Des tuiles 16 fois trop chères pour les arches du Quartier chinois

La Ville était prête à payer 800 000 $ pour des tuiles, nous avons trouvé les mêmes pour 50 000 $

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Corruption, quand tu nous tiens






Les soumissions gonflées semblent être de retour à Montréal. La Ville est sur le point de se faire avoir dans ses travaux de revitalisation des arches symboliques du Quartier chinois. Elle s’apprêterait à payer 1500 % trop cher pour des tuiles.


Ces tuiles pourraient coûter jusqu’à 800 000 $, selon les devis des entrepreneurs. Or, notre Bureau d’enquête a trouvé exactement le même produit pour seulement 50 000 $.


Selon les informations que nous avons recueillies, l’appel d’offres visant à rénover les quatre arches et la pagode de ce haut lieu du tourisme montréalais a toutes les apparences d’un exercice où se mêlent collusion et prix gonflés, comme avant la commission Charbonneau.













L’état de désuétude des tuiles qui ornent les quatre arches qui délimitent le quartier chinois et la pagode au coin De La Gauchetière et Clark a poussé la Ville à lancer un appel d’offres pour les remplacer. <br>




Photo Pierre-Paul Poulin


L’état de désuétude des tuiles qui ornent les quatre arches qui délimitent le quartier chinois et la pagode au coin De La Gauchetière et Clark a poussé la Ville à lancer un appel d’offres pour les remplacer.







Un seul fournisseur




Pour obtenir le contrat, les compagnies doivent absolument utiliser des tuiles imposées par la Ville afin de préserver le design oriental des structures. Le seul fournisseur de ce produit serait la compagnie chinoise Luoyang Dannuo Gardens & Building Materials.


Le problème, c’est que la compagnie située dans la province chinoise du Henan ne communique le prix de ses tuiles qu’à une seule entreprise québécoise. Cette technique a pour effet de disqualifier immédiatement les autres entreprises qui voudraient soumissionner.


Selon nos informations, ces tuiles d’argile aux motifs divers coûteront 800 000 $.













Des grillages ont été installés pour que les tuiles et les ornements en piteux état ne tombent pas.




Photo Pierre-Paul Poulin


Des grillages ont été installés pour que les tuiles et les ornements en piteux état ne tombent pas.







Notre Bureau d’enquête a utilisé un autre moyen pour avoir la même soumission de la chinoise Luoyang Dannuo Gardens & Building Materials.


Surprise! Pour la même quantité de tuiles, le prix que nous avons obtenu est de 28 752,41 $US. En comptant les frais de livraison par bateau, nous pourrions donc fournir le même produit à la Ville pour un peu plus de 50 000 $ CAN, soit 16 fois moins cher.


Il semble que rien n’arrête l’imagination de ceux qui veulent faire un coup d’argent avec les contrats publics.


Sur une des soumissions, on peut voir que dans le bordereau détaillé des travaux, 54 000 $ seraient facturés pour la «surveillance en Chine de la production des tuiles».













Des grillages ont été installés pour que les tuiles et les ornements en piteux état ne tombent pas.




Photo Pierre-Paul Poulin


Des grillages ont été installés pour que les tuiles et les ornements en piteux état ne tombent pas.







Collusion apparente




Un entrepreneur qui aurait bien aimé refaire une beauté aux arches du quartier chinois crie au scandale.


«Ça a toutes les apparences de collusion, c’est clairement un appel d’offres biaisé et dirigé», affirme Éric Beaumier, le président de la Société générale de construction BPF.


«Après la commission Charbonneau, je peux vous dire qu’il n’y a pas eu beaucoup de changement dans la manière dont ça se passe dans l’industrie de la construction», ajoute le président de la compagnie accréditée depuis longtemps par l’AMF pour soumissionner sur les contrats publics.


«J’ai vraiment l’impression que les Montréalais sont sur le point de s’en faire passer une», conclut-il.


Il a d’ailleurs envoyé une mise en demeure à la Ville de Montréal et à son inspecteur général Denis Gallant afin que la Ville reprenne l’appel d’offres du quartier chinois et qu’il se déroule sans «irrégularités».



La Ville était prête à payer:
































Le Journal a trouvé les tuiles pour:

































1. Des tuiles réservées à un entrepreneur choyé




Le 23 septembre, un entrepreneur a reçu ce courriel lui disant que le seul fournisseur des tuiles en Chine refuse de faire affaire avec lui parce que les tuiles sont réservées à un seul client à Montréal.

































2. La Ville est avisée des irrégularités





Le 8 octobre, l’entrepreneur écrit à la Ville pour la prévenir qu’il y a quelque chose de suspect avec l’appel d’offres.





























































3. La Ville refuse de changer quoi que ce soit
































La Ville a changé d’avis après nos appels




Les questions de notre Bureau d’enquête ont créé une certaine panique dans les bureaux de l’arrondissement Ville-Marie, responsable de la réfection des quatre arches et de la pagode.


Le secrétaire de l’arrondissement, Me Domenico Zambito, qui avait refusé le 21 septembre dernier de reporter la date de dépôt des soumissions afin de voir un peu plus clair dans cette affaire qui s’apparente à de la collusion, a changé d’avis.


Me Zambito avait d’abord invoqué des délais administratifs afin que le contrat soit octroyé au conseil d’arrondissement prévu ce soir.


Voici finalement la réponse qu’a reçu notre Bureau d’enquête:


«En réponse à votre courriel adressé à Me Zambito, nous vous informons que l’octroi du contrat pour la restauration des pagodes du Quartier chinois n’est pas à l’ordre du jour du prochain conseil d’arrondissement. Les coûts présentés par les soumissionnaires dépassent le budget prévu par l’arrondissement pour la réalisation de ce projet. L’arrondissement évalue les suites à y donner.»








 




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