Après les commentaires de monsieur Parizeau

Lettre aux aspirants chefs du PQ

Tribune libre

Un orage de réactions a suivi les commentaires récents de monsieur Parizeau concernant sa vision de l’état du PQ. J’ai lu avec un certain pincement, dans de nombreux commentaires, plusieurs allusions à son âge, à son époque. Moi, au contraire, j’ai ressenti un coup de jeunesse dans ses paroles, et ce malgré l’âge et la sagesse.

Et sincèrement, pensons-nous vraiment que le PQ a besoin de quelques jovialistes qui nous diraient encore que tout va bien dans le meilleur des mondes?

Les grands hommes n’ont pas d’âge et on les mesure à leurs grandes idées, à la pérennité de leurs réalisations, à l’actualisation de leurs pensées. Comme s’ils sculptaient la réalité pour lui donner une forme. Une forme utile, au profit du plus grand nombre.

Qu’on le veuille ou non, Jacques Parizeau est déjà inscrit puissamment dans l’histoire du Québec et avec raison. On se souviendra du nom de plusieurs, mais peu auront marqué le Québec moderne autant que lui.

Ceci dit, ses critiques au sujet de son parti, la relative dureté de ses jugements pour nos chastes oreilles, ne devraient avoir qu’un seul effet sur nous tous. Fouetter les troupes et, par-dessus tout, brasser jusqu’à l’os tous les aspirants-chefs à la tête de ce parti trop souvent quasi moribond.

Si on peut certainement contester ou attaquer ses positions, certaines fois peut-être avec raison, si on peut lui trouver des tors et l’attaquer personnellement comme le font certains, on doit quand même trouver la sérénité nécessaire pour se dégager émotivement et ainsi avoir la distance nécessaire pour nous permettre de réaliser, comme lui, que si le PQ est lentement devenu un parti boiteux, et ce depuis de nombreuses années, ce n’est pas par la faute de ses ennemis. Là dessus Parizeau à raison. On l’a laissé se déglinguer ce bon vieux PQ, en le vidant partiellement de son sens. Et ce, sans compter la dénaturation mortifère bouchardienne. Quelle difficile tranche de vie.

Ce ne sont pas les Libéraux qui en sont responsables, ni les Anglais, ni la reine, ni les islamistes, ni la division du vote.

Si le PQ n’a pas réussi à avoir autre chose qu’un vote très minoritaire après 10 ans de merde libérale de John James Charest, après un véritable saccage du Québec, alors que la grogne était à son comble partout au Québec, si le PQ n’a pas fait une vague monstre, c’est par sa seule faute. Par une mauvaise lecture de la réalité sociopolitique. Un poil de plus et les Libéraux arrachaient encore la victoire sur Marois et son équipe. Faut le faire.

Oui la division du vote, oui la proportionnelle, oui, oui, oui…! Mais.
Et c’est ce «mais», qui est le plus important.

C’est par son manque d’idée, son manque de projets de société dans lesquels peuvent se reconnaître les citoyens, par ses volte-faces à hurler de misère, par sa déconnexion de la réalité des Québécois, de la jeunesse en particulier, par son manque de lecture du pouls de la société actuelle et c’est parce qu’il a trop longtemps mis de côté le vrai discours indépendantiste, sauf pour s’en faire un trade-mark et tenter de regagner le pouvoir de façon à nous revendre la trop entendue gouvernance souverainiste, c’est pour toutes ces raisons que le PQ est un peu le fantôme de ce qu’il a déjà été ou de ce qu’il pourrait et devrait être.

Le PQ doit porter haut et fort l’idée de pays. En montrer les contours aussi, pas seulement le mirage d’un pays rêvé, mais les contours du pays réel. Celui qui existe déjà! Et en assurer le pouvoir.

Car les amis, réveillons-nous, notre pays, il est là, nous l’avons déjà, et il est à nous. Nous n’avons qu’à actualiser ce fait.

Nous n’avons pas de pays à inventer ou de terre mythique à conquérir. Nous n’avons qu’à prendre des décisions politiques à l’Assemblée nationale. Décisions qui imposeront de plus en plus cette réalité de la gouvernance de l’état Québécois, et ce, même si ces décisions, si ces politiques sont antagonistes à celles de la fédération.

Prendre sa liberté ne se fait pas sans mettre le pied par terre. Ne se fait pas sans affirmation.

Le PQ doit vouloir mettre le pied par terre et il doit l’annoncer à la population. Avant, pendant et après.

Fini les faux fuyants et les entourloupettes.

Le PQ doit défendre l’idée de pays, bien sûr, mais il doit surtout et avant tout DÉFENDRE LE PAYS!

Car soyons sérieux, l’idée de pays, c’est un fantasme, aussi noble soit-il, c’est un fantasme quand même. Alors que la défense du pays, c’est la réalité. C’est la géopolitique. C’est ici et maintenant!

