Le Parti Québécois, entre indépendance et pouvoir?

Tribune libre

Alors que les membres du Parti Québécois entrent dans une grande réflexion à l’aube d’une importante course à la chefferie, j’ai remarqué que deux courants sont bien présents au sein du parti et que les débats entre ceux-ci sont déjà entamés. D’une part, je me réjouis de la réflexion qui s’amorce mais, d’autre part, je m’inquiète un peu de voir cette réflexion se figer dans un débat qui me donne une impression de déjà-vu entre deux groupes : l’un qui semble vouloir prioriser le retour au pouvoir du parti alors que l’autre semble plutôt vouloir consacrer toutes les énergies à la promotion active du projet d’indépendance du Québec.

À mon avis, il faut voir plus loin et surtout plus large que cela.

Pour moi, une chose est claire : le Parti Québécois doit se débarrasser des étiquettes qui lui collent à la peau depuis déjà un bon moment. «Vieux parti», «déconnecté», «un parti comme les autres», «le parti qui va ruiner le Québec», etc. Nous avons tous déjà entendu ces expressions référant à notre parti.

En tout cas, pour ma part, dans mon coin de pays, je les ai entendues assez souvent, trop souvent. Ainsi, je crois que la première chose qui devrait occuper l’esprit des péquistes en réflexion c’est de trouver le moyen de nous défaire de ces étiquettes car elles nous empêchent de nous définir nous-mêmes aux yeux de la population. À cause d’elles, ce sont les autres, souvent nos adversaires politiques, qui façonnent notre image sous les yeux des Québécois(es).

Pourtant, nous devrions être capables d’envoyer nous-même le message à la population concernant qui nous sommes, que voulons-nous, quels sont nos projets, qu’avons-nous à proposer, etc. Sans cela, nous avons beau avoir les meilleures idées du monde, elles ne trouveront pas écho chez beaucoup d’électeurs puisqu’avant d’entendre notre message ils ont déjà entendu le message qui nous est attribué par les autres. Il est beaucoup plus difficile de défaire une idée déjà conçue et de déboulonner des mythes que de simplement défendre une idée et d’essayer de convaincre les gens du bien-fondé de celle-ci.

Qui sommes-nous au PQ?

Je suis d’avis qu’il faut absolument réfléchir à ce qui nous identifie comme parti politique, à ce qu’est véritablement le Parti Québécois, et à le mettre de l’avant plus que jamais, sans ambiguïté, afin que la définition que les gens aurons de notre parti soit celle que nous aurons nous-mêmes écrite. Cette définition, elle se trouve à l’article premier de notre programme à mon sens. Le Parti Québécois est un parti qui est né pour faire du Québec un pays indépendant.

Aujourd’hui, ce but n’est toujours pas atteint, donc sa mission reste à accomplir. Ce but que nous partageons tous, celui qui fait en sorte que nous sommes réunis ensemble sous une bannière politique, doit nous coller à la peau telle la fleur de lys que nous avons tous de tatouée sur le cœur.

Impopulaire, le projet d’indépendance du Québec?

Peut-être maintenant, plus que dans le passé mais moins que dans un passé plus lointain et, qui sait, peut-être plus ou moins que dans le futur… Bref, la popularité d’un projet ou d’une idée peut très bien évoluer dans le temps et nous pouvons, comme force politique, être l’acteur principal de cette évolution. C’est pourquoi le Parti Québécois ne doit, en aucun temps, avoir peur ou hésiter à parler de son option, à en étayer les avantages et à déboulonner les mythes qui la concernent.

Mais plus encore, notre parti doit, selon moi, renouveler le discours qui entoure le projet d’indépendance nationale. Les racines de ce projet, elles, ne changeront jamais. C’est d’abord et avant tout une question de fierté et un goût de liberté. Toutefois, les époques dans lesquelles ce projet s’insère ont chacune leur réalité propre. Les préoccupations de la population québécoise au 21e siècle sont certainement différentes de celles des années 1970 ou 1990, sans compter que la nouvelle génération est majoritairement dans le néant en ce qui concerne les explications du projet d’indépendance. C’est pourquoi il faut expliquer, convaincre et argumenter, tout cela en étant bien conscients des réalités actuelles.

