Axel Fournier - Varennes - Ces temps-ci, la politique québécoise ressemble beaucoup à une grande course cycliste comme le Tour de France. Des politiciens s'échappent du peloton; d'autres peinent à gravir les côtes. Certains favoris déçoivent, tandis que des outsiders surgissent de nulle part.
Prenons l'exemple de François Legault. À l'instar de Thomas Voeckler, il s'est échappé dès le début du Tour et malgré quelques attaques maladroites, a pris de l'avance sur les principaux favoris. Les observateurs s'attendaient tous à le voir reculer au classement au fur et à mesure que le parcours avancerait, mais Legault n'en démord pas. Le maillot jaune (des sondeurs) passe bien les cols et commence réellement à croire en ses chances de remporter la victoire finale. Pour lui, tout va se jouer dans le contre-la-montre électoral; s'il est prêt à temps, il filera allègrement vers le succès.
Du côté de l'équipe péquiste, les pronostics sont moins roses. Pauline Marois avait bien débuté, se forgeant même une belle avance sur son concurrent Jean Charest. Or depuis peu, la guigne s'acharne sur elle. Immobilisée par une crevaison dans le dossier du Colisée, la chef péquiste a vu ses propres coéquipiers filer de leurs propres ailes. Tout d'abord, bien conseillée par son directeur sportif Jacques Parizeau, Lisette Lapointe est passée à l'attaque en compagnie de bons rouleurs comme Pierre Curzi et Louise Beaudoin. Ce trio sait très bien que les bonnes performances de leur ancien camarade François Legault amenuisent les chances de victoire du PQ et le groupe espère pouvoir gagner du temps en se lançant dans une échappée. Reste à savoir si ces trois ténors auront les jambes pour aller jusqu'au bout...
Comme un malheur n'arrive jamais seul, Marois a vu d'autres équipiers quitter le peloton. Le jeune Jean-Martin Aussant, un pressé, s'est échappé, mais il l'a fait en solitaire. Son départ canon lui a permis de semer rapidement ses anciens alliés dans les côtes de Charlevoix. Cependant, comme tout cycliste qui se lance seul à cent kilomètres de l'arrivée, Aussant devra s'accrocher à d'autres athlètes pour remporter la victoire d'étape. Il lui faudra donc impérativement effectuer une jonction avec le groupe Curzi, sans quoi le peloton l'avalera et le recrachera aussitôt.
Une autre recrue péquiste a animé la course ces derniers temps: Benoît Charrette. L'homme de Deux-Montagnes trouve que les péquistes vont trop vite et a choisi de se rapprocher de son ami Legault. Et comme si cela n'était pas suffisant, des costauds, comme Stéphane Bergeron et Bernard Drainville, semblent s'impatienter dans leur rôle de lieutenant. Désormais au PQ, on ne pense plus à triompher et on se contente de terminer la Grande Boucle en limitant les dégâts.
Les autres équipes
Pour d'autres formations, le Tour apporte son lot de bonnes nouvelles. C'est notamment le cas de Québec solidaire, qui voit ses coureurs multiplier les succès. Amir Khadir a marqué des points en bloquant le projet de loi 204, ce qui l'a propulsé dans le haut du classement. Il porte maintenant le maillot à pois de meilleur grimpeur (dans les sondages) et voit sa popularité s'approcher du sommet. Ce teigneux ne manque pas les occasions de monter aux barricades, quitte à se faire détester par certains. Le danger, dans son cas, c'est de vouloir trop en faire et de mal doser ses efforts. Une panne de jambe est si vite arrivée! Malgré tout, l'équipe gauchiste devrait améliorer son sort au classement général.
Chez les adéquistes, la situation ne va guère mieux qu'au PQ. L'abandon de Mario Dumont au début de la compétition, puis les départs de Caire et Picard ont fragilisé la formation qui peine à retrouver son souffle depuis. Le nouveau chef, Gérard Deltell, a connu quelques bons moments, mais son équipe l'entoure mal dans les étapes vallonnées. On a cru pendant quelques jours que l'ADQ se mettrait au service de Legault, mais cela ne s'est pas réalisé. Il est bien possible que ce Tour soit le chant du cygne pour ces coureurs qui s'obstinent à se tenir à droite, même lorsque le vent est contraire.
Les libéraux peuvent compter quant à eux sur une machine bien huilée. Les lieutenants se sacrifient volontiers pour le chef, ce qui permet à Jean Charest de bien performer. Ce dernier a remporté les trois dernières éditions et croit réellement en ses chances de vivre un quatrième sacre. Tous les Québécois savent que le premier ministre remonte les cotes (de popularité) aussi vite qu'il les redescend. En outre, l'écrasement des péquistes semble lui profiter.
Les libéraux mènent une bonne course jusqu'à présent et personne ne se souvient de leurs déboires du commencement. Cependant, ils ne doivent pas se réjouir trop vite. La population veut voir un nouveau vainqueur et Legault pourrait bien être celui-là. Si Charest se défend bien dans les cols, il ne présente pas de nouveauté. Conservateur, il se lance peu dans de grandes envolées. Le danger pour lui, c'est de s'endormir, les deux mains sur le guidon!
L'analogie avec le cyclisme aide à comprendre la situation politique actuelle, où des acteurs essayent de remporter des victoires individuelles tout en étant pris dans un jeu d'équipe. Il faut savoir sortir au bon moment, doser ses efforts et ne pas oublier qu'un groupe uni pédalant dans la même direction progresse plus rapidement que des coureurs en échappée passant leur temps à se contrer mutuellement. La dernière étape, la campagne électorale, se terminera par un sprint massif. Mais attention, l'arrivée sur la colline parlementaire pourrait nous réserver des surprises!
***
Axel Fournier - Varennes
Politique québécoise
Laissez un commentaire Votre adresse courriel ne sera pas publiée.
Veuillez vous connecter afin de laisser un commentaire.
Aucun commentaire trouvé