Mme Mourani,
Vous avez peut-être raison de souligner qu'il serait plus acceptable et légitime qu'un amendement à la Charte québécoise des droits et libertés se fasse à l'unanimité de l'Assemblée nationale- ça c'est un peu fort - mais à tout le moins à la suite d'un vote d'au moins les 2/3 des membres de l'Assemblée Nationale puisqu'il s'agit d'un texte de nature quasi-constitutionnelle et qui a une valeur supérieure aux lois "ordinaires" et qui sert aussi de loi d'interprétation.
Dans ma 1ere réponse, j'ai oublié de vous mentionner que les amendements à la Charte proposés par le PQ pourraient toutefois et en soi obtenir l'aval d'une très forte majorité voire l'unanimité des membres de l'Assemblée nationale.
En effet, les principaux amendements sont contenus dans le préambule et à l'article 9.1 et ont pour effet d'y ajouter des valeurs générales comme la séparation des religions et de l'État, la neutralité religieuse et le caractère laïque de celui-ci, l'égalité entre les hommes et les femmes et la primauté du français.
Ainsi, le préambule se lirait comme suit :
- "Considérant que l'égalité entre les femmes et les hommes, la primauté du français ainsi que la séparation des religions et de l'État, la neutralité religieuse et le caractère laïque de celui-ci constituent des valeurs fondamentales de la nation québécoise".
D'autre part, les modifications proposées à l'article 9.1 ajoutent ce qui suit :
- "Ils [les droits et libertés fondamentales] s'exercent dans le respect des valeurs que constituent l'égalité entre les femmes et les hommes, la primauté du français ainsi que la séparation des religions et de l'État, la neutralité religieuse et le caractère laïque de celui-ci, tout en tenant compte des éléments emblématiques ou toponymiques du patrimoine culturel qui témoignent de son parcours historique".
Enfin, le projet ajoute aussi l'article 20.2 à la Charte qui se lit comme suit :
- "Un accommodement résultant de l'application de l'article 10 constitue l'aménagement d'une norme ou d'une pratique d'application générale qui est fait en vue d'accorder un traitement différent à une personne qui, autrement, subirait des effets discriminatoires en raison de l'application de cette norme ou de cette pratique.
- Un tel accommodement doit respecter le droit à l'égalité entre les femmes et les hommes.
- L'accommodement doit être raisonnable, c'est-à-dire ne pas imposer une contrainte excessive, eu égard entre autres au respect des droits d'autrui, è la santé ou à la sécurité des personnes, à ses effets sur le bon fonctionnement de l'organisation ainsi qu'aux coûts qui s'y rattachent.
- Dans le cas d'un organisme de l'État, un accommodement ne doit pas compromettre la séparation des religions et de l'État ainsi que la neutralité religieuse et le caractère laïque de celui-ci".
Il est important ici de mentionner que l'article 5 du projet de loi qui est contesté par les partis de l'opposition et qui contient l'interdiction du port des signes religieux ostentatoires NE FAIT PAS PARTIE des amendements à la Charte québécoise des droits et libertés et ne requiert pas une règle d'adoption supérieure à la majorité simple.
Conclusion : il est raisonnable de croire que les amendements proposés par le gouvernement Marois au préambule et aux articles 9.1 et 20.2 de la Charte puissent faire l'objet d'un vaste consensus, y compris l'unanimité ou, à tout le moins, le vote des 2/3 des membres de l'Assemblée nationale, car il n'y aucune indication à ce jour que les partis politiques d'opposition aient manifesté leur désaccord sur ces items.
Votre déclaration, Mme Mourani, risque par conséquent d'être un coup d'épée dans l'eau. À moins que vous soyez contre le bien-fondé de ces amendements, bien sûr.
Charte de la laïcité
Lettre ouverte à Maria Mourani (partie 2)
Un coup d'épée dans l'eau
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