Défendre le pays, c’est défendre le territoire et le bien-être de la population actuelle et futur du Québec. C’est mettre en place les possibles, de façon à faire éclore les aspirations de la population. Défendre le pays c’est refuser de participer au derby de démolition néo-libéral, sous prétexte que c’est ainsi et que nous n’y pouvons rien. C’est s’inscrire dans le changement. C’est casser le moule de l’aliénation et de l’esclavage. C’est choisir de vivre à travers la nouveauté et dans l’inspiration que portent déjà de si nombreux citoyens québécois impliqués et mobilisés.

Car il faut le dire, en ce moment, le Québec est en ébullition. Il ne manque pas beaucoup pour que la sauce prenne. Et la politique est un liant certain.

Ne pas voir ce mouvement de changement au Québec, ne pas en tenir compte, ne pas tenter de s’en inspirer, ne pas voir ce désir profond de mettre en place un monde nouveau, ce désir que partage déjà une large partie de la population, ce serait pour moi le symbole d’un aveuglement catastrophique et qui risque d’emporter le PQ et ce peu importe la grandeur de son nouveau chef.

Les aspirants chefs du parti doivent faire une sérieuse mise à niveau. Sortir du mirage que donne l’ivresse du pouvoir.

L’inspiration est dans la population. Il faut l’entendre et la servir!

Ce n’est pas en 2089 qu’il faudra définir ce que devrait devenir le Québec, c’est maintenant.

Si on veut faire un pays, il y aura assurément du changement, et c’est lors de ce changement qu’il faut que le Québec prenne le grand virage de la modernité vers le futur. Il faut donc dès maintenant avoir des pensées qui pourront sembler futuristes et ambitieuses pour certains, mais qui montreront au plus grand nombre le chemin à suivre pour atteindre la liberté.

Cessons dès maintenant d’avoir cette vision provinciale du Québec. Vision imposée par l’histoire et qui appauvrit notre nation, notre pays, et ce depuis la conquête.

Un projet de société, c’est se faire un pays. Soyons logique deux secondes, être pour les projets de Harper, pour le pétrole Albertain et ses pipelines qui passent sous le fleuve St-Laurent, être pour les bateaux de pétrole sale et leur port éventuel à Métis sur Mer, être pour la destruction d’Anticosti pour un peu de bouette brune qui ne rapportera presque rien à la société sauf de la pollution et des risques de grave destruction du Fleuve, ce fleuve qui est NOTRE PLUS GRANDE RICHESSE, mais que nous salissons comme des porcs… Être pour une cimenterie polluante en Gaspésie sous prétexte de développement économique et de création de jobs du secteur primaire, c’est vivre dans un monde qui est presque déjà mort!

Et c’est un mode de vie qui nous tue à petit feu.

La Gaspésie, trésor national! Trésors qu’on laisse mourir ou vivoter. Lieu de tourisme par excellence ou pourtant, tout ferme lentement… Avec l’aide du Fédéral qui pousse pour fermer les régions.

Des projets pour la Gaspésie, c’est un MUST! Cette terre des mille merveilles, entre mer et montagne, devrait devenir une destination touristique internationale prisée.

Une idée comme ça, une parenthèse, pourquoi n’y a-t-il jamais eu de projet d’aéroport international en Gaspésie. Un investissement de l’état pour la mise en place de « charters » en provenance de l’Europe. Eux qui recherchent toujours des destinations exotiques, spéciales, autour d’activités sportives, dans la nature, etc…???? Pourquoi pas un investissement massif dans des infrastructures diverses permettant de développer ce genre de tourisme. Un plan à moyen terme de façon à faire naître le développement régional???

Non, on préfère planter des éoliennes du privé, qui ne rapportent qu’au privé et qui ne servent qu’à mettre HQ dans une situation déficitaire et au final, faire monter notre facture à tous. On préfère aller du côté du ciment polluant dont on a peut-être même pas besoin. Dans 5 ans la place risque de fermer et les mises à pied créeront encore plus de chômeurs…! On pousse par en avant à coup de millions, avec l’aide des amis du pouvoir. T'sé la magouille!

Fin de la parenthèse.

Défendre le pays réel, c’est aussi tout mettre en place pour que le territoire soit habité par sa population.

Avoir une vision claire et sans compromis sur la défense de l’environnement devrait être placé aux premiers rangs des priorités du prochain chef du PQ. Car la défense de l’environnement, le développement durable, la réorientation du développement économique en tenant compte de l’impact environnemental sont des sujets cruciaux, modernes et d’actualité, et ce, partout sur cette planète.

Le Québec, pays jeune et encore en formation, se doit de s’inscrire dans cet élan ultra-moderne et sortir de son statut de pays à l’économie basée principalement sur le secteur primaire. Basé sur le développement à tout prix et n’importe comment.

Il faut mettre un terme à ce développement économique à tout prix et n’importe comment, comme cette absolument folle histoire de nous couler dans le pétrole jusqu’aux oreilles pour de soi-disant motifs économiques qui ne profiteront qu’à une poignée de gros gras qu’on connait déjà. Une vraie république de bananes!

Ceci relève d’une lecture psychotique de la situation actuelle. Cette vision est à si court terme et bouleverse de façon tellement malade l’ordre des priorités, que si le PQ continue dans cette voie, je prédis sans aucune gêne la disparition complète et entière de ce parti d’ici quelques années. Car la dichotomie entre ces visions passéistes et la réalité de l’environnement s’accentuera de façon exponentielle plus le temps passera.

