économie, un principe qui semble tout à fait raisonnable jusqu’à ce qu’on réalise qu’il signifie tout simplement faire passer dans la poche d’intérêts privés la richesse qui appartient à la collectivité. Déshabiller tout plein de petits « Pierre » pour habiller quelques riches « Paul », comme Paul Desmarais par exemple...
C’est justement en application de ce principe que Bombardier a pu mettre la main sur Canadair, Sirois sur Téléglobe, SNC-Lavalin sur Les Arsenaux canadiens et Énergie atomique du Canada, pour ne s’en tenir qu’à ces cas.
On mesure mal tout le travail de désinformation et de manipulation qu’il a fallu faire pendant des années pour dissimuler le sens réel de ces transferts de richesse, et conditionner l’opinion publique à les accepter comme une chose toute naturelle.
La concentration de la presse n’avait pas d’autre motivation que celle-là, et les journaux de Power/Gesca, alimentés par des organismes du réseau Desmarais comme l’Institut économique de Montréal travaillent continuellement à créer dans l’opinion des conditions favorables à l’atteinte des objectifs de ces oligarques.
C’est pourquoi il faut s’inquiéter des circonstances dans laquelle est née la CAQ. Il est tout de même remarquable que ce parti, à peine créé, ait pu obtenir une proportion aussi élevée des voix, et si ce n’était de la complaisance des éditorialistes et chroniqueurs de la presse des médias de masse, elle n’aurait jamais été capable d’atteindre un tel résultat.
Ainsi, aucun média n’a souligné le déficit démocratique de la CAQ, pas même Le Devoir dont cela aurait justement été « le devoir ». Faut-il attribuer la complaisance du Devoir à la présence à la tête de son conseil d’administration de Jean Lamarre, ancien haut dirigeant chez SNC-Lavalin et signataire du Manifeste de la CAQ ?[[« Coalition Avenir Québec », Wikipédia, http://fr.wikipedia.org/wiki/Coalition_Avenir_Qu%C3%A9bec]]
Notons aussi que son père Bernard Lamarre siégeait également au conseil d’administration du Devoir avant lui, de même qu’il avait siégé aux conseils d’administration de Téléglobe et de TIW à l’invitation de Charles Sirois. Notons enfin que l’oncle de Charles Sirois siège également au conseil d’administration du Devoir [[http://www.ledevoir.com/le-devoir/direction]].
Songez-y, ce parti n’a aucune assise démocratique. Né de tractations occultes entre Lucien Bouchard – le factoton de Paul Desmarais [[« Desmarais, La Dépossession tranquille », Éditions Michel Brûlé, Montréal, 2012, pp. 69 à 103]] - et François Legault, auxquels est venu se joindre Charles Sirois pour le dédouaner auprès de l’électorat fédéraliste, il s’est ensuite doté d’une plate-forme élaborée par des personnes cooptées sur la base de leur adhésion à la doxa néo-libérale.
Absolument rien de comparable aux laborieux exercices de consultation de leur base auxquels se sont astreints au fil de longues années le PQ et le PLQ. Quelles que soient les critiques qu’on puisse adresser à ces formations, elles répondent au moins aux exigences minimales de l’apparence de légitimité démocratique.
Ce déficit démocratique est grave. Il vicie toute la démarche de la CAQ et constitue un abus de la confiance des Québécois dans la mesure où, convaincus de l’intégrité et de la bonne foi de ses fondateurs, ils n’ont pas accordé suffisamment d’attention aux circonstances de sa formation.
Afin de détourner l’attention de la population de celles-ci, François Legault a profité de l’intérêt que manifestait pour son parti l’ex-policier Jacques Duchesneau pour obtenir de lui un brevet d’honorabilité lorsqu’il lui a permis de scruter avec ses avocats les livres de la CAQ avant de s’y joindre [[« Jacques Duchesneau, visage de la lutte contre la corruption à la CAQ », Florence Meney, Radio-Canada.ca, 5 août 2012, http://www.radio-canada.ca/sujet/elections-quebec-2012/2012/08/05/002-caq-duchesneau-officiel.shtml]].
