Questions.
Pourquoi le Centre Intégré Universitaire de Santé et Services Sociaux (CIUSSS) du Nord-de-l’Île-de=Montréal a-t-il décidé de fermer le Centre Hospitalier de Soins de Longue Durée (CHSLD) Louvain à Ahuntsic, alors que des centaines de personnes âgées en perte d’autonomie sont sur une liste d’attente et que des dizaines de personnes âgées du CHSLD Louvain seront dirigées, en 2017, vers d’autres quartiers, Villeray et Montréal-Nord, dans des Ressources Intermédiaires (RI) ?
Pourquoi l’arrondissement Ahuntsic-Cartierville dont la population compte en 2016, plus 134 000 habitants, ayant sur son territoire de nombreux quartiers pauvres et supportant une arrivée massive d’immigrants n’a-t-il pas dans ses districts une équipe de soutien psycho-social pour les personnes qui vivent une situation personnelle qui exige une intervention rapide ? Pourquoi les gens de Cartierville doivent-ils aller à Saint-Laurent ? Pourquoi les résidants d’Ahuntsic doivent-ils se rendre à Montréal-Nord ?
Pourquoi, lors des inondations du printemps plus de 80 patients de l’Institut Prévost (CIUSSS du-Nord-de-l’Île-de-Montréal) ont été hébergés dans deux gymnases de l’Hôpital Rivières-des-Prairies alors que les bénéficiaires du CIUSSS de-l’Ouest-de-l’Île de-Montréal se retrouvaient dans d’autres ressources d’hébergement sans avoir à vivre dans un gymnase ?
Connaissez-vous une ville de 134 000 habitants avec des problèmes sociaux majeurs et l’arrivée importante de migrants qui se retrouve avec un absence de services de soutien psycho-social alors que deux ministres du gouvernement Couillard sont les ministres de ce territoire (Marie Montpetit et Christine St-Pierre) ?
Toutes ces questions mais surtout toutes ces situations inacceptables originent de la réforme du ministre Barrettte.
La réforme Barrette.
La création des CIUSSS a été pensée par le gouvernement libéral pour centraliser dans les mains du ministre Barrette tous les pouvoirs. De plus, cette réforme est mise en place avec des visées hautement partisanes; ce qui va accroître, selon les territoires, des écarts importants dans la diversité des services offerts aux populations respectives. Ce document se veut une analyse d'une décision concrète : la réforme, en 2015 de l’organisation des services de santé et des services sociaux au Québec, dite réforme Barrette. Ces constats dégagés à l'issu de cette première étude ne peuvent assurément qu'être imparfaits et provisoires. Elle servira, nous l'espérons, à de nouvelles recherches.
La réforme Barrette ne répondait pas à une demande sociale venue de la base mais à la volonté du ministre de la santé et des services sociaux de réorganiser les organismes de santé et de services sociaux en fonction d’une intervention plus directe de son ministère dans l’organisation et l’offre des services de santé et des services sociaux à la population.
Dans le communiqué du ministre Barrette émis le 25 septembre 2015 lors de la présentation du projet de loi, nous pouvons lire que « (...) les changements proposés par le projet de loi ont pour objectif d’assurer une véritable intégration des services, permettant ainsi un parcours de soins plus simple et plus fluide pour les patients ». Ces objectifs déclarés cachent des buts non avoués : mettre son ministère au centre du processus de décision, diminuer l'influence citoyenne dans ce processus et renforcer le secteur privé aux dépens des organismes publics.
La création des cinq CIUSSS sur l'Île de Montréal se fera en tenant compte davantage des gains politiques partisans que de critères socio-sanitaires objectifs. Sur ce plan, Gaétan Barrette agit plus en tant que ministre d'un gouvernement libéral qu'un ministre technocrate soucieux de faire l'effort de rationaliser et d'adapter le domaine de la santé et des services sociaux aux nouvelles exigences créées par l'évolution socio-démographique sur le territoire de l'Île de Montréal. Cette nouvelle répartition n'a fait que déséquilibrer encore plus la redistribution du panier de services qui sera offert à la population montréalaise. Des chances d'accès à de meilleurs services ont été déniées aux populations vulnérables qui se retrouvent majoritairement au sud, au nord et à l'est de Montréal.
