Je sais, je sais : le sondage piloté par la firme Léger marketing n’est qu’un cliché instantané qui n’exprime que l’humeur générale du moment. Une enquête effectuée dans un mois présenterait probablement des résultats différents.
N’empêche que les informations de ce coup de sonde publiées dans l’édition du Devoir du 28 mai ne surprennent personne. L’appui au projet souverainiste est à son plus bas depuis septembre 2002 parce que le Parti québécois n’a pas placé son article 1 au cœur de son action politique.
L’attentisme qui a caractérisé la « stratégie » péquiste, depuis le sabotage référendaire de 1995, a signalé maladroitement que la formation souverainiste doutait de son option fondamentale. L’objectif indépendantiste est devenu une cible virtuelle au PQ. Administrer la province en espérant qu’apparaissent « les conditions gagnantes » aura alors permis au gouvernement fédéral d’empoisonner le travail du gouvernement péquiste avec les résultats que l’on sait.
S’entêter à vouloir affronter l’État canadien dans une joute référendaire sans lendemain aura finalement coulé le PQ. Ce parti n’aura pas été capable d’écouter la société civile qui refuse d’emprunter sa route dorénavant piégée. Écœurés, les Québécois ont décidé le 26 mars dernier d’essayer un chemin tortueux, sans savoir vers où il mène, mais un tracé à tout le moins qui ne conduit pas vers un ultime référendum.
À la lumière du sondage de lundi dernier, les gens paraissent intéressés à persévérer dans cette voie. L’Action démocratique de Mario Dumont aurait même formé un gouvernement minoritaire. Pour plusieurs, l’intrigue autonomiste de l’ADQ, captif d’un épais brouillard constitutionnel, produit le mirage d’un Québec plus fort sans péril référendaire. Le déni s’incruste parfois profondément dans la nature humaine : Ottawa a beau répéter qu’il n’a rien à offrir, qu’il s’apprête même à affaiblir le poids politique du Québec dans le Parlement canadien, plusieurs Québécois s’illusionnent encore à l’idée que le Canada est ouvert à des négociations politiques…
Il n’en fallait pas plus pour que l’intelligentsia péquiste conclue que l’idée de tenir un référendum, dans le prochain mandat d’un gouvernement souverainiste, doit être abandonnée. Pauline Marois, celle qui succèdera vraisemblablement à André Boisclair à la tête du Parti québécois, en a fait sa principale condition sous peine de retirer sa candidature. Pas de doute que le PQ veut maintenant présenter à la population une image autonomiste, semblable à celle que propose la bande à Mario Dumont.
Le « repositionnement stratégique » du PQ ne lui aura pas donné cependant le second souffle qu’il espérait. Certes, tout comme l’ADQ, il se distingue du Parti libéral englué dans le statut quo. Sauf qu’il s’agit bel et bien d’un emprunt idéologique fait à l’ADQ qui n’a dupé personne ! L’effet qu’a produit la « tactique péquiste » auprès des Québécois s’avère au contraire désastreux puisqu’il laisse croire à une mise en veilleuse de l’option souverainiste. Le sondage de la firme de Léger Marketing l’atteste en révélant qu’à peine 39% des Québécois adhère au projet indépendantiste. On est loin du 52% d’appui enregistré à l’automne 2005…
Trop d’occasions de se débarrasser du boulet référendaire ont été gaspillées ces dernières années. Inutile d’en faire l’énumération : la douleur est déjà assez vive! Le dépôt mardi du rapport du juge à la retraite, Bernard Grenier, sur les actions illégales de l’organisme Option Canada durant le référendum de 1995, s’ajoute à cette longue liste de conjonctures manquées. Cette frilosité péquiste a également agacé les gens.
Reste l’espoir d’une élection précipitée le 9 juillet prochain. Un scrutin hâtif qui enverrait à l’Assemblée nationale un gouvernement adéquiste minoritaire. C’est l’ADQ qui ferait ainsi le travail pédagogique à la place du PQ en se cassant les dents à Ottawa. Le naufrage du projet autonomiste de Mario Dumont ravivera en effet l’option indépendantiste du Parti québécois. Il est à ce sujet réjouissant de voir les députés péquistes agir présentement avec honneur à Québec en insistant pour que les millions arrachés du gouvernement fédéral servent à financer les programmes pour lesquels ils étaient destinés initialement. Souhaitons que les élus souverainistes tiennent tête aux médias fédéralistes et expliquent efficacement à la population qu’elle ne peut s’objecter aux baisses d’impôt à 70% sans éviter la tenue d’une élection générale.
Pour l’heure, un scrutin précipité représente le meilleur scénario que les indépendantistes puissent espérer. Pour le reste, miser sur d’autres pour accélérer le processus de libération du Québec constitue une piètre stratégie. L’Action démocratique craint le pouvoir, comme l’a prouvé la fuite de ses députés jeudi dernier, lorsque ceux du Parti québécois ont formulé une motion de blâme à l’Assemblée nationale, motion qui aurait entraîné la chute du gouvernement libéral si tous les parlementaires avaient été présents pour voter. Le manque de courage des adéquistes ne laisse présager rien de bon quant à leur promesse autonomiste…
Patrice Boileau
39 %
Le sondage de la firme de Léger Marketing l’atteste en révélant qu’à peine 39% des Québécois adhère au projet indépendantiste.
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1 commentaire
Archives de Vigile Répondre
30 mai 2007Difficile à suivre votre conclusion, M. Boileau.
Votre éditorial ne me semble pas clair sur le comment une élection rapide "probablement en juillet" est souhaitable pour la souveraineté du Québec.
Est-ce que vous souhaitez que le PQ gagne pour gouverner le Québec-province ou que l'ADQ gagne pour se casser les dents sur le fédéral afin de raviver la foi souverainiste même si vous décrivez ça comme une piète solution ?