Encore fixé sur les découvertes qu’il avait faites relativement au financement illégal des partis politiques, il ne s’est pas rendu compte qu’il lui fallait aller beaucoup plus loin dans ses recherches. En politique, la légitimité est aussi importante que la légalité, sinon davantage, comme j'ai déjà eu l'occasion de le signaler dans un ouvrage précédent [[Voir « La prochaine étape – Le défi de la légitimité », Richard Le HIr, Les Éditions Internationales Alain Stanké, 1997.]].
S’il avait fait ce travail, il aurait découvert tout ce dont il a été question tout au long de cet ouvrage, et il aurait compris ce que Paul Desmarais tramait dans l’ombre, derrière tous les écrans qu’il s’applique à dresser pour qu’on ne le voie pas faire. Il aurait alors pu se poser la question en son âme et conscience de savoir s’il était approprié pour lui de se joindre à la CAQ. Ne l’ayant pas fait, il s’expose désormais à ce que son engagement en politique ne soit perçu que comme un acte de pur opportunisme.
Encore un cas où la méconnaissance des sciences humaines aura joué un vilain tour à un politicien. À quelques jours des élections, le philosophe Jacques Dufresne publiait justement sur son site un texte intitulé « De Desmarais en Sirois ». qui contenait justement quelques réflexions à l’intention de Jacques Duchesneau. Mais avant d’y arriver, laissons le philosophe nous rappeler quelques leçons de l’Antiquité classique : « Nous sommes au début du Ve siècle avant Jésus-Christ. Au cours des siècles précédents, la Grèce entière a été la proie d'une poignée de grands propriétaires appelés oligarques. Clisthène, le réformateur, a adopté des mesures efficaces pour empêcher le retour en force de ces oligarques. La principale de ces mesures fut l'ostracisme. Ce mot vient de ostrakon, ''coquille d'huître'', puis "tesson''.
Quand un citoyen estimait que tel ou tel grand personnage avait, de par sa richesse, une influence démesurée dans la cité, il pouvait exiger qu'il soit exilé pour dix ans. Il lui suffisait pour obtenir gain de cause, de convoquer une assemblée et de soumettre son accusation au vote, lequel consistait à inscrire le nom de l'accusé sur un tesson.
Cette loi, hélas ! enfermait un mal du même ordre que la ploutocratie : la démagogie. Elle a dans les faits conduit à des ostracisations injustes, comme celle du sage Aristide. Vue d'aujourd'hui, elle a toutefois le mérite de nous rappeler que dans la première démocratie, la présence physique, le rayonnement immédiat et direct de la personne, la persuasion par la parole vivante avaient une importance qu'ils n'ont plus à l'heure actuelle.
Au Québec, en restant dans les coulisses, le riche faiseur de rois s'ostracise en quelque sorte lui-même, sans rien perdre toutefois de son pouvoir réel. Il pourrait même se retirer dans un autre pays pendant la campagne électorale et conserver tout son pouvoir, surtout s'il est un expert en télécommunications. C'est cette invisibilité qui est le problème. Au Québec toujours, tout le monde connaît le pouvoir qu'a exercé Paul Desmarais notamment sur les partis libéraux québécois et canadiens. [...]
Tous les électeurs québécois savent que le PQ est proche des syndicats. Il n'a, par contre, presque jamais été question de M.Charles Sirois, co-fondateur de la CAQ, dans la présente campagne électorale. Il est rentré dans les coulisses et c'est précisément de cela qu'il faut s'inquiéter.
S'il avait choisi les armes de la parole et de la présence réelle en se présentant dans un comté, on saurait tout sur ses affaires personnelles, on lui aurait même demandé de rendre ses rapports d'impôts publics, comme on l'a fait pour Mitt Romney. Il est encore temps d'informer les électeurs à son sujet.
