Enquête sur la construction

Il faut que la commissaire Charbonneau se manifeste

Commission Charbonneau


Devant l’embrouillamini créé par le premier ministre Charest dans le dossier de l’enquête dans l’industrie de la construction, il faut que la juge France Charbonneau se manifeste publiquement le plus vite possible pour donner l’heure juste à la population et démontrer clairement son indépendance vis-à-vis du gouvernement. La situation actuelle, qui persiste depuis le 19 octobre et qui menace de se prolonger indéfiniment, crée en effet un climat malsain au sein de la population risquant de nuire grandement à la crédibilité non seulement de la commissaire et des travaux de la commission qu’elle doit présider, mais aussi de miner la confiance des citoyens envers notre système judiciaire.
Dans un premier temps, plusieurs ont été surpris par la décision de la juge Charbonneau d’accepter la responsabilité que lui a confiée le gouvernement de présider une pseudo commission d’enquête où les deux tiers des pouvoirs de la Loi sur les commissions d’enquête ont été émasculés, notamment celui de contraindre les témoins. «Ce n’est pas une commission d’enquête (…) c’est un comité de recherche de faits», a d’ailleurs commenté l’ex-juge Louise Otis, de la Cour d’appel, qui a ajouté qu’elle n’aurait pas accepté de présider une telle commission. D’autres collègues de la juge Charbonneau ont également parlé de «simulacre de commission d’enquête» et ont estimé que le gouvernement Charest utilisait le prestige de la Cour supérieure à des fins politiques.
Sa position étant devenue intenable après la rebuffade du Barreau, le premier ministre Charest a jeté du lest. Mais il l’a fait avec son chapeau de chef de parti libéral plutôt qu’avec celui de chef de gouvernement annonçant qu’il accéderait à la requête que pourrait faire la juge Charbonneau si, dans le cours des travaux de la commission qu’elle doit présider, elle en venait à la conclusion qu’un pouvoir de contrainte était devenu nécessaire.
Normalement, le gouvernement aurait dû modifier de lui-même son décret du 19 octobre. Mais c’est plutôt la juge Charbonneau qui devra quémander ce pouvoir soumettant ainsi le pouvoir judiciaire au pouvoir exécutif alors que, selon un principe fondamental de notre régime politique, il devrait exister une cloison étanche entre les deux et que le premier devrait être totalement indépendant du second. La situation actuelle laisse malheureusement planer des doutes à ce sujet. Qu’adviendrait-il éventuellement si le gouvernement ou le parti libéral étaient pointés du doigt lors de l’enquête? Risquerait-on d’assister à du camouflage en bonne et due forme?
Il faut que la population soit rassurée à ce sujet. Ce n’est certes pas le gouvernement Charest qui le fera. La balle est donc dans le camp de la juge Charbonneau qui jusqu’ici a joui d’une grande crédibilité qui, malheureusement, pourrait s’estomper à cause des manigances de politiciens plus préoccupés par leurs intérêts personnels et partisans que par l’intérêt général.
Entendons-nous bien. Il va de soi que ça prendra un certain temps à la commissaire pour choisir les commissaires adjoints, les avocats, les enquêteurs, le personnel administratif, trouver un local, etc. Mais il est primordial qu’entre-temps tout doute soit dissipé.
Paul Cliche,
Montréal, 1er novembre 2011

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Paul Cliche76 articles

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Membre fondateur du Mouvement pour une démocratie nouvelle et auteur du livre Pour une réduction du déficit démocratique: le scrutin proportionnel ; membre de Québec Solidaire; membre d’ATTAC Québec; membre à vie de la Société Saint-Jean Baptiste de Montréal.





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