ArcelorMittal pourrait perdre son tarif préférentiel d'électricité

PLAN NORD - gérer nos richesses naturelles


Alexandre Shields - Le ministre des Ressources naturelles, Clément Gignac, a entrouvert la porte hier à une révision du tarif d'électricité préférentiel accordé à ArcelorMittal si la multinationale laisse tomber son projet de construire une deuxième usine de transformation à Port-Cartier. L'entreprise songe en effet à exporter du concentré de fer produit à Fermont au lieu de le transformer dans de nouvelles installations qui créeraient 500 emplois.
Interpellé hier par le Parti québécois au cours de la période des questions à l'Assemblée nationale, M. Gignac a affirmé qu'en cas d'abandon définitif du projet d'une deuxième usine, Québec pourrait revoir le tarif réduit accordé au géant du secteur minier. «Si jamais la compagnie, pour une raison quelconque, remet en question l'expansion pour l'usine de bouletage, on révisera et on avisera», a-t-il laissé tomber, sans plus de précision.
«On encourage la transformation au Québec, a ajouté M. Gignac, et le tarif L est une clause pour encourager la construction, la transformation au Québec. On suit de près le dossier et on va avoir l'occasion de pouvoir échanger avec la compagnie.»
Le contrat signé entre ArcelorMittal et Hydro-Québec est secret. Mais questionné par les députés de l'opposition officielle, le ministre Gignac a expliqué que le tarif électrique L, soit environ 4,5 ¢ le kilowattheure, avait été accordé à ArcelorMittal à «la condition» que l'entreprise aille de l'avant avec des investissements prévus de 2,1 milliards de dollars.
Une partie de ce montant, soit environ 1,2 milliard, doit servir à faire passer la production de concentré de fer à la mine de Mont-Wright de 14 à 24 millions de tonnes par année. Ce projet est déjà en cours. Mais une autre tranche importante des investissements annoncés en grande pompe en mai 2011, en compagnie de Jean Charest, devait servir à construire une deuxième usine de bouletage à Port-Cartier.
Or ce projet ne verra peut-être jamais le jour puisque la multinationale n'a pris aucune décision jusqu'à présent, selon ce qu'a indiqué lundi au Devoir le directeur des communications et des affaires publiques de l'entreprise, Éric Tétrault. «On n'est pas en mesure d'annoncer quoi que ce soit en ce moment, a-t-il expliqué. On est dans une période d'incertitude économique qui nous joue des tours pour la question de la boulette. C'est un marché qui est plus difficile à définir pour l'avenir prévisible que le marché du concentré, qui apparaît plus solide pour les prochaines années.»
Le concentré en question est produit directement sur le site de la mine située près de Fermont. Il est ensuite transporté par train jusqu'à Port-Cartier, où il peut être transformé en boulettes. Il peut aussi être mis à bord de bateaux pour être exporté, sans transformation.
Clément Gignac n'a par ailleurs pas répondu aux questions au sujet du projet d'ArcelorMittal, jamais réalisé, de construire une usine de poutrelles d'acier à Contrecoeur. Ces installations supplémentaires, dont le coût a été évalué à 380 millions de dollars, devaient créer 200 emplois.
Non au «protectionnisme»
Le ministre délégué aux Ressources naturelles, Serge Simard, a refusé à plusieurs reprises d'inclure une disposition favorisant la transformation du minerai au Québec dans la réforme de la Loi sur les mines actuellement étudiée en commission parlementaire. Une telle initiative reviendrait à «imposer des contraintes» aux minières, a-t-il dit dans le cadre de l'étude du projet de loi 14. Cela provoquerait «de graves problèmes». Pire, ce genre de «protectionnisme», a-t-il affirmé, ne peut que «créer de la pauvreté chez nous».
Plusieurs économistes affirment au contraire qu'accroître la transformation permettrait de bonifier substantiellement les retombées des activités minières. Un sondage Léger Marketing publié il y a quelques jours dans Le Journal de Montréal indiquait en outre qu'une majorité de Québecois jugent insuffisants les bénéfices économiques qu'ils retirent des ressources qui leur appartiennent.
L'an dernier, Jean Charest s'était dit ouvert à l'idée que les minières transforment ici une partie des minerais extraits. Jusqu'à présent, aucun plan concret pour les inciter à transformer la ressource au Québec n'a été présenté par les libéraux, qui multiplient les annonces liées à leur «chantier d'une génération».
Le Parti québécois parle plutôt d'un «plan marketing du Nord». «Le premier ministre Jean Charest se promène partout au Québec avec un renfort de publicité sans précédent dans les médias. Des milliers de dollars provenant des poches des contribuables sont ainsi dépensés pour l'image de Jean Charest. On annonce des emplois et des investissements qui ne se réalisent pas. Comment peut-on le croire?», a déclaré hier le porte-parole de l'opposition officielle en matière de développement économique et de finances, Nicolas Marceau, par voie de communiqué.
Les minières ont extrait pour plus de huit milliards de dollars de ressources non renouvelables au Québec l'an dernier. Par ailleurs, pas moins de 20 milliards de dollars d'investissements pour de nouveaux projets sont déjà prévus, essentiellement sur le territoire du Plan Nord. Les plus importants sont orientés vers l'extraction de fer et son exportation.


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