C'est un article du document un « Québec Responsable », dont s'est inspirée l'Action démocratique à ses premières heures, qui m'incite à participer à cette opération lucidité : « L’intégrité va plus loin que la simple exigence de voir les personnes en politique s’abstenir de manipuler les fonds publics : elle suppose que l’on dise les choses comme elles sont.
Cette notion dépasse aussi l’obligation de transparence dont on charge les hommes et les femmes politiques; elle suppose que l’on s’oblige collectivement à plus de lucidité ». (Que reste-t-il de cet esprit dans le parti co-fondé par Charles Sirois? Le Journal de Montréal vient de publier un article sur les dons faits aux trois principaux partis politiques depuis 2001 par 20 personnes accusées de corruption ces dernières années : dons au PLQ 183 435 $, au PQ : 38 270 $, à l'ADQ : 39 800 $. Total : 261 505 $).
Je précise d'abord que je n'ai rien contre l'entreprise privée, ni contre la réussite en affaires. Je n'ai que de l'admiration pour des entrepreneurs comme Armand Bombardier. Quand j'ai vu apparaître François Legault en tant que chef de parti, sa réussite en affaires me semblait devoir être mise à son crédit.
Jusqu'au jour où j'ai appris comment il avait encaissé ses premiers millions : en vendant ses actions d'Air Transat sans avertir ses partenaires. Il s'enrichissait ainsi lui-même et appauvrissait ses partenaires, et cela dans une conjoncture très difficile pour l'entreprise. Denis Lessard a résumé ainsi cet épisode dans le journal La Presse du 26 février 2011 :
« À 29 ans, il a emprunté 50 000 $ pour lancer l'aventure Transat, avec Jean-Marc Eustache et Philippe Sureau. La compagnie a rapidement décollé. En 1997, rien n'allait plus. Il a claqué la porte et vendu ses actions sans même prévenir ses deux associés, une hérésie dans le milieu des affaires. ''J'ai eu un différend avec eux, la convention d'actionnaires était terminée, j'avais le droit de vendre'', a-t-il dit. »
Vient ensuite le passage où Dufresne interpelle Jacques Duchesneau : « Avis aux partenaires actuels de monsieur Legault, à monsieur Duchesneau en particulier. Avant d'entrer en politique aux côtés de François Legault, monsieur Duchesneau a scruté à la loupe les livres du parti, la CAQ. Indice de pureté : 100%. Mais quel indice de loyauté monsieur Duchesneau aurait-il accordé à son chef s'il avait fait entrer l'opération Air Transat dans son champ d'examen ?
Monsieur Duchesneau s'est sans doute aussi interrogé sur les raisons pour lesquelles le parti, lancé dès février 2011 par François Legault et Charles Sirois, a attendu jusqu'au 4 novembre de la même année pour s'enregistrer comme parti politique et se soumettre par là à la loi québécoise du financement des partis politiques. Auparavant tout était permis.
On ne saura sans doute jamais quelle fut la contribution de Charles Sirois et de ses amis dans ce contexte, sauf peut-être si, une fois élu, monsieur Duchesneau poussait son devoir d'incorruptible jusqu'à faire enquête sur les origines de son parti.
Le moins qu'on puisse dire c'est que s'il y avait eu des citoyens athéniens de la belle époque dans le premier conseil de la CAQ, monsieur Sirois aurait avalé bien des coquilles d'huitres...
Si Paul Desmarais a exercé une influence démesurée sur le PLQ, s'il a eu l'occasion de le sauver, il n'a pas eu l'honneur de l'avoir fondé. C'est plutôt le PLQ qui, indirectement, a fondé sa fortune, en indemnisant généreusement, au début de la décennie 1960, les actionnaires des compagnies privées d'électricité, lesquelles ont placé un partie de cet argent dans une compagnie appelée Power Corporation, dont Desmarais fit ensuite l'acquisition, dans des conditions qui s'expliquent bien par ses engagements postérieurs.