De plus, la Loi modifiant l’organisation et la gouvernance du réseau de santé et de services sociaux notamment par l’abolition des régies régionales, sanctionnée le 9 février 2015, permettait ainsi au ministre de faire disparaître un palier de décision (lerégional) et de fusionner l’ensemble des services de santé et et des services sociaux dans des organisations démesurées et tentaculaires sur un territoire donné. Cette hyper-centralisation va aussi faciliter la mise en place d'une gestion autoritaire.
Voyons comment cette réforme se concrétise notamment sur l’Île de Montréal et examinant plus spécifiquement dans les Centres Intégrés Universitaires.
Sur l’Île de Montréal, le ministre crée cinq CIUSSS. Ces nouvelles entités prendront le nom du territoire de Montréal qu’ils desservent : l’Est de-l’Île-de-Montréal, le Nord-de l’Île-de-Montréal, le Centre-Sud-de-l’Île-de-Montréal, le Centre-Ouest-de-l’Île-de Montréal et l'Ouest de-l' Île-de-Montréal.
La réforme Barrette sur l’Île de Montréal : un enjeu partisan.
Même si le principe d’une plus grande rationalité est invoqué pour justifier une telle réforme, le ministre Barrette doit, en tant que ministre du gouvernement libéral, tenir compte d’abord de certaines réalités politiques. Sur ce plan, le ministre d'un gouvernement PLQ, doit répondre aux attentes des alliés naturels de son parti sur l’Île de Montréal : la communauté anglophone et la communauté juive. Ces communautés exigent de continuer à contrôler leurs institutions. Le ministre obéit à cette condition, quitte à mettre en place des établissements dont les populations ne pourront pas être desservies de façon équitable.
Si les partis d'opposition (Parti Québécois, Coalition Avenir Québec et Québec Solidaire) ont critiqué le caractère hyper-centralisateur de cette réforme, aucun des partis n'ont osé dénoncer ou même questionner la répartition des CIUSSS sur le territoire de l'Île de Montréal qui avantageait la communauté anglophone et la communauté juive.
Le découpage politique de l'Île de Montréal en cinq CIUSSS.
Ce fut la loi du silence qui guida nos élus malgré le fait que déjà, au départ, il était clair que, maintenant et pour plusieurs années, des coupures dans les services seront faites surtout dans le nord, l'est et le sud de Montréal parce que la réforme s'est réalisée sur des bases partisanes.
Il a été très difficile d'évaluer précisément le nombre d'habitants sur les territoires. La prétention de desservir une plus grande population devient un enjeu majeur car elle touche la crédibilité et la pertinence du partage des territoires tel qu'accompli par le ministre Barrette. Nous avons utilisé les données du recensement 2016 sur les arrondissements de la ville de Montréal et les autres villes sur l'Île de Montréal que nous retrouvons sur le site web de la ville de Montréal. Nous admettons que ce choix est conservateur puisque, chez les démographiques, on reconnaît qu'un pourcentage de 1 à 2% de la population devrait s'ajouter, en 2016 au 1 942 044, habitants dénombrés par ce recensement. Malgré tout, nous avons retenu la première option car nous l'estimions acceptable puisque de nombreux analystes les utilisent et surtout, elle nous permettait aussi de voir le taux de variation de la population sur 5 ans ( 2011-2016).
Soulignons finalement que les estimations de la population fluctuaient beaucoup. L'Institut de la Statistique du Québec estimait que l’Île de Montréal comptait, en juillet 2016, 2 014 221 habitants. Quant aux cinq CIUSSS, sur leur site web, ils prétendaient desservir, en 2016, au total, plus 1 994 085 habitants. Entre le recensement de 2016 et les chiffres données par les différents CIUSSS, il a un écart de 52 041 résidants.
