La liberté telle que conçue par Gil Courtemanche

Tribune libre

Dans Le Devoir du 10 octobre, Gil Courtemanche a fait publier un texte sur les comportements excessifs des artistes comme Rimbaud, Baudelaire, Malraux et Warhol, envers qui certains penseurs sont prêts à tout pardonner, selon lui. Son texte aborde l’arrestation de Roman Polanski en sol suisse pour nous exposer sa pensée à ce sujet. Il critique sévèrement les philosophes Alain Finkelkraut et Bernard-Henry Lévy qui sont censés être, à ses yeux, des défenseurs ardents et pointilleux de la justice ainsi que de la vertu.
Il nous signale qu’Alain Finkelkraut «y est allé d’une incroyable sortie soutenant que la victime, Samantha Geimer, n’était pas vraiment une jeune fille, puisqu’elle posait en tenue légère pour des magazines masculins.» M. Courtemanche nous rappelle que Mme Geimer n’avait que treize ans au moment de l’agression.
En ce qui concerne Bernard-Henry Lévy, M. Courtemanche nous explique qu’il a «simplement reconnu que ce n’était qu’une simple erreur de jeunesse et que si la justice californienne était intelligente, elle se préoccuperait de crimes plus sérieux.» M. Courtemanche s’indigne en posant la question suivante : «Depuis quand le viol d’une jeune fille de treize ans n’est pas sérieux en France?»
Pour enfoncer le clou de sa livraison bricolée à la hâte - semblable à celles d’un ancien directeur de son journal - M. Courtemanche y va d’un amalgame hétéroclite en mettant dans le même panier Roman Polanski et Pierre Falardeau: «Nous tolérons facilement que le regretté Pierre Falardeau traite de «charogne» feu Claude Ryan quelques heures après sa mort. Cela faisait partie du style du polémiste et de l’artiste. Cela faisait partie de sa personnalité. On n’aurait jamais pardonnée qu’un adversaire politique emploie les mêmes termes. L’artiste est plus libre que les autres.»
Or, il appert que M. Courtemanche n’a pas très bien étudié son sujet. Falardeau n’a pas utilisé le mot charogne pour décrire Claude Ryan suite à sa mort. Il a employé la formule «Salut pourriture» en guise d’adieu à l’endroit de l’épouvantail du NON de 1980. Que ce soit quelques heures après sa mort ou quelques années après n’y change rien. Si les propos de M. Falardeau se situaient hors du registre bien limité de la conception de liberté d’expression de M. Courtemanche ou s’ils ont été choquants pour certains, ils ne le furent pourtant pas pour beaucoup, dont je suis.
Tout ça dépend de quel côté de l’équation on prend place et je pense que ça a tout à voir avec le fait que ce souverainiste défroqué - devenu citoyen du monde depuis son éblouissement trop prolongé par les rayons du soleil plombant sur la surface ondulante de sa piscine de Kigali - est un sympathisant de Québec solidaire qui, à l’image de son médium politique, font beaucoup dans la dentelle gaugauche ésotérique pour ce qui en est de leur concept fumeux de la laïcité qu’ils veulent ouverte, de même que leur position religieuse contradictoire portant sur l’appui au port du voile dans les services publics et leur opposition au crucifix à l’Assemblée nationale.
Pour revenir à mon propos, Trudeau a déjà qualifié Bourassa de mangeur de hot dog, ce qui est semblable à quelqu’un qui en décrit un autre comme étant une pourriture ou une charogne. Ceci démontre suffisamment que dans l’arène politique comme dans toute sphère de combat, le choix des mots d’un pamphlétaire fait partie de ce qu’il est convenu de désigner comme étant l’arsenal de la libre expression.
Puisque M. Courtemanche s’est permis d’amener le mot charogne sur le tapis, je lui propose que c’est un mot beaucoup plus approprié pour désigner feu PET - qui a suspendu le habeas corpus en octobre 1970 - ayant fait arrêter et emprisonner des centaines de Québécois pour les humilier et ce, strictement à cause de leurs convictions politiques.
