Obama au Caire

Obama... et après



Barack Obama n'était pas là pour une adresse protocolaire. Il n'était pas venu au Caire, l'une des plus prestigieuses capitales du monde arabe, pour tenir quelques propos de bonne volonté, les habituelles platitudes du tout-venant diplomatique. Le président américain entendait, jeudi 4 juin dans la capitale égyptienne, développer l'un des axes fondamentaux de sa politique étrangère : changer les rapports entre l'Amérique et l'islam. En ce sens, le discours qu'il a prononcé à l'université du Caire est un acte politique majeur.

C'est la troisième fois depuis son élection que le président démocrate parle au monde arabo-musulman. Il y eut, tout juste après son arrivée à la Maison Blanche, l'entretien accordé à la chaîne de télévision Al-Arabiya, puis à la mi-avril son intervention à Ankara. A chaque fois, un même souci, une même obsession : offrir un autre visage de l'Amérique. L'enjeu est stratégique. M. Obama estime qu'une des clés de la scène géopolitique actuelle réside dans une double image : celle que le monde arabo-musulman a des Etats-Unis et celle que les Américains ont de l'islam.
Le président a fort à faire. L'administration Bush a donné l'impression qu'elle réagissait aux attentats du 11 septembre 2001 en "démonisant" l'islam. De la funeste prison irakienne d'Abou Ghraib aux cellules de Guantanamo, en passant par son attitude dans le conflit israélo-palestinien, elle a, par esprit de croisade et manichéisme, entretenu l'image d'une Amérique en guerre contre l'islam. Quelles qu'aient été ses intentions, l'administration Bush a ainsi nourri l'islamisme militant. Car celui-là n'aime rien tant que l'idée d'un "choc des civilisations", d'un affrontement avec l'Occident, incarné au premier chef par l'Amérique.
Au Caire, comme lors de ses deux précédents discours, M. Obama s'est attaqué aux représentations caricaturales de l'islam ; il a dénoncé les stéréotypes véhiculés sur les musulmans. Il l'a fait tout en critiquant les mêmes caricatures et les mêmes stéréotypes entretenus dans le monde arabo-musulman à l'égard de l'Amérique. Il s'agit de briser "un cycle de méfiance et de discorde", a-t-il dit, de "fonder un nouveau départ entre les Etats-Unis et les musulmans, sur le respect mutuel et sur cette idée que l'Amérique et l'islam ne s'excluent pas". Cela passe, bien sûr, par une nouvelle politique américaine au Proche-Orient, à l'égard de l'Irak, de l'Iran ou en Afghanistan - qui reste à mettre en oeuvre. Mais cela passe aussi par des mots, ceux qui permettent de sortir de la stigmatisation réciproque et des perceptions erronées. M. Obama les a trouvés.


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