Dans le dossier des sables bitumineux, je trouve fascinant de constater à quel point de nombreux gouvernements, avec l’aide des entreprises du milieu, tentent de tout mettre en place pour que les structures légales et matérielles du « libre-échange pétrolier » soient concrétisées en un temps record, au détriment de la protection de l’environnement et de la sécurité. Même la façon de qualifier ce pétrole en est influencé.
Alberta : Dans les derniers jours…
Nous avons appris par le Vérificateur Général de l’Alberta que le tout nouveau programme de surveillance conjoint Alberta-Canada sur l’exploitation des sables bitumineux était déficient et contenait des inexactitudes. Il a dit que le premier rapport était « troublant » de par ses lacunes et ses retards. De plus, il faisait état de la faible gestion de ces projets par le ministère albertain de l’environnement et du développement des ressources renouvelables.
Fédéral : au même moment…
La fameuse loi C-38 dont je parlais dans un texte précédent a fait en sorte que 80% des projets d’exploitation des sables bitumineux sont maintenant soustraits à toute évaluation environnementale. C’est ce que nous apprenait la commissaire à l’environnement et au développement durable Julie Gelfand il y a quelques jours.
De plus, elle nous apprenait aussi que le Canada n’atteindrait pas les objectifs de réduction d’émissions de gaz à effet de serre que le gouvernement s’était fixé en 2009, soit 17% de moins en 2020 qu’en 2005.
Grosse surprise.
Or, ces objectifs étaient déjà moins ambitieux que ceux exigés par les scientifiques. Ces derniers exigeaient qu’ils soient de -25% par rapport à nos émissions de GES de 1990 d’ici 2020.
L’Europe et le pétrole « pas sale » du Canada
Pendant que l’Union Européenne qualifie le Canada de mauvais élève dans le dossier de la lutte aux changements climatiques, elle a ses vues sur les ressources naturelles du Canada, d’où son intérêt pour l’accord de libre-échange Canada-Union Européenne. C’est dans ce contexte qu’elle refusait cette semaine de mettre le pétrole issu des sables bitumineux dans la catégorie des pétroles sales.
Selon plusieurs observateurs, les relations tendues entre la Russie et l’Union Européenne pourraient être à l’origine de cette décision. Ainsi, en ne qualifiant pas ce pétrole de sale, l’Union Européenne pourrait plus facilement l’accepter, ce qui lui permettrait d’être moins dépendant des hydrocarbures provenant de Russie.
Et le Québec dans tout ça?
Pour que le pétrole des sables bitumineux puisse se rendre en Europe, il doit principalement passer par le Québec. Que ce soit par train, par bateau ou par pipeline, tout est mis en œuvre pour que le Québec laisse transiter ce pétrole par son territoire. Alors que d’un côté on abaisse les normes de protection et de surveillance de l’environnement, de l’autre on accélère le processus d’autorisation des projets.
C’est dans ce contexte que les citoyens doivent comprendre l’importance stratégique du Québec dans le dossier de l’exportation du pétrole de l’ouest vers l’Europe. L’Alberta, le gouvernement Canadien et l’Union Européenne voient une opportunité d’affaire dans le conflit entre l’Europe et la Russie et ils feront tout pour que cela fonctionne.
C’est pourquoi je pose la question suivante : Nous contenterons-nous de n’être que des spectateurs impuissants ou nous assurerons-nous que les élus et les entreprises réalisent que dans leur grand plan de « libre-échange pétrolier », la protection de l’environnement, la sécurité des citoyens et même la démocratie sont AUSSI des enjeux fondamentaux?
Les mois à venir sauront nous le dire.
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