Charles Sirois en revanche aura l'honneur d'avoir été l'un des co-fondateurs de la CAQ, ce qui lui donnera une redoutable autorité morale. Il aura éternellement droit à la reconnaissance dû au père tout en multipliant les petits gestes d'amitié normaux entre frères. [...]
Mon but ici n'est toutefois pas de faire le procès de l'immorale morale officielle des affaires, laquelle remonte à Adam Smith et à cette main invisible qui fait concourir les calculs égoïstes de chacun au bien commun.
Mon but est de rappeler aux Québécois qu'en passant des libéraux aux caquistes de François Legault, ils iraient de Desmarais en Sirois, allusion à l'expression bien connue, déjà utilisée par La Fontaine, de Charybde en Scylla.
« À l'origine Charybde et Scylla auraient été deux dangers du détroit de Messine, entre l'Italie et la Sicile, le premier étant un tourbillon, le second un écueil. Les marins qui cherchaient à éviter le premier allaient périr en s'écrasant sur le second. »
[[]]
Cette histoire racontée dans l'Odyssée d'Homère a suscité une multitude de commentaires notamment parce qu'elle illustre une situation fréquente dans la vie humaine: une alternative dont les deux branches sont aussi inacceptables l'une que l'autre. » [[« De Desmarais en Sirois », Jacques Dufresne, Encyclopédie de l'Agora, 29 août 2012, http://agora.qc.ca/documents/de_desmarais_en_sirois]]
Lorsqu’on y regarde de près, la situation politique du Québec est grave. Deux des trois formations politiques à se partager 90 % du vote dans des proportions comparables ne disposent pas de la légitimité démocratique requise pour mériter le soutien de l’électorat, le PLQ parce qu’il s’est montré indigne de leur confiance, et la CAQ parce que son action se trouve viciée ab initio [[Locution latine qui signifie « depuis le début ».]] , comme on dit en droit.
Si cette référence au droit est pertinente, c’est qu’il existe un contrat moral entre un parti politique et la population qu’il demande à représenter. Et ce contrat, comme tous les autres contrats, se trouve à être invalidé par des fausses représentations qui, en l’espèce, se trouvent à tromper l’électorat sur la véritable identité des intérêts qu’il va servir.
Alors que la population s’imagine que la CAQ va servir ses intérêts, on découvre ici qu’elle est en fait commise à servir des intérêts particuliers.
Et le fait qu’elle soit parvenue à faire tout de même élire 19 députés sur les 125 que compte l’Assemblée Nationale ne constitue pas pour elle un commencement de légitimité. Ces sièges, elle les a acquis sous de fausses prétentions.
Dans le système parlementaire, c’est l’opposition qui interpelle le gouvernement. Celui-ci n’est donc pas dans une position pour faire ressortir cette situation, sauf de manière très indirecte.
Dans un système où les médias jouent leur rôle, c’est eux qui doivent le faire. Manifestement, ils ne l’ont pas fait. Il revient donc aux citoyens de prendre l’initiative, et c’est ce qu’ils font dans un site comme Vigile.net.
Au plaisir de vous y rencontrer.
Charles Sirois, l’homme derrière François Legault
La CAQ, un parti illégitime !
Conclusion
M. Duchesneau, avez-vous quelque chose à dire pour votre défense ?
Richard Le Hir673 articles
Avocat et conseiller en gestion, ministre délégué à la Restructuration dans le cabinet Parizeau (1994-95)
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9 commentaires
Archives de Vigile Répondre
14 mars 2013Merci pour cette réflexion. Il est triste que ces analyses
ne soient pas plus publiées à
grande échelle.
Quand allons-nous comprendre que le vrai pouvoir c'est celui
qui contrôle l'information?
Il faudrait investir dans Gesca et en prendre le contrôle et le démanteler.
