Donald Trump ne réserve plus ses déclarations fracassantes à ses désormais célèbres tweets nocturnes. À quelques jours de sa prise de fonction, le président américain élu a multiplié les prises de positions atypiques dans une interview donnée au Times et à Bild, journaux respectivement britannique et allemand. L'homme à la mèche blonde n'a pas mâché ses mots, notamment sur l'Union européenne, pour laquelle il montre bien peu de considération. Résumé de ses principales prises de position, et des réponses des principaux intéressés.
• Union européenne et «Brexit»
«Quand vous jetez un coup d'œil à l'Europe, vous voyez en réalité l'Allemagne, estime Donald Trump. [L'UE] est en réalité un instrument au service de l'Allemagne. C'est pourquoi je pense que le Royaume-Uni a bien fait d'en sortir.» Pour Donald Trump, le «Brexit» est incontestablement un succès pour le Royaume-Uni. Il assure qu'il va «travailler dur» pour qu'un nouvel accord commercial soit conclu «très rapidement» entre Londres et Washington. Il répond aussi favorablement à la requête de la première ministre Theresa May: «Nous nous verrons dès que je serai entré à la Maison-Blanche.» L'annonce de cet accord a en tous cas déjà réjouit le ministre des Affaires étrangères britannique, Boris Johnson, qui a jugé que c'était «une bonne nouvelle [...] dans l'intérêt des deux parties».
Le président élu est persuadé que la crise des réfugiés a été mal gérée et qu'elle est à l'origine du départ du Royaume-Uni de l'UE. «Les peuples, les pays veulent conserver leur identité. Le Royaume-Uni veut sa propre identité. Mais je crois que si on ne l'avait pas forcé à accepter tout ces réfugiés avec tous les problèmes qui vont avec… Je pense qu'il n'y aurait jamais eu de “Brexit” […] Je pense que d'autres pays vont quitter l'UE à leur tour.» L'Allemagne et sa chancelière, Angela Merkel, qui ont été en pointe dans l'accueil des réfugiés, qualifié par Trump «d'illégaux», ont commis «une erreur catastrophique». Il assure cependant avoir «un profond respect» pour Angela Merkel.
«Je pense que nous, les Européens, avons notre destin dans nos propres mains. Je vais continuer de m'engager pour que les 27 États membres travaillent ensemble vers l'avenir(...) face aux défis du XXIe siècle», a riposté Angela Merkel lundi.
Le secrétaire d'État américain, John Kerry, a quant à lui dénoncé les «propos déplacés» du président élu sur l'Union européenne et la «courageuse» chancelière allemande. «Je pense très franchement qu'il était déplacé pour le président élu des États-Unis de s'immiscer dans les affaires d'autres pays de manière aussi directe», a-t-il déploré sur CNN. «Je pense qu'il faut être très prudent avant de dire qu'un des dirigeants les plus puissants d'Europe (...) a fait une erreur», a insisté le secrétaire d'Etat. «La meilleure réponse à l'interview du président américain, c'est l'unité des Européens», c'est de «faire bloc», a réagi de son côté le ministre des Affaires étrangères français, Jean-Marc Ayrault.
• L'Otan
L'UE n'est pas la seule institution internationale à être sévèrement jugée par Donald Trump. L'Otan, considérée comme «obsolète», n'a pas non-plus l'estime du président élu. Elle n'a pas su, selon lui, muter pour s'adapter à la menace actuelle, le terrorisme islamique. Autre problème, «les membres ne payent pas ce qu'ils doivent régler et nous sommes tout de même censés les protéger.» «Ils sont seulement cinq à payer correctement. Cinq sur vingt-deux ce n'est pas beaucoup. Je pense que c'est très injuste pour les État-Unis.» Peu d'États de l'Alliance atlantique atteignent le niveau de 2% de leur produit intérieur brut pour les dépenses militaires, l'objectif que s'est fixé l'Otan en 2014. Malgré cela, le président élu assure tout de même que «l'Otan est très importante» pour lui.
Ces déclarations ont été fraîchement accueillies «avec inquiétude» au QG de l'Alliance, selon le ministre allemand des Affaires étrangères, Frank-Walter Steinmeier, à la sortie d'un rendez-vous avec le secrétaire-général de l'Otan Jens Stoltenberg. «Nous verrons quelles seront les conséquences pour la politique américaine». Pour sa part, l'Otan a redit sa «confiance absolue» dans le maintien d'un «engagement fort» des Etats-Unis, au moment où certains pays européens - en particulier ceux situés sur le flanc Est de l'Alliance - s'inquiètent de l'arrivée de Donald Trump à la Maison Blanche, synonyme de possible détente avec Moscou.
Le président français, François Hollande, a vivement réagi à ces propos: «Je vous l'affirme ici: l'Europe sera toujours prête à poursuivre la coopération transatlantique, mais elle se déterminera en fonction de ses intérêts et de ses valeurs. Elle n'a pas besoin de conseils extérieurs pour lui dire ce qu'elle à a faire», a déclaré le président, qui a également contredit le président élu américain en estimant que l'Alliance atlantique «ne sera obsolète que lorsque les menaces le seront devenues elles aussi». À Paris, le président a rappelé la responsabilité des dirigeants politiques à «se projeter dans le monde entier», et affirmé que l'Amérique de Donald Trump ne devait «pas avoir peur d'elle-même et du monde».
• Irak et Syrie
Donald Trump estime que l'invasion de l'Irak a été une erreur. C'est l'une «des pires décisions, peut-être la pire décision jamais prise dans l'histoire par notre pays. Cela a été comme jeter une pierre sur une ruche.» Concernant la Syrie, il critique l'attentisme de l'Administration Obama. «Nous avions la possibilité de faire quelque chose, une ligne rouge a été franchie et… rien ne s'est passé. Maintenant il est beaucoup trop tard.» Il a également condamné l'action de la Russie dans ce pays.
• Russie
Cette critique ne remet cependant pas en cause sa volonté d'améliorer les relations des États-Unis avec la Russie. Il le prouve une nouvelle fois en proposant de réduire les sanctions imposées à Moscou suite à son implication dans la crise ukrainienne et à son annexion de la Crimée. «Voyons si nous pouvons passer des accords qui peuvent nous être bénéfiques avec la Russie. Je pense, par exemple, que l'arsenal nucléaire pourrait être considérablement réduit. Les sanctions font très mal à la Russie. Je pense que quelque chose pourrait arriver dont beaucoup de monde pourrait tirer des bénéfices.»
Trump promet une assurance maladie «pour tous»
Abroger l'Obamacare. Pour Donald Trump, se débarrasser de la réforme emblématique de son prédécesseur, qu'il estime être une usine à gaz, est une priorité. Cependant, ces derniers jours, de nombreuses voix se sont élevées chez les Républicains, modérés comme conservateurs, pour dénoncer l'absence de projet précis de remplacement. Au Washington Post, Donald Trump affirme qu'il y aura «une assurance pour tous», même pour ceux qui «n'ont pas les moyens de payer».
L'Obamacare n'a pas créé d'assurance publique aux États-Unis mais a renforcé la régulation du marché privé des assurances, dont dépend de nombreux Américains. Les assureurs n'ont plus le droit de faire varier le montant des primes d'assurance selon les antécédents médicaux, ou de refuser d'assurer un patient trop coûteux.
Les personnes assurées «peuvent s'attendre à avoir des très bons services de santé». «Ce sera sous une forme bien plus simple. Bien moins chère et bien meilleure», assure Donald Trump.
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