La reconnaissance des talents issus de la diversité culturelle, artistique et littéraire du Québec n’est pas toujours évidente lorsque des considérations d’ordre éthique et identitaires interagissent avec des considérations liées à l’industrie culturelle au Québec. Les coupures fédérales au niveau de la culture, bien qu’ayant des retombées néfastes sur la production culturelle ces dernières années, n’empêchent pas les artistes et les littérateurs au Québec d’affiner leurs verves créatrices et de continuer à produire. Un dernier cas de ces coupures est celui du conseil des arts et des lettres du Canada qui vient d’annuler désormais des subventions relatives aux enregistrements des albums de musique!
De quoi couper l’herbe sous les pieds à tous ces groupes de musique émergents, et qui n’en finissent pas d’enrichir la scène culturelle québécoise, sans exclure ces artistes de la diversité culturelle qui continuent de fureter pour une première aide financière, dans le but de donner de la mesure à leurs talents. Ainsi, il est normal que l’effet de ces coupures encourent une complainte unanime sur les désagréments de la bureaucratie gouvernementale qui fomente, au gré de considérations saugrenues, certains alibis tels que l’équilibre des budgets entre les provinces ou encore privilégier certains genres culturels sur d’autres, etc.
De prime abord, ce qu’il faut changer c’est cette tendance de cantonner la culture à la marge comme étant le parent pauvre des autres secteurs, et qui ne considère les talents de la diversité que dans le moule où elle devrait fondre, surtout lorsqu’il s’agit «de sensibilités culturelles», à laquelle il faut s’affilier de peu ou prou… comme si la sensibilité culturelle ne peut prétendre à une pluralité dans l’espace et le temps. Dans le cas des artistes de la diversité culturelle, il y a lieu de se demander dans quel sens fournir plus d’efforts pour y arriver malgré ces embûches.
Il est important de rappeler au Québec la déclaration ministérielle du 16 juin 1999 qui affirmait, entre autres, qu'il « est essentiel que soit reconnue, à l'échelle internationale, la capacité des États et des gouvernements de soutenir et de promouvoir la culture (…) » et que la culture « doit faire l'objet d'un statut particulier à l'égard des accords internationaux de commerce (…) » Ce statut devant « être balisé par des règles consignées dans une convention ou tout autre instrument international approprié ». Cette déclaration posait les termes autour desquels se joue l'avenir de la diversité culturelle à travers le monde aujourd'hui. Aussi, le Québec avait appuyé l'adoption de la convention internationale sur la diversité culturelle consacrant le droit des États et des gouvernements à maintenir, à développer et mettre en œuvre des politiques de soutien à la culture et à la diversité culturelle, le Québec avait bel et bien adopté la Convention sur la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles, le 20 octobre 2005, que de son entrée en vigueur le 18 mars 2007. Bref, nous maintenons que la volonté d’aller de l’avant au niveau du traitement du dossier des artistes issus des communautés culturelles est une nécessité qui doit outrepasser les considérations matérielles qui sont souvent entonnés comme refrain-échappatoire.
Devant cette problématique, souvent passée sous silence ces dernières années, certains organismes tentent d’aller de l’avant sous la bannière de la charte de la diversité culturelle, en faisant valoir la présence de ces artistes multiethniques. L’organisme DAM (Diversité Artistique Montréal) en est un exemple. Cet organisme dont le mandat est de faire reconnaître et inclure tous les artistes et pratiques artistiques professionnelles, dans les réseaux professionnels, les institutions culturelles, et les circuits de diffusion à Montréal a lancé récemment le guide public 2009 : un répertoire des ressources culturelles des communautés culturelles latino-hispanophones et ce après beaucoup de concertations. Cependant, beaucoup de choses restent encore à faire, et qui ont trait à la mise en œuvre des objectifs dans le cadre de l’insertion effective de ces artistes multiethniques dans le champ culturel québécois, et la reconnaissance éthique de ces organismes à l’intérieur de la mouvance culturelle québécoise.
Pour ce qui est de la littérature et la création littéraire, et lors de différentes rencontres dans les salons du livre, etc, nous ne pouvons que déplorer le sentiment de dépit profond chez les jeunes auteurs issus de communautés culturelles, laissés pour compte, et qui se sentent (de par leurs propres mots), ostracisés devant le refus continuel d’être adopté par des maisons d’édition québécoises. D’aucuns diront que la persévérance doit finir par payer. Il suffit en effet de se réjouir des titres honorifiques de la consécration de Danny laferriére (Prix Médicis 2009 pour l’énigme du retour), et la nomination dans la première liste du prix Goncourt de (Edem Awumey avec Les pieds sales), cela est certainement gratifiant pour le sentiment collectif des québécois issus des communautés culturelles. Mais encore, faut-il continuer à rallumer les étoiles, et travailler ensemble afin que les efforts de la nouvelle génération dans les instances gouvernementales oeuvrent définitivement vers une vision commune d’un Québec inclusif à l’orée du 21e siècle.
Là où l’urgence se fait de plus en plus sentir, il y a lieu de penser sciemment à promouvoir des programmes qui interpelleraient cette relève multiethnique avec des critères sensés qui prendraient en compte le volet créatif et original, et qui se dissocieraient des sensibilités farfelues à connotation culturelle. La sagesse c’est d’oeuvrer à faire voir le bout du tunnel plutôt qu’à le voiler par fausse mégarde lorsque le but est sur le point d’être atteint.
KAMAL BENKIRANE
Auteur-éditeur
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