La répartition de la population entre les cinq CIUSSS est alors avant tout politique, créant des disparités importantes entre les CIUSSS. Selon les statistiques de 2016, les CIUSSS de-l’Est-de-l’Île-de-Montréal et du Nord-de-l’Île-de-Montréal ont respectivement les territoires les plus populeux: 510 710 habitants (26,3 % de la population) et 427 690 résidants (22 % de la population). Ensemble, ils devront desservir près de la moitié de la population montréalaise. Actuellement en 2017, ces deux CIUSSS auraient sur leur territoire : le nord (538 390 habitants) et l'est (436 000 résidants). L'addition des deux populations donne 974 390 personnes, soit près de 49 % de la population totale sur l’Île de Montréal. La très grande majorité de la population deux CIUSSS sont des francophones et un nombre très important de personnes des communautés ethniques.
Dans le cas de la réforme des institutions de santé et des services sociaux, en 2016, la communauté anglophone contrôle le CIUSSS de-l’Ouest-de-l’Île-de-Montréal sur un territoire habité par 357 490 personnes (18, 4 % de la population), dont les villes de Pointe-Claire, Dollard-Des-Ormeaux, Beaconsfield, Kirkland, Dorval, Ste-Anne-de- Bellevue, Baie d'Urfé et Senneville. Ces cités, qui ont connu un léger déclin démographique entre 2011 et 2016, régressant de 149 241 à 148 441 habitants, soit un taux négatif de -0,5%., sont majoritairement florissantes. Les huit villes ont, toutes, un revenu familial avant impôts très supérieur à celui de l’agglomération de Montréal (52 519 $). La moyenne du revenu familial médian des huit villes se chiffre à 95 611 $ (Annexe 1). Leurs résidants représentent 41,5% des citoyens sur le territoire du CIUSSS. Les arrondissement de Lasalle, Lachine, Pierrefonds-Roxboro et l'Ile Bizard et Ste-Geneviève s'ajoutent aux villes et leur population totale a augmenté, entre 2011 et 2016, de 202 399 à 209 052 résidants pendant cette période. Cette addition de 5 853 personnes permet finalement un taux de croissance de 1,7% de la population sur le territoire du CIUSSS de l’Ouest-de-l’Île-de-Montréal. Les habitants de ces arrondissements ont, tous, un revenu familial médian plus élevé que celui de l’agglomération de Montréal. La moyenne de revenu familial médian est estimé à 64 063 $. (Annexe 1)
Le CIUSSS du Centre-Ouest de-l’Île-de-Montréal occupe un territoire dont la population est de 351 080 (18,1 %) personnes. De ce nombre, 102 040 personnes vivent (soit près de 30% des habitants sur son territoire) dans les villes de Hampstead, Côte-Saint-Luc, Montréal-Ouest, Westmount et Mont-Royal, avec toutes, un revenu familial médian plus élevé que celui de l’agglomération de Montréal. La moyenne du revenu familial médian des cinq villes est évalué à 101 301 $. La communauté juive administre ce CIUSSS et donne des services aussi aux résidants de l’arrondissement Outremont, celui de Côte-des-Neiges et Notre-Dame-de-Grâce, le quartier Parc-Extension et une partie de l'arrondissement Ville-Marie dont la moyenne du revenu familial médian est évalué à environ 45 550 $ La progression de la population des arrondissements permet au CIUSSS de connaître, entre 2011 et 2016, un taux de croissance démographique de 2,2 %.
À part l’arrondissement Côte-des-Neiges et Notre-Dame-de-Grâce, le quartier Extension et une partie de l’arrondissement Ville-Marie, l’ensemble des populations sur les deux territoires de l’ouest sont bien au-dessus de la moyenne du revenu familial médian de l’agglomération de Montréal..
Finalement, le CIUSSS du-Centre-Sud compte 295 074 résidants (15,2 %). La Direction de la protection de la jeunesse et la Direction régionale de la Santé publique ont été rattachées à ce CIUSSS.
