La parade improvisée des porte-parole des différents partis souverainistes à la clôture du congrès de la Convergence nationale n’a abusé personne. Le camp fédéraliste n’a pas à s’en faire : ils continueront à s’entre-tuer avec la même ardeur.
La veille, le nouveau président de Québec solidaire (QS), Andrés Fontecilla, avait administré une douche froide aux participants à un atelier qui explorait les possibilités d’une quelconque entente électorale, en concluant son intervention par une autre de ces diatribes anti-Parti québécois qui sont devenues la règle à QS. Ses propos étaient si déplacés dans les circonstances qu’un membre de son propre parti l’a poliment rappelé à l’ordre.
M. Fontecilla a au moins eu le mérite de donner l’heure juste, qualifiant de « bricolage mathématique » la tenue de « primaires » qui permettraient de présenter un candidat souverainiste unique dans certaines circonscriptions. Selon lui, les programmes de QS et du PQ sont trop différents pour permettre des alliances durables. « Implicitement, on nous appelle à faire des primaires uniquement pour donner une majorité au PQ », a-t-il ajouté.
Il est vrai que, même en ouvrant les primaires aux simples « sympathisants », la formule avantagerait le parti qui compte le plus grand nombre de membres, c’est-à-dire le PQ, mais elle favoriserait surtout une dynamique axée sur la question nationale, alors que QS privilégie l’axe gauche-droite.
Le chef d’Option nationale, Jean-Martin Aussant, avait jugé plus utile de participer à la 9e édition des Journées africaines. Cela lui a surtout évité d’afficher son intransigeance. M. Aussant se dit prêt à une alliance ou même à une fusion avec des partis qui se montreraient « férocement » souverainistes, mais personne ne semble l’être suffisamment à son goût.
Le ministre du Tourisme, Pascal Bérubé, s’est tout au plus engagé à rapporter en haut lieu ce qu’il avait entendu au congrès. Il a dit « souhaiter qu’on puisse continuer à échanger ensemble ». Encore faudrait-il commencer par dire quelque chose, ce dont il s’est bien gardé. Au moins, il n’a pas répété l’appel au sabordage des autres partis lancé par la première ministre Marois. On peut toujours y voir un progrès.
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Accepter de s’enfermer dans un amphithéâtre pendant deux jours pour discuter de convergence suppose une certaine ouverture à l’idée. Ceux qui s’y opposent catégoriquement ne s’étaient pas donné la peine de se déplacer. Si bon nombre de membres de QS ne veulent rien savoir du PQ et vice-versa, le désir d’unité semble nettement plus fort au sein de la base militante, où les considérations partisanes (et les ambitions personnelles) sont moindres, qu’à la direction des partis, où les calculs électoraux sont prépondérants, mais qui se soucie de ce que pense la base ?
La liste des difficultés de tous ordres que pose l’organisation d’une primaire est déjà suffisamment longue sans qu’on en rajoute. Sur le plan de la mathématique électorale, la circonscription de Laurier-Dorion, où les trois partis souverainistes réunis ont totalisé 9 points de plus que le libéral Gerry Sklavounos le 4 septembre 2012, semble toute désignée pour tenter l’expérience d’une primaire, mais c’est aussi la circonscription où M. Fontecilla était déjà candidat avant la création de QS. Au départ, cela n’est pas de nature à faciliter la discussion.
Il y a d’autres circonscriptions qu’il serait peut-être possible d’arracher aux libéraux. Ainsi, dans Verdun et dans Saint-Henri -Sainte Anne, les votes recueillis par les candidats souverainistes ont excédé de 7 points ceux d’Henri-François Gautrin et de Marguerite Blais.
Bien entendu, le report des voix sur un candidat unique ne serait pas automatique. Les attaques auxquelles se livreront les candidats à la primaire risquent même de renforcer les antagonismes. On a cependant calculé qu’aux dernières élections, un report de seulement 40 % dans une dizaine de circonscriptions aurait assuré l’élection d’une majorité de députés souverainistes.
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Cela suppose toutefois que le vote fédéraliste demeure aussi divisé. Une candidature souverainiste unique pourrait avoir pour effet de précipiter une bonne partie des électeurs de la CAQ, qui sont majoritairement fédéralistes, dans les bras du PLQ.
La formule des primaires va à l’encontre de la plus large diversité de l’offre politique que souhaitent les partisans de la proportionnelle, mais une réforme du mode de scrutin favoriserait l’élection d’une majorité de députés fédéralistes à l’Assemblée nationale.
D’un point de vue souverainiste, la proportionnelle n’a d’intérêt qu’après l’accession à l’indépendance et il est de plus en plus évident qu’il ne peut y avoir d’indépendance sans alliance entre les partis souverainistes. Accorder la priorité à la réforme du mode de scrutin, comme le fait QS, risque donc de renvoyer aux calendes grecques aussi bien la proportionnelle que l’indépendance.
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