Pablo Lugo Herrera Répondre
14 mars 2013En fait, la CAQ est une bonne nouvelle pour le Québec. Elle fait possible que les Libéraux et les Péquistes ne soient pas majoritaires et on peut connaitre les vrais cons — des sympathisants — de notre Société lorsqu'ils iront voter, comme on connait aussi les corrompus et les faux souverainistes!
Archives de Vigile Répondre
13 mars 2013http://voltigeursdequebec.net/regiment.html
Le roi se donne les moyens de se protéger advenant une révolte du peuple.
Sirois, Legault, Bouchard, Charest et la longue suite des fidèles serviteurs du Roi ont aussi de quoi se défendre si jamais les Québécois cessent de croire en les mensonges qui nous viennent de Sagard.
Rappelons-nous l'affaire Michaud. Ce dernier a tenté de révéler ce qui se tramait sous la cape de Power Corporation. Bouchard et Desmarais se sont chargés de le faire taire.
J'ose espérer que Vigile deviendra assez fort pour protéger des hommes comme Monsieur Le Hir.
Saurons-nous être suffisamment courageux et inspirés pour prévenir une répétition de l'histoire ?
L'information que révèle Monsieur Le Hir, nous donne une autre occasion de sortir la tête du sable et d'agir intelligemment.
D'ici là, la question clé est bien de savoir : "What type of glove do we need to fit the current invisible hand, called Gesca ?"
Archives de Vigile Répondre
11 mars 2013Bien que n'ayant pas encore lu, ne serait-ce qu'une partie de votre livre, je serais très surpris que vous n'expliqueriez pas comment on fait pour voler ou entrer sans effraction dans nos sociétés d'état.
Une phrase suffit: déresponsabilisation, porte ouverte. J'expliquais dernièrement au ministre de la santé du Québec
comment il se fait que les citoyens n'ont pas de médecins de famille.
Quand on a mis en place les CLSC, c'était pour que tout le monde aille au CLSC avant de se présenter à l'urgence à l'hôpital. Mais l'État s'est déresponsabilisé en ne donnant
qu'un personnel réduit avec des heures réduites qui ne répondaient pas aux besoins de la société.
Était-ce volontaire pour laisser une place au privé qui bien sûr s'accapare toujours d'une place laissée vacante?
Je le crois.
S'il y avait des médecins dans les CLSC avec des heures d'ouverture de 18h sur 24, 7 jours sur 7, tout le monde aurait son médecin de famille.
C'est comme si on ne barrait pas une porte afin qu'un voleur puisse entrer. Et pire, on lui donne la clef.
Je vous soupçonne d'être trop brillant pour ne pas avoir compris le manège de nos libéraux corrompus.
J'ai hâte de voir vos exemples.
Lise Pelletier Répondre
11 mars 2013Monsieur Le Hir, merci encore d'être avec nous.
Les dommages collatéraux de cette folie du cash à tout prix sont nombreux. Les Peuples sur cette terre en sont les victimes et particulièrement les enfants, les plus faibles de tous. La faim des uns pour l'argent n'a d'égale que la faim des tout-petits.
Aujourd'hui nous apprenons le suicide d'un M. Rousseau suite à un interrogatoire par l'UPAC. Tous ne sont pas faits pour vivre avec les conséquences de leurs actes.
Quelques-uns plus retors savent se servir d'eux pour les corrompre. Et eux sont les psychopathes et on peut ajouter sociopathes étant donné leurs incapacités à l'empathie envers ceux qu'ils briment dans leurs besoins fondamentaux.
On en a connu un au Québec durant les 9 dernières années, ce qui fut évident durant le conflit étudiant. Un homme qui a ôsé RIRE d'eux avec sa clique d'affairistes pendant qu'à l'extérieur eux subissait la brutalité policière.
Tant à dire et à faire pour que l'humanité reprenne ses droits.
