Même si plusieurs au PQ pressent Pauline Marois de remettre résolument le cap sur le prochain référendum, d'autres ont déjà identifié l'enjeu des prochaines élections générales.
«La population aura le choix: ou elle laisse au pouvoir un Parti libéral qui a rompu le lien de confiance envers nos institutions ou elle met au pouvoir le Parti québécois, qui rétablira la nécessaire confiance entre l'État et le citoyen», a déclaré par voie de communiqué le président du PQ de la Capitale-Nationale, Pierre-Paul René.
Si M. Charest, ou son éventuel successeur, s'entête à refuser de tenir une enquête sur la corruption dans l'industrie de la construction, Pauline Marois a déjà promis d'en tenir une. Il s'agira certainement de l'illustration la plus spectaculaire d'un «bon gouvernement» péquiste.
Bien sûr, il coulera beaucoup d'eau sous les ponts d'ici le prochain scrutin, mais nous approchons du point où même de spectaculaires coups de filet policiers ne suffiront plus à satisfaire la soif de nettoyage qui augmente chaque jour.
Qu'adviendra-t-il de la souveraineté dans tout cela? On a beau dire qu'il est possible de mâcher de la gomme en marchant, certaines initiatives sont moins compatibles que d'autres. Par exemple, quand Lucien Bouchard lui a donné le feu vert pour imposer des fusions municipales qui allaient inévitablement faire des mécontents et bousculer des intérêts, Louise Harel a immédiatement compris qu'il avait renoncé à tenir un référendum.
Compte tenu de l'ampleur du mandat qui lui serait confié, une commission d'enquête n'aurait certainement pas trop de quatre ans pour faire le tour du jardin. Normalement, Mme Marois n'aurait même pas besoin de trouver d'autres raisons pour retarder la tenue d'un référendum. Le débat interne du PQ se réglerait en quelque sorte de lui-même. Enfin, peut-être.
Alors que des dizaines d'entrepreneurs, de maires, de dirigeants syndicaux, de fonctionnaires municipaux défileraient quotidiennement devant les caméras de télévision, comment intéresser la population à de fastidieuses études sur les finances d'un Québec souverain, le partage de la dette ou encore la reconnaissance internationale du nouvel État?
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L'intégrité des institutions publiques est une question fondamentale et la société québécoise a peut-être besoin d'une purgation collective. Il ne faudrait cependant pas qu'une enquête publique vienne fausser les termes du débat sur son avenir politique. La campagne référendaire ne doit ni être l'occasion de régler des comptes, ni favoriser une indulgence coupable.
D'ailleurs, d'un point de vue souverainiste, un climat de chasse aux ripoux serait très peu propice à la reconstitution de la coalition arc-en-ciel qui avait presque permis au OUI de l'emporter en 1995.
Cette semaine, l'ancien maire de Joliette, Jacques Martin, que le ministre des Affaires municipales Guy Chevrette avait mandaté à l'époque pour examiner la gestion de Gilles Vaillancourt, déplorait le fait que son enquête n'a jamais eu de suite. Déjà, les rumeurs de favoritisme circulaient abondamment à Laval et M. Martin avait découvert que la Ville louait des bureaux à des prix nettement supérieurs à ceux du marché. Pourtant, son rapport s'était retrouvé sur les tablettes.
«J'ai émis un communiqué de presse. J'ai même rendu publiques les recommandations. Le maire Vaillancourt avait annoncé qu'il s'y conformerait. Que voulez-vous que je fasse de plus?», a demandé M. Chevrette, qui n'avait pourtant pas la réputation de lâcher facilement prise. Son successeur, Rémy Trudel, s'est également «beaucoup interrogé» sur l'administration Vaillancourt, mais ses interrogations n'ont jamais débouché sur l'action.
Durant la campagne référendaire, M. Vaillancourt, dont les accointances libérales étaient connues, a eu le bon goût de demeurer neutre et il a demandé à tous les membres du comité exécutif et aux présidents des organismes municipaux de faire de même. Aurait-on été plus vigilant envers son administration s'il avait pris parti?
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Tout vient à point à qui sait attendre, dit-on. Même si une enquête publique ne peut être couplée avec un référendum, elle peut devenir une formidable «condition gagnante». Si le premier ministre Charest refuse aussi obstinément d'en tenir une, c'est qu'il sait pertinemment que son parti mettra des années à s'en remettre.
La commission Moisan a démontré que le PQ n'était pas exempt de tout reproche, mais il serait beaucoup moins éclaboussé que le PLQ qui, à en croire un de ses anciens présidents, Robert Benoît, est devenu «une machine à ramasser de l'argent». On peut parier qu'un gouvernement péquiste donnerait carte blanche à une commission pour aller fouiller dans les moindres recoins, quitte à y laisser lui-même quelques plumes.
La commission Gomery avait fait grimper la souveraineté à un sommet de 55 % dans les sondages. Malheureusement, le PQ était alors dans l'opposition et il n'a trouvé rien de mieux à faire que de s'entredéchirer.
Déjà, l'opinion publique est horrifiée par les révélations qui se multiplient depuis un an et ce n'est vraisemblablement que la pointe de l'iceberg. Il est permis de croire qu'une enquête sur la corruption aurait un impact encore plus considérable et, cette fois, le PQ serait en mesure d'en profiter. Évidemment, cela suppose un peu de patience.
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mdavid@ledevoir.com
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