En somme, dans le cas des deux CIUSSS de l'ouest, les habitants de ces villes prospères, souvent en léger déclin démographique (Hampstead, Montréal-Ouest, Kirkland, Beaconsfield, Dollard-Des-Ormeaux, etc) tempèrent ainsi la demande globale de services sociaux et de santé et permettent à ces deux organismes de répondre plus facilement aux besoins de leur population respective, ce qui n'est pas le cas pour les trois autres CIUSSS. Encore aujourd’hui, nous savons qu’il y une corrélation forte entre bas revenus et aggravation des problèmes de santé et problèmes sociaux. Dans un mémoire publié en 2017, et intitulé «La pauvreté et les inégalités sociales, de graves menaces à la santé des population », les directeurs de la Santé Publique de Québec et Montréal affirment clairement que : (…) tous ne sont pas égaux devant la maladie et la mort prématurée. Dans les groupes considérés comme étant au bas de l'échelle sociale, davantage de personnes meurent prématurément ou sont victimes de maladies, d'accidents et d'incapacités. Ces inégalités sociales de santé présentent un problème de santé publique majeur». En 2014, le professeur Léandre Bouffard, de l’Université de Sherbrooke, dans un article titré «Inégalité des revenus et problèmes psychosociaux» affirme, suite à une recension des principales études qui portent sur les coûts de cette inégalité dans le domaine des affaires sociales, que l’inégalité des revenus serait à l’origine de l’aggravation de plusieurs problèmes psychosociaux (santé mentale affectée, alcoolisme et toxicomanie plus présents, décrochage scolaire plus important, délinquance accrue, etc.) que nous retrouvons plus particulièrement chez les familles et les personnes seules à faibles revenus.
En outre, si nous ajoutons à cette corrélation forte entre bas revenus et amplification des problèmes de santé et problème psychosociaux, une croissance démographique plus lente dans l’ouest de l’île de Montréal; à savoir qu’entre 2011 et 2016, ces CIUSSS ont une variation de 2,2 % entre 2011 et 2016, alors les CIUSSS du nord et de l'est de Montréal ont un taux de croissance démographique plus dynamique (plus de 3%), nous nous retrouvons face une réalité explosive, ignorée intentionnellement par le gouvernement libéral, qui accentuera les écarts entre l’ouest de Montréal et ses autres parties.
Ainsi, cette répartition géographique s’explique donc essentiellement par la volonté du gouvernement libéral de satisfaire sa clientèle électorale au détriment des populations les plus pauvres. Dans son histoire politique, ce comportement s'est répété à d'autres moments. Pensons au processus de défusion promis par les libéraux pour maintenir ses appuis chez les anglophones. Dès 2003, le gouvernement Charest, nouvellement élu, fait adopter un projet de loi qui permettra aux villes anglophones (les plus riches) sur l’Île de Montréal de défusionner en 2004.
Une réforme inéquitable.
Une réforme inéquitable qui renforcent les inégalités sociales
Actuellement, nous pouvons affirmer sans l'ombre d'un doute que les CIUSSS de-l’Est de-l’Île-de-Montréal et du-Nord-de-l’Île-de-Montréal ont sur les deux territoires, près de 50 % de la population sur l' Île de Montréal et que le CIUSSS-du-Centre-Sud dessert 15,2 % de la population montréalaise.
Le gouvernement libéral passe sous silence que la minorité anglophone et la communauté juive obtiennent le contrôle de leurs institutions par une redistribution de l'offre de services qui les avantage autant par une clientèle moins nombreuse qu'une population, en moyenne, plus riche et moins problématique que les autres CIUSSS (annexe 1). Encore là, sur le site web du MSSS les données socio-sanitaires entre les différents CIUSSS sur l’Île de Montréal semblent très clairsemées, alors que nous avons accès facilement à des tableaux comparatifs, selon certaines variables, entre les Centres Intégrés de Santé et Services sociaux (CISSS) au Québec. Malgré la rareté des informations sur la prévalence de problèmes psychosociaux entre les différents CIUSSS sur l’ïle, nous avons réussi à retracer quelques données.
Selon les statistiques du MSSS, en 2015-2016, le pourcentage d’enfants négligés selon la Loi sur la Protection de la Jeunesse, représente pour les CIUSSS de-l’Ouest et du-Centre-Ouest seulement 22 % du total alors que cette proportion pour les CIUSSS du-Nord et-l’Est atteint près de 60 % des enfants négligés sur le territoire de l’Île de Montréal. En somme, si les deux CIUSSS du-Nord et de-l’Est doivent desservir la moitié de la population de l’Île de Montréal, elles donnent des services à environ 60 % des enfants négligés sur tout le territoire de l’Île de Montréal (autres exemples : 2013-2014 : 56,5% des hospitalisations suite à un tentative de suicide, 2009-2011 : 59,5% de mortalité infantile, 2014-2015 : 55,9% de personnes dérangées par le bruit de la circulation routière, 2013-2014 : 53% des personnes de 20 ans et plus avec incidence du diabète, etc).