Un pamphlétaire qui déciderait d’utiliser le mot charogne pour décrire Trudeau sur son lit de mort ne pourrait, en aucune circonstance, être comparé à un violeur d’une fille de treize ans.
Dans un autre ordre d’idées, M. Courtemanche vient tout juste de réaliser que notre spécialiste du baillon, John James Charest, «est passé maître dans l’art d’éviter les vrais débats». Il nous précise que «c’est dans la catégorie de l’esquive qu’il faut classer la loi 16 qui vient rendre encore plus brumeux le débat sur la laïcité de l’État et qui évidemment relance la perverse spirale des accommodements raisonnables.»
À l’instar des deux ténors de QS, M. Courtemanche a été parmi les premiers à encenser et à endosser, sans trop le questionner, le rapport du duo historico-religieux Bouchard-Taylor qui dénonçait déjà le supposé braquage identitaire des Québécoises et des Québécois de souche face à la diversité religieuse et culturelle des nouveaux arrivants assimilés à l’autre pays et ce, avant même le début de leurs audiences.
Les recommandations de ce duo bien assorti nommé Bouchard-Taylor, engagés et payés par Mainssales Surlevolant, furent formulées dans la perspective de nous amener béatement à nous soumettre à la diversité ethnique en expansion rapide s’imposant d’Ottawa, de même qu’à des pratiques religieuses étrangères à nos coutumes. Tout ceci assorti d’une autre ingérence canadian visant à faire passer par la porte de derrière des droits religieux primant sur les droits individuels et collectifs dans la sphère publique.
La majorité des citoyens attachés à un Québec moderne et indépendant exigent la laïcité, point à la ligne. La laïcité suivie d’un qualificatif n’est tout simplement pas la laïcité. Au lieu de demander aux Québécois de s’adapter à la diversité, je suis de ceux qui pensent que c’est la diversité des ethnies qui doit s’adapter à nous qui sommes majoritairement les hôtes bien réels sur notre territoire du Québec.
Lorsque M. Courtemanche se trémousse en s’exclamant que c’est la loi 16 «qui vient rendre encore plus brumeux le débat sur la laïcité de l’État qui relance la perverse spirale des accommodements raisonnables», il ne fait qu’exprimer la frustration des bien-pensants de l’intégrisme interculturel sans réciprocité qui, comme lui, la ministre de la démission culturelle Christine St-Pierre, ainsi que sa collègue la ministre de l’immigration et de l’anarchie culturelle Yolanda James, ont en commun le mépris pour tous ceux qui résistent à l’assaut assimilateur multiculturel à sens unique qu’on nous présente comme un bienfait d’ouverture interculturelle.
On nous demande de s’ouvrir pour nous préciser qu’on doit se la fermer pour ne pas déranger nos visiteurs non intégrés qui se parlent entre eux en utilisant la langue du maître d’Ottawa. Les bien-pensants de l’intégrisme étranger pensaient pourvoir se couler des jours plus doux après les trop nombreuses années de travail de sape de l’équipe des assimilés de Crapet Charest, secondés par Bouchard-Taylor.
Ils se sont bernés, croyant que leur discours d’ouverture à sens unique passerait chez la majorité des Québécoises et des Québécois, ces agents d’Ottawa qui ont trouvé leur trou en tant que serfs bien placés sont déçus parce que malgré leurs efforts bien graissés et commandités par Ottawa, les résistants à l’assimilation s’articulent à nouveau avec le retour du débat sur les accommodements déraisonnables soulevé par le projet de loi 16, un véritable cheval de Troie.
Ils ont encore sous-estimé la résilience et la résistance traditionnelle de notre peuple face à l’envahisseur anglais et à ses invités venus nous dicter ce vivre-ensemble aliénant depuis plus de deux-cent-cinquante ans.
Vive Hérouxville!
Daniel Sénéchal
Montréal


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