La faute des autres

L'instrumentalisation électoraliste du chaos social provoqué.



Vendredi soir, pendant que les manifestations les plus violentes depuis des décennies se déroulaient à l’extérieur de l’hôtel où étaient enfermés les délégués au conseil général du PLQ, le premier Charest accusait Pauline Marois de ne pas avoir le sens des responsabilités qui est nécessaire pour gouverner le Québec.
Mme Marois a peut-être manqué de jugement politique en adoptant le carré rouge, qu’il était facile d’associer à la violence, mais la question qui était sur toutes les lèvres et qu’un militant a finalement posée à Raymond Bachand samedi était la suivante : pourquoi avoir attendu si longtemps pour négocier avec les associations étudiantes ? Devant les délégués, le ministre des Finances a habilement esquivé la question, mais son collègue de la Justice, Jean-Marc Fournier, a grimpé dans les rideaux quand un journaliste l’a reprise, l’accusant de prêter de sordides intentions au gouvernement. Son indignation ressemblait étrangement à de l’embarras. Plutôt que de faire une scène, il aurait mieux fait de trouver une explication.
Il y a trois mois, le PLQ semblait se diriger tout droit vers une cuisante défaite. À voir la remontée du PLQ dans les sondages au fil des semaines, M. Fournier ne devrait pas s’étonner qu’on s’interroge sur les raisons qui ont pu amener le gouvernement à laisser pourrir le conflit.
Hier, le premier ministre Charest a soutenu que le gouvernement avait tendu la main aux étudiants à plusieurs reprises, mais que cette main n’avait pas trouvé preneur. Dans ce cas, son devoir n’était-il pas de « convoquer » les associations étudiantes, comme il l’a finalement fait vendredi, à quelques heures de l’ouverture du conseil général ?
Quant à la soudaine réhabilitation de la CLASSE, alors qu’il reprochait précisément à Mme Marois d’y voir un interlocuteur légitime, sa distinction entre l’ASSE et la CLASSE était pour le moins oiseuse. Son principal porte-parole, Gabriel Nadeau-Dubois, n’était pas assis à la table de négociation, a ensuite plaidé le premier ministre. N’importe quoi.
Bien entendu, les associations étudiantes et leurs alliés syndicaux sont les seuls responsables du grabuge de vendredi, tandis que le gouvernement doit être félicité pour avoir épargné le pire à la métropole en se réfugiant dans les Bois-Francs. Bref, tout est de la faute des autres.
***
Espérons que le compromis intervenu permettra de sauver la session, mais il n’est pas évident que les étudiants achèteront d’emblée ce qui ressemble à une autre « patente à gosses » aux résultats bien incertains.
La présidente de la FEUQ, Martine Desjardins, soutient qu’il sera facile de réaliser les économies qui permettront, année après année, de compenser la hausse des droits de scolarité. La ministre de l’Éducation, Line Beauchamp, a paru plus sceptique. Il n’y a aucune garantie, a-t-elle dit. « On est curieux de savoir comment les étudiants pensent y arriver […] Si on trouve des économies, tant mieux », a renchéri M. Charest.
D’ailleurs, s’il suffisait de faire le ménage dans les budgets des universités, était-il bien responsable de créer un psychodrame et de prendre un tel risque avec la paix sociale ? On ne vient tout de même pas de découvrir le goût des administrations universitaires pour les voyages et les primes ! Les discussions qui auront lieu au nouveau Conseil provisoire des universités (CPU) pour déterminer ce qui constitue une dépense excessive promettent d’être passablement animées.
Il est quand même remarquable qu’après avoir justifié par le sous-financement des universités une hausse des droits qui a provoqué une crise aussi aiguë, on tente maintenant de la régler en leur renvoyant la facture.
***
Élections ou non ? m’a demandé hier un délégué, dubitatif, après le discours de clôture du premier ministre Charest. En conférence de presse, ce dernier a assuré qu’aucune élection n’était « programmée » en juin. Le problème est qu’on a de plus en plus de mal à le croire, même quand il dit la vérité.
De toute manière, le temps risque de lui manquer. Il faudra encore quelques jours avant de savoir si l’« entente » de samedi mettra réellement fin à la crise et il n’en reste plus que neuf pour déclencher des élections qui auraient lieu avant la Saint-Jean-Baptiste.
Chose certaine, on ne sentait pas à Victoriaville la frénésie électorale qui avait caractérisé les conseils généraux de février 2007 et d’octobre 2008. Malgré une finale un peu plus appuyée que vendredi soir sur les risques d’une nouvelle aventure référendaire, on ne peut pas dire que M. Charest ait cherché à faire exploser la salle.
Quel que soit le moment où les élections auront lieu, il a assuré qu’il sera de nouveau à la tête des troupes libérales. S’il le dit…


Laissez un commentaire



Aucun commentaire trouvé

-->