Pour que les deux communautés aient leur CIUSSS, le CIUSSS du-Nord-de-l’Île-de- Montréal doit intégrer les arrondissements Saint-Laurent et Montréal Nord, en plus de se voir confier les quartiers de la Petite Patrie et de Villeray, au sud de l'autoroute 40 (ces deux quartiers étaient desservis par le CSSS du-Coeur-de-l’Île-de-Montréal !!!). Le CIUSSS de-l’Est-de-l’Île-de-Montréal hérite d’une immense territoire qui va de Pointe-aux-Trembles au quartier Saint-Michel, Rosemont et Hochelaga-Maisonneuve en passant par Ville d’Anjou et Saint-Léonard. Quant au CIUSSS du-Centre-Sud-de-l’Île-de-Montréal, sa clientèle est l'une des plus pauvres et des plus âgées sur l'Île de Montréal et est concentrée surtout dans les quartiers Centre-Sud, Saint-Henri et Verdun.
L’objectif premier du ministre Barrette consiste avant tout à mettre en place une centralisation plus poussée des organismes de santé et services sociaux, la disparition d’un palier de pouvoir et la concentration du pouvoir dans ses mains. Sur ces points, la réussite est totale. Cependant plusieurs scénarios avaient été envisagés avant la décision finale. Nous avons retrouvé sur le site du Ministère de la Santé et Services Sociaux, des appellations différentes que celles retenues ultimement. Au départ, pour justifier et rendre acceptable la création de deux CIUSSS dans l'ouest-de-l’Île-de-Montréal, le Ministère conçoit le CIUSSS de-l'Est-de-l’Île-de-Montréal et celui du Centre-Est-de- l’Île-de-Montréal. Cette volonté de contrebalancer l'arrivée de deux CIUSSS à l'ouest, en aménageant deux structures à l'est malmène tellement la réalité socio-économique en faisant disparaître le sud de Montréal que le Ministère abandonne, vers la fin de 2015, l'idée de créer le CIUSSS du-Centre-Est-de-l’Île-de-Montréal (annexe 2) au profit de l'appellation du CIUSSS du-Centre-Sud-de-l’Île-de-Montréal, laissant les deux autres désignations intactes dans l'ouest, soit le CIUSSS de-l'Ouest-de-l’Île-de-Montréal et le CIUSSS du-Centre-Ouest-de-l’Île-de-Montréal.
Les CIUSSS sont des institutions gigantesques avec des conseils d’administration qui ne se réunissent que 6 fois par année. L’offre de services vient directement du ministre et ne peut pas être remis en question par un conseil d’administration dont plusieurs membres sont nommés directement par le ministre. En outre, le nombre trop élevé de membres (19 membres et plus) et le manque de réunions prévues (6 au total) font des conseil d'administration un simple outil pour cacher ce déficit démocratique. En juin 2016, le président, Jean Landry, président du conseil d'administration CIUSSS de l’Est de l’Île de Montréal, démissionnait. Dans sa lettre de démission, il invoquait « (…) que le modèle de gouvernance retenu par le Ministère pour les CIUSSS ne permet pas au conseil d'administration d'exercer son rôle et d'avoir une valeur ajoutée signifiante. Dans les circonstances, je ne vois pas l'intérêt tant pour moi que pour mon CIUSSS de maintenir mon implication ».
De plus, les administrateurs de ces organisations sont, pour la plupart, issus du milieu hospitalier et ont une expérience antérieure dans le champ médical. Ils adhèrent aux valeurs de centralisation et technocratisation des services et une vision médicale des problèmes sociaux.
Conclusion.
En somme, nous avons montré que le découpage des territoires sur l’Île de Montréal ne se réduit aucunement à une rationalité technocratique mais à l'émanation d'une volonté politique précise. La règle bureaucratique basée sur des indicateurs socio-sanitaires objectifs à céder le pas à des influences politiques partisanes et à une certaine forme de marchandage.