Quelques attitudes que pourrait adopter le Parti Québécois pourraient donner raison à nos adversaires.

Si nous parlons d’indépendance sans ancrer le projet dans les préoccupations quotidiennes des citoyens, nous sommes déconnectés.

Si nous nous contentons de parler de ce qui est populaire chez les citoyens à l’heure actuelle sans rattacher ces préoccupations, à toutes les fois que c’est possible (et c’est très très souvent possible), à notre but premier, nous sommes un vieux parti ou un parti comme les autres dont le but premier est de gouverner.

Et en termes de vieux parti, nous en avons un par excellence au Québec, le Parti libéral qui se fait élire en promettant ce que tout le monde veut entendre pour ensuite gouverner en décevant tout le monde, augmentant le cynisme populaire presqu’aussi rapidement que la dette publique et que le fardeau fiscal des familles québécoises. Ce parti qui est susceptible de conduire aveuglément le Québec dans le précipice à coups de discours électoralistes irréalistes, nous n’en avons pas besoin d’un de plus au Québec. Le Parti Québécois n’est pas un vieux parti et ne doit pas agir comme un vieux parti, je vous en prie!

Voilà ce sur quoi devraient porter les réflexions des membres du Parti Québécois, soit l’autodéfinition sans ambiguïté et l’actualisation de nos arguments pour nous rebrancher directement sur ce qui préoccupe la population du Québec.

Nous ne pouvons pas retourner devant les électeurs en 2018 en ayant l’air d’avoir peur (ou en ayant peur pour de vrai dans le cas de certains) de notre option pas plus que nous ne pouvons pas retourner devant eux sans avoir des solutions ou des propositions concrètes à leur présenter concernant ce qui les préoccupent au plus haut point.

Alors pour ceux qui se demandent si c’est le pouvoir d’abord ou l’indépendance d’abord, je crois qu’il s’agit là d’un faux débat, puisque vous le savez tous comme moi, l’un ne viendra pas sans l’autre. Penser retourner au pouvoir en se montrant hésitant sur notre option est un cul-de-sac, tout aussi bien que de penser faire l’indépendance dans l’opposition. La confiance ne nous sera réaccordée que si nous nous en montrons dignes en restant fidèles à notre objectif et consciencieux quant aux préoccupations des Québécois(es).

Je nous souhaite une réflexion fructueuse.


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1 commentaire

  • Normand Bélair Répondre

    22 septembre 2014

    Bravo !
    Je pense sincèrement, que le PQ, doit sortir du discours codé, en croyant que TOUS les québécois sont à l’affut de la constitution signé sans le Québec en ’82 ; que TOUS les québécois savent que sont les conditions pour que le Québec adhère au Canada, pas plus que le vol systématique du gouvernement central envers la caisse de l’assurance-emploi ; pas plus que l’impacte sur nous des mauvaises liaisons que le parti libéral a eu avec les firmes d’ingénierie et le financement illégal.
    Il faut souvent répéter et définir les pouvoirs que le nouveau pays pourrait avoir. Imager les discours pour qu’on puisse le voir ce nouvel état.
    Réécrire les objectifs que nous voulons atteindre, sinon pourquoi voter pour ce parti si QS ou la CAQ offre mieux que le PQ ?
    Par exemple, j’ai hâte qu’on aborde des sujets tabous tel que le nombre d’immigrants reçus chaque année ici, au Québec. Il est plus que temps d’avoir une vraie discussion sur ce sujet ; soit que nous mettons les énergies nécessaires pour accueillir un si grand nombre (55 000 par an) OU, si non, qu’on en diminue son nombre car actuellement nous n’avons pas les capacités d’accueil pour un si grand nombre et s’assurer de leur intégration. C’est un réel problème, et pourtant aucun parti en parle.