Lise Pelletier
Archives de Vigile Répondre
11 mars 2013Je me voudrais d'également souligner les liens entre Charles Sirois et Claude Blanchet, mari de Pauline Marois, au sein de la compagnie iPerceptions Inc.
http://www.vigile.net/Le-Bon-la-Brute-et-le-Truand
http://affaires.lapresse.ca/economie/200901/06/01-690979-le-retour-de-claude-blanchet.php
Ou encore entre ce même Claude Blanchet et Robert Campeau, autre filière remontant à Desmarais.
Il semblerait donc que l'emprise de Power Corp sur la politique québécoise soit encore plus large que les seuls PLQ/CAQ. Ce qui apporte une explication des plus logiques et plausible dans le comportement des plus illogiques du PQ depuis qu'il est au pouvoir.
Serge Jean Répondre
11 mars 2013Bonne journée à vous monsieur Le Hir.
Trois lys d'or, pour cet excellent travail de sarclage du jardin de notre peuple. Vous êtes un vrai berger qui travaille pour le bon maître; la vérité qui affranchit.
Serge Jean
Archives de Vigile Répondre
11 mars 2013Ahhh, je suis persuadé que si Platon revivait à notre époque, il écrirait à nouveau tout comme il l'a fait à son époque il y a plus de 2500 ans que la "gouverne de la cité doit être confiée à des sages" et il faut lire dans sages les philosophes, les intellectuels, les savants, mais surtout pas et jamais dans cent ans les gens d'affaires ayant trop de conflits d'intérêts par rapport à la gouverne de l'État.
Les gens d'affaires devraient tout simplement être exclus de facto du droit de faire de la politique partisane, tout comme du droit de faire du lobby auprès de la classe politique. Entre le monde des affaires et le monde de la politique il devrait y avoir une chasse gardé étanche tellement le mélange des deux est aussi incompatible que le mélange de l'huile par rapport à l'eau.
Normand Perry.
Archives de Vigile Répondre
11 mars 2013Mes respects Monsieur Le Hir, GRAND PENSEUR
J'aurais aimé écrire la conclusion que vous donnez à lire aux Vigiliens-nnes en ce jour quant à la terrible folie qui habite les hommes de pouvoir sans oublier les femmes bien sûr.
Au fait si je prends la plume en ce moment à la suite de cette décisive conclusion au livre à paraître sur tous ces potentats qui aspirent à gouverner le Québec que sont tous les Sirois-Desmarais ou Legault de ce monde c'est tout simplement pour ajouter à votre connaissance ce particulier bouquin presque secret qui est des plus éclairants en la matière ici soulevée. Ce livre a été publié au début des années '90 de la main de cet autre penseur qu'est Maurice Berger. La référence à ce livre des plus précieux mais peu connu dans notre monde intellectuel est la suivante.
Titre: La Folie cachée des hommes de pouvoir
Auteur: Maurice Berger
Éditeur: Albin Michel, 1993
ISBN: 2226066128, 9782226066121
Longueur: 162 pages
Ce livre est tellement éclairant que je me permets ici même de le transférer à qui bon me le demanderait ou voudrait se le procurer. Je l'ai en PDF!
C'est parce qu'il y a péril en NOTRE demeure et en raison de la dérive psychiatrique dont est au prise tout le Québec par la très grave déraison de trop nombreux de nos gouvernants et ou de ceux qui aspirent à l'être depuis des siècles qu'il nous faut tous et toutes mettre l'épaule à la roue de la conscience renouvelée et partagée.
Définitivement Monsieur Le Hir ce qui se cache derrière ces aspirants gouvernants et ou leurs coreligionnaires n'est que pure FOLIE comme le décrit parfaitement bien Maurice Berger dans ce magnifique bouquin de 162 pages seulement.
Aux armes citoyens! Il faut élever la conscience de nos compatriotes au plus pressant car la PATRIE du Québec est en danger entre les mains de tous ces fous du pouvoir. Ces armes sont au bénéfice de la connaissance nécessaire qui elle est historique. Nous nous devons de décrire ce phénomène de violence collective alors que les peuples n'en savent que trop rien mais en subissent la déchéance puis la décadence de notre civilisation.
ECCE HOMO !