Ne plus se posséder...

Le Québec économique


Plusieurs s'inquiètent, à bon droit, lorsqu'un fleuron de l'économie nationale québécoise risque de passer sous contrôle étranger. D'autres considèrent ces craintes comme du nationalisme dépassé. D'abord, le nationalisme n'est désuet ni ici, ni ailleurs et il y a nombre de raisons purement économiques de vouloir s'appartenir.
Lors de la dernière campagne présidentielle française, on n'arrêtait pas de parler de la patrie. Tony Blair a exprimé récemment sa fierté d'avoir été le leader «of the greatest nation on earth». Barack Obama a utilisé les mêmes mots le soir de sa victoire. Les Chinois, à l'ouverture des Olympiques, n'étaient pas modestes non plus.
Il est normal pour une nation d'être fière et de chercher à contrôler son destin. Il est important pour l'estime collective de voir les siens créer et gérer des entreprises qui figurent parmi les meilleures au monde. Quand Jean Lesage a dit «maîtres chez nous», il avait de profondes raisons de le faire. Nous étions à l'époque purement et simplement «colonisés». Cela n'était bon ni pour notre dignité, ni pour notre prospérité.
D'un strict point de vue économique il est très important de conserver sur notre territoire les centres de décision de grandes entreprises. Leur présence nous vaut des retombées inestimables, comme les profits et les impôts, qui seraient perdues si les décideurs étaient ailleurs.
En plus, une multitude d'emplois intéressants se retrouvent au siège social. Notre prospérité doit beaucoup au fait que des géants comme Bombardier, Lavalin, CGI, Cascades, Dessau, la Caisse de dépôt, Hydro-Québec, le Mouvement Desjardins, le Cirque du Soleil, sans compter les Desmarais et les Péladeau, ont leur centre décisionnel chez nous. Combien d'avocats, de comptables, d'économistes, d'informaticiens, de publicitaires et de consultants de toute sorte n'auraient jamais eu leurs contrats si le siège social avait été à Toronto ou à New York ? Combien de chaires universitaires, de centres de recherche, d'édifices scolaires seraient ailleurs si Joseph-Armand Bombardier et Pierre Péladeau, pour ne nommer que des disparus, n'avaient pas été des enfants du Québec ?
La culture est aussi toujours mieux traitée dans l'entourage du siège social. Le soutien aux musées, orchestres, troupes de théâtre et corps de ballet fait aussi partie de ces précieuses retombées.
Évidemment, on ne peut pas s'indigner chaque fois qu'un étranger fait une acquisition ici et louanger du même souffle nos entrepreneurs qui achètent partout. Il faut juger au mérite et au cas par cas. Par exemple, il aurait été lamentable que le contrôle de TVA passe chez Rogers à Toronto. La Caisse de dépôt a fait son devoir. C'est déjà de trop que Radio-Canada, malgré de grands mérites, soit contrôlée par Ottawa. Il est dangereux pour une nation de ne pas avoir la maîtrise de son information.
Comparativement à l'Ontario, dont le coeur industriel est totalement contrôlé ailleurs, la supériorité du modèle québécois est évidente. Nos entreprises publiques, nos coopératives et nos fonds de travailleurs sont même à l'abri d'offres d'achat étrangères. Quand plusieurs grandes puissances, dont la France et les États-Unis, protègent leur patrimoine économique, notre nation serait négligente en ne prenant pas les précautions voulues.


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