Crise d'Octobre

La police connaissait les ravisseurs de Cross et Laporte

Crise d'Octobre '70 - 40e anniversaire



C'est ce que révèle le journaliste Guy Gendron dans une série documentaire réalisée pour l'émission Tout le monde en parlait.
Il y a près de 40 ans, 400 personnes étaient arrêtées arbitrairement au Québec après la proclamation de la Loi sur les mesures de guerre, le 16 octobre 1970. Officiellement, la police était à la recherche de membres du FLQ et bien entendu, des auteurs des enlèvements de James Cross et Pierre Laporte.
Or, à partir des témoignages recueillis par Guy Gendron auprès d'ex-felquistes et de policiers, on apprend qu'à l'époque, la police connaissait l'identité des ravisseurs. Qui plus est, elle aurait volontairement évité de les arrêter. Pas un seul véritable felquiste n'aurait en fait été arrêté.
« Ils n'ont arrêté personne. Ils ont arrêté des gens qui étaient des sympathisants, non pas à la cause du FLQ, mais des sympathisants à la cause de l'indépendance du Québec. C'est d'abord ça qu'ils ont voulu frapper », soutient l'un des ravisseurs de James Cross, Jacques Lanctôt.
Un point de vue que partage le professeur d'université Robert Comeau, lui-même considéré à l'époque par la police comme un des principaux dirigeants du Front de libération du Québec. « Ils auraient pu tout écraser les felquistes, les 30, ils nous connaissaient, ils auraient pu nous arrêter ».
Les services de renseignement savaient tout

Des informations confirmées par l'ex-dirigeant du service du renseignement à l'escouade antiterroriste, Julien Giguère. Ce dernier soutient avoir rayé lui-même les noms des militants felquistes de la liste des arrestations à effectuer. Pourquoi? Parce que la majorité des membres du FLQ étaient à l'époque sous filature, ce qui permettait aux agents du renseignement d'en apprendre davantage sur eux.
Selon le lieutenant Giguère, ses services avaient même établi l'identité des ravisseurs de James Cross et de Pierre Laporte dès le tout début de la crise.
À peine 24 heures après l'enlèvement du ministre Pierre Laporte, l'escouade antiterroriste connaissait déjà l'identité des ravisseurs.
On avait fait le lien assez vite. Oh! là là. Voilà les Rose, voilà un tel et untel...

— Julien Giguère, ex-dirigeant du service de renseignement à l'escouade antiterroriste

Or, sachant l'identité des ravisseurs, pourquoi les gouvernements du Québec et du Canada ont-ils consenti aux mesures de guerre? Il semble que Québec et Ottawa n'aient pas été mis au courant des informations que détenaient les services de renseignement à l'époque.
Robert Demers, bras droit du premier ministre du Québec, Robert Bourassa, pendant la crise, n'y croit pas : « Non, non, ils (la police) ne le savaient pas. Racontez-moi pas ça », s'indigne M. Demers dans le documentaire de Guy Gendron.
Même indignation du côté de Marc Lalonde, ancien bras droit de Pierre Trudeau. Questionné sur la nécessité d'accorder de tels pouvoirs à la police compte tenu du fait qu'elle connaissait l'identité des ravisseurs, Marc Lalonde répond : « La police ne le savait pas à ma connaissance. S'ils le savaient, eux seraient criminels. La police elle-même aurait commis un acte criminel de ne pas informer le ministre de la Justice qu'ils étaient au courant des auteurs de crime, voyons! »
L'ex-dirigeant du service du renseignement à l'escouade antiterroriste, Julien Giguère, blâme pour sa part les politiciens d'avoir accordé des pouvoirs spéciaux à tous les corps de police plutôt que de les réserver au service antiterroriste. On aurait ainsi évité, selon lui, l'arrestation massive de 500 personnes.
Le documentaire de Guy Gendron sera diffusé jeudi soir, 20 h, à l'émission Tout le monde en parlait, sur les ondes de Radio-Canada.
D'après un reportage de Guy Gendron

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