Dans le cas concret de la réforme Barrette, réforme venue d'en haut, la condition essentielle pour une réforme équitable se ramenait au fait de permettre aux représentants reconnus des différents éléments marginaux et défavorisés de se faire entendre. Or, cette réforme s'est faite en vase clos au milieu de préoccupations électorales.
Nous prévoyons que la différenciation entre les deux CIUSSS de l'ouest et les trois CIUSSS du nord, de l'est et du centre-sud de Montréal va continuer à s'élargir tant sur le plan des clientèles problématiques qui se retrouveront davantage dans les trois CIUSSS que sur l'offre inéquitable de services à la population. En outre, la plus forte croissance démographique dans l'est et le nord va amplifier ces écarts dans les prochaines années (annexe 3).
Annexe 1
Selon Statistique Canadam: Revenu familial médian 2015 avant impôts
Agglomération de Montréal : 52 519 $
Toutes les villes défusionnées (quatorze villes) à l'exception de Montréal-Est, ont un revenu familial médian qui se situent au-dessus de celui de l'agglomération de Montréal. Toutes ses villes se nichent dans l'ouest, sur les territoires du CIUSSS de-l'Ouest et du CIUSSS du-Centre-Ouest.
Seulement sept sur dix-neuf arrondissements ont un revenu familial médian supérieur à celui de l'agglomération de Montréal. Trois sont localisés dans l'ouest de l’Île de Montréal ( Île Bizard-Ste-Geneviève, Outremont et Pierrefonds-Roxboro). Les 4 autres arrondissements sont établis, un, dans le Nord (Saint-Laurent), deux, dans l'Est (Anjou, Pointe-aux-Trembles-Rivière-des-Prairies) et un autre, dans le Sud (Verdun).
Nous comptons douze arrondissements ayant un revenu familial médian inférieur à celui de l'agglomération de Montréal. Six (Ahuntsic-Cartierville, Mercier-Hochelaga-Maisonneuve, Montréal-Nord, Rosemont-Petite-Patrie, Saint-Léonard, Villeray-St-Michel) sont localisés à l'est et au Nord de l’Île et trois (le Plateau, le Sud-Ouest et Ville-Marie) sont situé principalement au sud de l’Île.)
Seulement trois arrondissements, ayant un revenu familial médian inférieur à celui de l'agglomération de Montréal (Côte-des-Neiges Notre-Dame-de-Grâce, Lasalle et Lachine) sont établis dans les territoire des CIUSSS de l'ouest et du centre-ouest.
Annexe 2
Gazette officielle du Québec 29 avril 2015, 147 ième année.no 17, décret administratif
285-2015 Détermination des conditions de travail de madame Sonia Bélanger comme membre du conseil d’administration et présidente-directrice générale du Centre intégré universitaire de santé et de services sociaux du Centre-Est-de-l’Île-de-Montréal 1211
Annexe 3
TABLEAU COMPARATIF ENTRE LES CINQ CIUSSS SUR L’ÎLE DE MONTRÉAL
CIUSSS POPULATION NOMBRE D'EMPLOYÉS ETC BUDGET
Est 538 390 11 445 1,187 Milliard
Nord 436 000 9 033 927 Millions
Centre-Ouest 360 000 7 225 836 Millions
Ouest 370 000 7 897 830 Millions
Centre-Sud 300 000 11 788 1,224 Milliard
Les territoires du Nord et de l'Est accaparent 48, 6% de la population de l'Île de Montréal alors que ceux du Centre-Ouest et de l'Ouest comptent seulement 36,4% des habitants, soit un différentiel positif 12,2% pour la zone Nord et Est. Notons aussi que les 13 villes les plus riches ont un revenu familial médian très supérieur au revenu familial médian de l'agglomération de Montréal (52 519 $). ces villes représentent près 250 000 des 730, 000 habitants, soit 34,6% de la population des territoires situés dans le centre-ouest et l'ouest de l'Île de Montréal. En ce qui concerne les budgets d'opérations, les CIUSSS du Nord et de l'Est ont 42,3% du budget total des CIUSSS sur l'Île de Montréal alors que les CIUSSS du Centre-Ouest et de l'Ouest en administre 33,3%.
La réforme Barrette et ses conséquences particulières sur l'Île de Montréal
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