Une réponse indépendantiste
25 septembre 2011
@ Madame Saint-Onge,
Le « fond » de la question sur le projet de loi privé pour l'octroi d'un contrat de gré à gré avec Bombardier-Alstom pour les voiturettes de métro versus la loi 204, ce n'est pas la suspension de la contestation devant les tribunaux en tant que telle, que cette suspension de l'équilibre des pouvoirs alors même que des parlementaires et des citoyens remettaient en question la valeur de l'entente.
Si on suspend la contestation, c'est donc que l'on institue un état d'exception où les citoyens subiront une perte de pouvoir. Il faut au moins donner l'impression que c'est pour le bien général et que les parlementaires agissent de bonne foi puisque l'on bouscule les institutions. En d'autres termes, on est dans une situation où la fin devra justifier les moyens, ce que peut accepter le peuple, du moment où le peuple est d'accord avec la fin.
Pour comparer les deux projets, on entre dans le terrain de la philosophie voire de l'idéalisme, lesquels sont toujours présents dans la vie politique puisqu'il s'agit, pour la population, des valeurs. Tout le monde a des valeurs et cherche à les respecter, donc s'intéresser à ces valeurs, c'est comme vous dites : « [être] sur le plancher des vaches, les pieds bien ancrés au sol. »
Là où vous vous fourvoyez c'est lorsque vous dites : La politique est affaire d’intérêts et de rapports de force (vrai), pas de philosophie et de virginité (faux).»
Puisque nous sommes en démocratie (ou dans une pseudo-démocratie), philosophie et «virginité» (que j'appellerais respect des principes) sont capitales puisqu'il s'agit de rendre solubles les politiques avec les valeurs des citoyens.
Cet aspect devient une composante essentielle dans la constitution «d'un rapport de force et d'une stratégie».
Vous niez l'apport de la philosophie et des principes?
D'abord, rappelez-vous que la philosophie est la grand-mère de la science et pensez philosophiquement, c'est tenir compte de l'Histoire, de l'économie, de la démographie, de la sociologie, de la géopolitique, des communications, etc.
Donc des moyens pour «s'enraciner dans le réel». Sans une lecture scientifique et sociale, vous ne pouvez comprendre le terrain et donc remporter la victoire politique. Sans idéalisme, vous ne pouvez inspirez le culturel et dans notre cas, c'est le culturel qui jette la lumière sur les dimensions politiques et économiques de la vie collective. C'est parce que le Loco Locass font appel aux Patriotes, à Godin et à Miron qu'ils peuvent soulever l'enthousiasme chez les jeunes et pousser ces derniers à se politiser.
Ensuite, quel était le livre de chevet de Bourassa? « Le Prince »
Quel est le livre de Charest? Sans aucun doute « L'Art de la Guerre »
Le défaut du mouvement indépendantiste est justement de ne pas avoir de doctrine, de doctrine soluble dans les principes et les valeurs des Québécois. C'est une des condition de notre infériorité dans la lutte politique actuelle.
Pour palier cette difficulté on peut diffuser une doctrine :
http://www.vigile.net/Coeur-de-la-pensee-independantiste
http://www.vigile.net/Le-Quebec-vers-la-nation-integrale
http://www.vigile.net/Travailler-pour-une-campagne-d
http://www.vigile.net/Les-trois-niveaux-de-lutte-de
Expliquer les stratégies des adversaires :
http://www.vigile.net/NPD-en-avance-Detection-de-la
http://www.vigile.net/Detection-de-la-propagande-102
http://www.vigile.net/Pratte-ou-l-excroissance-des
Et encourager les nôtres :
http://www.vigile.net/Urgent
http://www.vigile.net/Voici-les-affiches-de-Affichez
Mon analyse de la situation m'indique que nous ne sommes pas un peuple politisé, un peuple qui connait son histoire et surtout, que l'idée même de l'indépendance n'est pas comprise. Ce sont les conditions essentielles pour commencer à nous organiser et à nous battre pour conquérir notre liberté. Je suis au contraire TRÈS CONCRET puisque d'après ma lecture, la majorité des Québécois ne sait même pas combien de députés le Québec envoie à Ottawa et combien le ROC en envoie de son côté, les Québécois comprennent mal leur spécificité culturelle et ce qu'est une nation. Les questions sur la langue, elles, sont encore plus compliquées et incomprises.
Le sol est trop fragile ou pauvre pour que l'indépendance s'enracine et donc ce n'est pas avec des stratégies populistes et électorales ponctuelles que l'idée de l'indépendance fera des progrès au contraire. Plus les partis souverainistes chercheront à gagner des élections pour le pouvoir, plus les discours seront déconnectés de la réalité même de l'indépendance en raison même de l'urgence électorale et de la teneur trop complexe de la question de l'indépendance. Comme nous avons pris l'habitude de confier la diffusion de l'idée de l'indépendance au PQ et au Bloc, si ces derniers n'en parlent pas, l'idée stagne. Or c'est l'indépendance qui rend également populaire les partis souverainistes et ces derniers souffrent donc également de la «stase de l'indépendance» puisqu'ils n'accroissent plus le bassin électoral favorable à leur idée.
C'est là un portrait de la situation tout à fait concret et réaliste. Et si l'indépendance se réalise, c'est parce nous aurons travaillé très fort à la rendre populaire et à nous organiser politiquement. Maintenant pour attirer les gens dans ce genre de travail, les partis politiques sont trop rigides (et mal vus?). Des groupes comme le RRQ, le RIN, les IPSO ou le MSQ sont plus appropriés, flexibles et mobiles (ce qui n'enlève rien à ceux qui militent dans les partis). Il y a un monde de différence entre la vague du NPD et une libération nationale et c'est avoir les deux pieds sur terre que de le réaliser et de mettre un pied devant l'autre pour entreprendre le travail de libération.
Avec la loi 204, le PQ s'est aliéné ceux qui se méfient de Quebecor et tous les Québécois susceptibles d'apprécier la logique du projet MCN21 (nous serons dépossédés d'un bien que nous aurons payé...) pour des questions de principes, justement.
Pourquoi un tel virage, alors même que le vote a montré qu'effectivement il existait des resistances au PQ? Cela veut dire qu'en dépit de ses croyances, il faut suivre le parti ou le (la) chef. L'indépendance du Québec ce n'est pas ça et ce n'est pas comme ça que nous y arriverons. Nous suivons cette stratégie depuis 74 et ça ne marche pas.
Le voyez-vous? Au lieu d'argumenter justement sur la doctrine, par exemple par un échange entre vous et moi sur les techniques les plus efficaces pour convaincre un militant, nous discutons d'un projet de loi provincial qui a semé la controverse.
En guise d'exemple final du rôle de la philosophie et de principes, c'est parce que nous les intégrons à nos vies que la loi 101 est légitime. Autrement, on évacue la langue de la culture et la langue ne devient qu'un moyen de communication. Si ce n'est qu'un moyen de communication, alors pourquoi favoriser le français au détriment de l'anglais? Pour que l'on comprenne très bien l'impact concret, au ras du sol, de la question de la défense du français au Québec, pour que l'on comprenne les ramifications stratégiques et politiques de cette question, on a besoin de la philosophie et des principes, sinon le premier libertarien venu nous mettra en boite.