On n’a pas besoin d’un autre parti néo-libéral aux idées courtes. On a déjà les Libéraux et la CAQ qui couvrent bien ce terrain SANS ESPOIR.

Le PQ doit vouloir prendre les guides du Québec et poser des gestes concrets dès le jour un de son accession au pouvoir. Des gestes souverainistes.

Des gestes indiquant le chemin vers l’autodétermination complète et la protection de notre territoire. Et ce, tout en priorisant l’éducation.

Si le prochain chef du PQ montre cette voie de défense du pays et de sa population avec force et conviction, s’il se laisse aller à devenir plus grand que nature, laissant le pays réel couler dans ses veines et s'il devient lui-même ou si elle devient elle-même ce pays, les citoyens vibreront avec lui ou avec elle en harmonie, par sympathie, et le but de l’indépendance deviendra soudainement clair et limpide.

La liberté appelle la liberté.

Le prochain chef du PQ devrait au plus tôt, réunir tous les grands penseurs du Québec, les grands politicologues et constitutionnalistes, les spécialistes de géopolitiques, des environnementalistes, des économistes, des gestionnaires de l’état, etc, pour faire la liste des quelques grandes décisions fondamentales à prendre dès l’accession au pouvoir. Des décisions d’état en rupture avec le statu quo mortifère. Des gestes puissants, votés par l’Assemblée nationale du Québec pour défendre le territoire, la population, notre socioculture, nos acquis sociaux et pour montrer le chemin que doit et veut prendre le Québec d’aujourd’hui.

Vous verrez après ça de quoi aura l’air la mobilisation et un référendum sur l’accession à l’indépendance.

Nous avons besoin d’un nouveau chef au PQ qui s’inspire de notre fantastique jeunesse, de nos amis qui se battent à bout de bras pour la défense du fleuve, de celles et ceux qui se battent pour la défense des terres agricoles, celles et ceux qui défendent le territoire, qui se battent pour la survie des villages, qui luttent pour une meilleure éducation, qui militent pour une meilleure répartition de la richesse de façon à diminuer la misère, celles et ceux qui défendent le système de santé, l’accès aux soins, qui défendent nos écoles si mal menées, celles et ceux qui réclament une constitution écrite PAR ET POUR LE PEUPLE, qui exigent des outils démocratiques, qui souhaitent une sociale-démocratie, qui portent l’idée de laïcité de l’état, ceux qui défendent les PME, le modèle Québécois ou celles et ceux qui portent la culture à bout de bras.

Voilà le vrai Québec, celui du vrai monde. Pas seulement celui de l’industrie!
Et c’est là que le nouveau chef du PQ doit trouver son inspiration.

Mais certainement pas seulement dans les meetings de la chambre de commerce ou dans les officines de la Royal Bank!

Si les paroles de Monsieur furent difficiles à entendre pour certains, dites-vous que le PQ est à un tournant historique. Et s’il manque le virage, les résultats pour le parti et pour le Québec tout entier ne seront pas très faciles à regarder, pas faciles à supporter.

Mais au contraire, si le nouveau chef du PQ fait la bonne lecture du Québec actuel et si le Québec se lève, notre pays sera j’en suis certain, un exemple pour le reste du monde.

Vive le Québec libre!


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2 commentaires

  • Archives de Vigile Répondre

    10 avril 2015

    Monsier Hamelin,
    Quel texte inspirant! J'espère de tout mon coeur que le prochain chef du PQ puisse en prendre acte et poser des gestes significatifs et affirmer notre volonté inébranlable de rompre ce lien avec le Canada. Vive le Québec libre!

  • Archives de Vigile Répondre

    10 avril 2015


    Texte très inspiré et inspirant.Pas du tout utopique, mas peut-être un peu trop volontariste.
    Oui, il faut absolument mobiliser les Québécois et les Québécoises.
    Comment?
    N'est-ce pas ici le plus grand problème, après quarante ans de péquisme plus enclin à conscrire ses membres dans des campagnes de financement et d'organisation strictement électoraliste, plutôt que de former des militants habilités à faire la pédagogie de l'indépendance.
    Oui, oui, oui, pendant la campagne référendaire de 1995, alors que j'étais présidente du PQ de Brôme-Missisquoi, j'ai eu à militer avec des membres, prêts à tous les sacrifices pour l'indépendance et pourtant incapable d'expliquer pourquoi elle était nécessaire.
    PKP que j'appuie de toutes mes forces saura-t-il voir, une fois élu chef du Parti, cet urgent besoin de former des militants capables de convaincre leurs concitoyens. Saura-il prendre les moyens de les envoyer bien préparés sur le terrain, car c'est là notre armée, la seule que nous pouvons envoyer au front de la lutte (pour ne pas dire guerre) indépendantiste.
    Oui, vive le Québec libre, libéré par une multitude de Québécois et Québécoises libres, car il faut être déjà libres pour désirer la liberté.