Un slogan qui va droit au coeur

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À condition d'avoir du coeur

Le slogan du Bloc québécois (« qui prend pays prend parti ») mis sur des affiches électorales cette semaine m’est allé droit au coeur. Les slogans ne me touchent pas tellement, pourtant. Il y en a tellement, et on peut leur faire dire ce qu’on veut. Mais celui-là m’a réveillée.

J’avoue que j’en étais rendue à me dire que le 19 octobre j’irais annuler mon vote, tout simplement. Surtout pour que personne ne puisse voter à ma place, comme on dit que ça peut encore se faire. Toute ma chronique de la semaine dernière vous expliquait déjà le malaise dans lequel je me trouvais face aux trois chefs qui convoitent le pouvoir canadien. D’ailleurs, certains d’entre vous n’ont pas manqué de souligner à gros traits que je faisais campagne pour le Bloc en soulignant les torts des trois autres partis. Vous aviez tout faux. Je me demandais pour qui j’allais pouvoir voter.

J’avoue, avec un peu de honte, que je trouvais le Bloc bien usé, et j’ai toujours horreur d’avoir l’impression de revisiter quelque chose que je connais déjà. Sauf que le Bloc, lui, n’a rien à se reprocher. Il a fait ce que nous lui avions demandé de faire : nous représenter sur la scène fédérale. C’était son mandat. Sa seule vraie responsabilité était de veiller sur les intérêts du Québec.

C’est ce que je vous aurais dit cette semaine si je n’avais pas vu une image du slogan du Bloc à la télévision. « Qui prend pays prend parti. » Aujourd’hui, avec ma franchise habituelle, je vous confirme que je voterai Bloc comme je vous confirme que je ne suis membre d’aucun parti politique. C’est mon choix. Le slogan m’a permis de remettre de l’ordre dans mes idées. Je ne peux nier que j’ai le désir d’indépendance pour mon pays inscrit profondément dans tout mon cheminement. J’ai entendu parler de l’indépendance du Québec sur les genoux de ma grand-mère. C’est vous dire que ça remonte loin.

Comme la plupart d’entre vous, j’ai voté n’importe comment, trop souvent, pour des partis sans colonne vertébrale et qui trahissaient tous nos espoirs dès qu’ils étaient élus. Comme vous, je m’en mordais les pouces pendant quatre ans, entre les élections, espérant trouver mieux la prochaine fois. J’ai joint le Parti québécois espérant faire partie de l’opposition en 1976 avec la suite que vous connaissez. J’ai admiré le courage de René Lévesque et sa capacité de rester près de son peuple sans jamais baisser les bras. Et de continuer à l’aimer, ce peuple, même quand il lui a signifié son renvoi.

Gilles Duceppe a vécu un peu la même chose. Un renvoi cruel après un travail plus qu’honorable à Ottawa. J’ai toujours en mémoire l’image de son père, Jean Duceppe, qui pleurait toutes les larmes de son corps le 15 novembre 1976 au bas de l’estrade où les élus étaient réunis. Son émotion était vraie, car il avait tenu le flambeau de l’indépendance à la radio pendant des années, au théâtre et dans tout le monde culturel du Québec, et il applaudissait les premiers pas que nous faisions vers un pays à nous.

Gilles Duceppe est le fils de son père. Généreux, combatif quand il le faut, il a été chassé de la politique sans amertume de sa part. Il acceptait l’idée d’une retraite non désirée et il aura été, pendant ces moments difficiles, d’une rare élégance, sincère, dévoué et honnête.

Je ne sais pas si vous avez eu l’occasion d’entendre ses adieux à son ami l’ex-maire de Montréal Jean Doré le jour des funérailles de ce dernier. Non seulement c’était touchant, mais c’était une leçon de vie. Il a montré encore une fois qu’il avait du coeur. C’est tellement rare de nos jours.

Je voterai donc Duceppe. Le pays dont parle le slogan du Bloc, c’est le mien. « Qui prend pays prend parti. » J’en suis. Et à la veille de mes 84 ans, je ne crois pas que j’aurai l’occasion de changer très souvent d’idée à partir de maintenant.

D’ailleurs, il serait assez urgent que nous, les Québécois, nous fassions une idée de ce que nous voulons. Allons-nous continuer de nous laisser définir par d’autres personnes, étrangères à ce que nous sommes, ou allons-nous affirmer haut et fort le désir de jouer notre rôle sur la planète ?

À rester comme nous le faisons sur le bord de la route à regarder passer ceux qui décident à notre place, je ne suis pas sûre que nous allons trouver les moyens de réaliser ce dont nous rêvons pour notre avenir collectif.

Si vous votez n’importe comment cette fois-ci, vous aurez un autre quatre ans pour vous en mordre les pouces. Notre première ligne de défense devrait être les élus du Bloc en aussi grand nombre que possible. C’est juste mon opinion.


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