Sans complaisance: la nation rassembleuse

9cc1eaf4609983972e542d03731b0d8b

Commençons donc par le commencement, par l’avènement de l’indépendance du Québec comme acte de naissance de la nation québécoise.

Comment faire exister une nation québécoise?
Je suis née Canadienne française. En 1935, ma nation était la nation canadienne-française, une nation solidement ancrée dans ses racines, sa langue, sa culture, son histoire, minoritaire au Canada, largement majoritaire sur le territoire du Québec, un territoire à elle, selon les dispositions même de la Constitution canadienne de 1867. Pourtant, à quinze ans, son avenir me causait déjà une vive et constante inquiétude.
Car il apparaissait à l’évidence que ma nation était d’abord une nation gouvernée par un État étranger et dont le peuple était exploité par et pour les intérêts dudit État, de sa classe dominante et de ses populations.
Il apparaissait aussi à l’évidence au milieu des années 1950 que l’avenir de la nation canadienne-française ne pouvait plus reposer sur sa seule résistance aux impositions de la loi du plus fort, à ses envahissements de toute nature, tant d’ordre économique et politique, que social et culturel.
C’est alors qu’a commencé à se développer l’idée que la nation canadienne-française devait devenir maître de son destin, maître chez elle, au Québec. C’est de cette prise de conscience nationale qu’est née la volonté de la nation canadienne-française d’occuper pleinement son Québec. « Le Québec aux Québécois » était un slogan qui résumait cette volonté de la nation canadienne-française.
La nation qui fonde la légitimité de la lutte pour l’indépendance, c’est-à-dire pour la séparation du Québec d’avec le Canada. Seuls les Québécois canadiens-français ont les attributs de la nation : un territoire, une histoire, une langue, une culture communes, une organisation sociale reposant sur les valeurs attachées à cette culture distincte.
Car, comme l’a si bien démontré Fernand Dumont dans Raisons communes, la nation québécoise n’existe pas comme puissance intégratrice de la multitude des expressions actuelles qui forgent la société québécoise, expressions non seulement divergentes, ce qui est souhaitable, mais contraires à la réalisation de tout projet de société nationale, ce qui est corrosif.
Seul le peuple québécois existe, composé de plusieurs communautés culturelles d’origines ethniques diverses et des Québécois de souche, héritiers du destin de la nation canadienne-française, même s’ils en ont largué les modes d’être et les valeurs traditionnels. Ces populations ne partagent ni intérêts ni valeurs susceptibles d’être le ciment de cohésion et d’unité propres à la nation.
Il n’en demeure pas moins qu’en tant que majorité historique, les Québécois français ont un intérêt objectif à lutter pour l’avènement d’un État-Nation québécois pleinement souverain, seule garantie de leur existence nationale et de son épanouissement. Puisqu’aussi bien la nation québécoise n’adviendra qu’avec la naissance de cet État-Nation. Alors, tous ses citoyens : individus et groupes d’individus de quelque origine ethnique qu’ils soient, seront de nationalité québécoise, selon les critères alors établis pour l’être ou le devenir. Comme cela se passe dans tous les États-Nations du monde.
D’ici là, il incombe aux Québécois formant la majorité historique de lutter pour l’avènement d’un État québécois indépendant, libre et souverain, séparé du Canada.
Comme l’ont compris la minorité anglo-québécoise et les diverses minorités ethniques qui s’y opposent dans leur très grande majorité, et en bloc constitué, par refus farouche de devenir Québécois.
Pourtant, dans le monde actuel, c’est encore l’État-nation qui est la forme généralisée de l’organisation des peuples et, de plus en plus, le rempart le plus solide contre l’uniformisation dévastatrice des cultures. Dans ce contexte, l’avènement d’un État québécois indépendant, libre et souverain est la seule possibilité moderne d’existence et d’exercice de la démocratie sur le territoire québécois, qui, je le rappelle, appartient au peuple québécois.
La souveraineté nationale n’est certes pas une condition suffisante à l’établissement d’États démocratiques mais elle en est une condition nécessaire.
L’argument le plus actuel à prôner en faveur de l’indépendance est celui de sa nécessité comme moyen sine qua non d’une véritable intégration des Canadiens français et de toutes les communautés culturelles à la société moderne québécoise.
Commençons donc par le commencement, par l’avènement de l’indépendance du Québec comme acte de naissance de la nation québécoise.
C’est mon vœu pour 2014.

Featured 4c829808fe105759e71d600533cfd2d9

Andrée Ferretti124 articles

  • 121 200

"Rien de plus farouche en moi que le désir du pays perdu, rien de plus déterminé que ma vocation à le reconquérir. "

Andrée Ferretti née Bertrand (Montréal, 1935 - ) est une femme politique et
une écrivaine québécoise. Née à Montréal dans une famille modeste, elle fut
l'une des premières femmes à adhérer au mouvement souverainiste québécois
en 1958.Vice-présidente du Rassemblement pour l'indépendance nationale, elle
représente la tendance la plus radicale du parti, privilégiant l'agitation sociale
au-dessus de la voie électorale. Démissionnaire du parti suite à une crise
interne, elle fonde le Front de libération populaire (FLP) en mars 1968.Pendant
les années 1970, elle publie plusieurs textes en faveur de l'indépendance dans
Le Devoir et Parti pris tout en poursuivant des études philosophiques. En 1979,
la Société Saint-Jean-Baptiste la désigne patriote de l'année.
Avec Gaston Miron, elle a notamment a écrit un recueil de textes sur
l'indépendance. Elle a aussi publié plusieurs romans chez VLB éditeur et la
maison d'édition Typo.





Laissez un commentaire



Aucun commentaire trouvé