On m'avait tellement prévenue contre le froid que, lors de mon arrivée à Québec, en août 2004, j'ai été surprise par la chaleur de l'été. À bord d'un vol en provenance de Newark, quelque temps plus tard, à l'approche de l'aéroport Jean Lesage, un de mes concitoyens expliquait à son épouse que ces ronds bleus dans les cours arrière de maisons québécoises étaient des patinoires, parce que les Québécois adorent le hockey!
Nous pouvons rire de l'ignorance des Américains face au Québec (ou en pleurer), mais j'ai aussi senti la nécessité d'expliquer aux Québécois les nombreuses nuances des États-Unis. L'un d'eux, de retour de San Diego, se disait étonné par le niveau de multiculturalisme aux États-Unis. Combien savent que le tiers des Américains sont issus d'une communauté culturelle? Ou que dans chaque État ayant opté pour le Parti républicain (ou démocrate) lors d'élections présidentielles récentes, près de la moitié des électeurs avaient voté pour l'autre parti. En effet, il est difficile de bien saisir la riche diversité de l'Amérique sans l'avoir visitée d'un océan à l'autre.
La relation entre les États-Unis et le Canada est la plus importante relation économique bilatérale au monde. Plus de 500 millions de dollars [sic] de biens traversent la frontière chaque année. Le Canada est le plus grand fournisseur d'énergie aux États-Unis. Ce dernier représente, et de loin, le plus important partenaire commercial du Québec. Et pas seulement la Nouvelle Angleterre : le Québec exporte trois fois plus vers l'État du Tennessee que vers la France [?].
Nos liens ne sont cependant pas que commerciaux. Lorsqu'une forêt québécoise est la proie des flammes, des pompiers américains viennent prêter main forte. Et je n'oublierai jamais le soutien offert par les Québécois lorsque l'ouragan Katrina a ravagé la Nouvelle Orléans. Il est clair que nos deux peuples ont des sentiments profonds l'un envers l'autre. Voilà pourquoi je rejette la croyance voulant que « l'anti-américanisme » soit répandu au Québec : nous pouvons être en désaccord avec des politiques précises du gouvernement voisin tout en respectant ses citoyens.
Quant à ceux qui prennent des piscines pour des patinoires ou ceux qui font l'erreur de croire que la télévision américaine représente la vraie Amérique, cela nous rappelle que nous ne pouvons prendre nos liens pour acquis. C'est pourquoi je félicite les gens d'affaires qui ont pris l'initiative de créer la toute première Chambre de commerce américaine à Québec. Cet organisme, affilié à d'autres à travers le Canada et les États-Unis, aidera les PME de Québec à développer des liens avec leurs homologues américains, du Maine à la Californie.
Être voisins peut parfois nous nuire. Lorsque les jeunes pensent à voyager, le fait d'étudier un semestre dans une institution de l'autre côté de la frontière ne semble pas très exotique. Nos systèmes scolaires différents posent également problème. Les éducateurs américains et québécois travaillent d'ailleurs auprès d'institutions d'enseignement et de nos gouvernements afin d'améliorer la mobilité au niveau des études supérieures en Amérique du Nord.
Le 400e anniversaire de la ville de Québec est également une opportunité pour nous de resserrer nos liens. Le 400e ne célèbre pas que le passé. Plus que tout, cet anniversaire se veut l'occasion de jeter les pierres fondatrices de l'avenir, en faisant mieux connaître le Québec et en reliant l'héritage québécois à l'identité multiculturelle nord-américaine.
Dans quelques semaines, le premier Ministre Harper et les présidents Bush et Calderon se trouveront à Montebello afin que nos gouvernements puissent travailler ensemble à améliorer la sécurité, la prospérité et la qualité de vie pour nous tous, Nord-Américains. Les gouvernements ne sont pas et n'ont jamais été les seuls moteurs de croissance en Amérique du Nord. Notre relation est un vaste réseau de liens reliant, entre autres, gouvernements locaux, législateurs, ONGs, équipes sportives, commerces, familles et amis. Nos forces ont toujours été le travail, l'imagination et le courage de nos citoyens. Voilà ce que signifie être Nord-Américain.
Alors que je quitte Québec, je ne pense pas à ce que je laisse ici, mais bien à ce que j'apporte avec moi : une meilleure appréciation de ce que signifie être Nord-Américain et une admiration sans fin pour la belle province et les Québécois. Merci Québec, pour ce magnifique cadeau!
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Abigail Friedman
Consule générale des États-Unis à Québec. Mme Friedman quittera Québec le 16 août prochain.
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